Le baclofène (Lioresal® et génériques) est un « vieux » médicament, myorelaxant, prescrit dans le traitement de la spasticité d’origine neurologique. Ses vertus dans le sevrage alcoolique chez l’homme ont été mises en évidence par le Pr Olivier Ameisen, cardiologue, souffrant lui-même d’addiction à l’alcool, qui suite à des recherches dans la littérature de médicaments susceptibles d’agir sur le craving, découvre l’efficacité du baclofène sur des rats rendus dépendants. À hautes doses de baclofène, plus aucun animal n’éprouve le besoin de consommer. Il décide alors de s’administrer du baclofène à haute dose, 270 mg/jour (contre 30 à 90 mg/j en posologie d’Amm) et devient alors indifférent à l’alcool. Cet essai « sauvage » digne des chercheurs du début du siècle passé, rendu public en 2005, a depuis fait des émules et des détracteurs.
-› Les premières preuves scientifiques viennent d’être publiées dans la revue Alcohol and Alcoholism (1) par cinq médecins français, dont trois sont des médecins généralistes universitaires à Paris Descartes. Le but de cette étude a été d’évaluer la proportion de buveurs à « haut risque » tels que définis par l’OMS (› 60g/j pour l’homme et › 40g/j pour la femme) devenus abstinents ou « consommateurs à bas risque » ( ≤ 40g/j chez l’homme et ≤ 20 g/j chez la femme) durant l’année de traitement à haute dose de baclofène. Cette étude rétrospective a été menée sur la patientèle libérale d’un médecin généraliste et celle d’un psychiatre hospitalier, tous deux prescripteurs de baclofène. Débuté en novembre 2010, l’étude a permis d’analyser 132 patients sur 181 éligibles (73 %) et 19 ont été perdus de vue. L’âge moyen était de 47 ans et 63 % des patients étaient de sexe masculin. 85 % d’entre eux avaient déjà tenté un sevrage médicamenteux autre, 44 % une cure de désintoxication. En sus du baclofène, 77 % étaient sous traitement psychotrope et 71 % étaient fumeurs (22 cigarettes/j en moyenne).
-› Au terme de l’année, 78 patients sur 132 (59 %) étaient abstinents, et 28 (21 %) continuaient à boire de l’alcool mais à des doses inférieures à celles d’une consommation à bas risque. Seuls 26 patients (21 %) n’avaient pas atteint ces objectifs.
-› Cette étude a pour limites l’absence de groupe témoin et son caractère rétrospectif. « Pour cette raison, un essai visant à tester l’efficacité du baclofène, contre placebo, débutera prochainement, signale le Dr Laurent Rigal, chef de clinique en médecine générale et premier signataire de l’étude présentée. Il s’agira d’un essai pragmatique, où les patients inclus auront moins de critères restrictifs d’inclusion que dans les études classiques. Ce seront des patients qui correspondront à la vraie vie, celle des patientèles de médecine générale ».
-› Reste qu’à ce jour rien ne permet de savoir combien de temps les patients devront prendre du baclofène. Et rappelons qu’en juin 2011, l’Afssaps mettait en garde sur la limite des données de sécurité d’emploi du baclofène à hautes doses.
1- Rigal L, Alexandre-Dubroeucq C, de Beaurepaire R, Le Jeunne C, Jaury P. Abstinence and `Low-Risk’ Consumption 1 Year after the Initiation of High-Dose Baclofen : A Retrospective Study among `High-Risk’ Drinkers. Alcohol and Alcoholism 2012. Vol. À paraitre.
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