« Équipes fragilisées », recours massif à l'intérim, conditions d'exercice « quasi intenables » : le bilan estival critique des patrons de CME de CH

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Publié le 20/09/2022
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Crédit photo : PHANIE

Après Samu-Urgences de France (SUdF), c'est au tour des commissions médicales d'établissements (CME) de centres hospitaliers (CH) de livrer leur bilan de l'été et d'appeler à la pérennisation de la majorité des mesures issues de la mission Braun.

« Le système de santé a une fois de plus tenu grâce aux professionnels de santé malgré des conditions d’exercice quasi intenables dans de nombreux territoires », estime la conférence nationale, au vu des résultats de son enquête menée auprès des présidents de commission médicale d'établissement (CME) et de groupement au cours de la première quinzaine de septembre.

Les deux tiers des 170 répondants font état de « tensions hospitalières » au cours de l'été avec des fermetures inhabituelles d'activités (35 %) ou des réductions de celles-ci (31 %). Partout, en réponse aux difficultés estivales, le recours à l'intérim a été massif au prix d'une augmentation significative des tarifs (32 %) ou d'une baisse de la qualité ressentie des missions (20 %).

Événements indésirables

Ces tensions ont eu des conséquences sur les patients : 78,3 % des présidents disent « avoir constaté ou eu connaissance d'événements indésirables graves associés aux soins en lien avec la situation de crise sanitaire ». La quasi-totalité d'entre eux ont déploré avoir eu des patients qui ont passé la nuit sur un brancard dont 38 % qui estiment le phénomène en augmentation.

Les trois premières raisons invoquées sont le manque de solutions d'aval, que ce soit en SSR ou en Ehpad (81,9 %), la fermeture de lits de court séjour par manque de ressources humaines médicales ou non (71,6 %) puis la saturation ou la fermeture des établissements du territoire (56,9 %).

Parmi les mesures de la « boîte à outils » de la mission Braun, les présidents plébiscitent l'ouverture des maisons médicales de garde (MMG) le samedi matin. Ils soutiennent les idées de mutualiser une ligne de Smur avec le SAU en cas de difficulté, de développer les médecins correspondants du Samu, les astreintes territoriales d'infirmières libérales ainsi que le service d'accès aux soins (SAS).

Les présidents de CME de CH approuvent l'idée d'organiser plusieurs services d'urgences à une échelle territoriale. Ils souhaitent massivement la pérennisation de certaines mesures dont la majoration d'indemnités pour travail de nuit et de week-end (96,9 %) et les majorations des heures supplémentaires et du temps de travail additionnel (96,3 %). 

Sauvegarde de l'hôpital

Certaines « bonnes pratiques » restent à instaurer selon la conférence des patrons de CME : les deux tiers des répondants n'ont pas organisé d'accès direct à un médecin hospitalier pour les médecins libéraux, pour moitié faute de ressources. Le « bed management » a été mis en place dans la moitié seulement des établissements des répondants, également par manque de ressources essentiellement.

Enfin, le travail visant à organiser la permanence des soins (PDS) hospitalière en associant le privé comme le public a très marginalement (7,5 % des réponses) abouti. « Toutes les mesures identifiées par la mission Braun n'ont pas eu le temps d'être déployées mais la majorité mérite d'être conservée et généralisée à l'approche d'un automne tout aussi critique », commente la conférence des présidents. Pourtant, l'idée fétiche du ministre de la Santé, à savoir la régulation médicale de l'accès aux services d'urgences ne convainc pas entièrement les centres hospitaliers. Elle est notée 5,71 sur 10 sur l'échelle des mesures à pérenniser.

Équipes fragilisées

Parmi les « mesures de sauvegarde de l'hôpital », les présidents de CME priorisent – outre les revalorisations de leurs gardes et astreintes – l'obligation de la participation à la permanence des soins pour les praticiens libéraux (notée 8,09 sur dix sur l'échelle de l'indispensable) ainsi que la mise en place de l'encadrement de l'intérim (notée 8,81). « Tous les signaux sont au rouge au sein d'équipes fragilisées, estime la conférence des présidents. Les départs s'accélèrent, notamment au regard d'un sentiment de ne plus exercer de manière satisfaisante et dans des conditions de sécurités adaptées ».

Reste à présent à confronter ces bilans hospitaliers aux conclusions de l'Inspection générale des affaires sociales (Igas) attendues pour la fin du mois.


Source : lequotidiendumedecin.fr