Après les internes de médecine générale et les médecins hospitaliers, c’est au tour des étudiants en médecine d’alerter leurs deux ministres de tutelle sur les enjeux à venir pour maintenir à flot le système de santé.
Moins d’une semaine après les nominations de Brigitte Bourguignon et Sylvie Retailleau au gouvernement, l’Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf) a adressé le 25 mai un courrier aux nouvelles ministres de la Santé et de l’Enseignement supérieur. Un appel largement partagé sur les réseaux sociaux.
Nous appelons solennellement @Sante_Gouv et @sup_recherche à se saisir en urgence des problèmes des étudiants en #médecine ❗️
— Loupan Alexis (@AlexisL_ANEMF) May 25, 2022
Cette nouvelle mandature doit être accompagnée de mesures rapides et ambitieuses, on ne peut plus attendre ‼️ https://t.co/BkA58F7rHU
Urgence
« Aujourd’hui, il y a urgence ! », assènent les carabins tout au long de cette lettre sous forme d’avertissement, alors que le mandat de la précédente ministre de l’Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, avait été marqué par la refonte intégrale des trois cycles d’études médicales. Face au démarrage chaotique de la réforme de la PACES - et à la mise en place encore balbutiante de celle du 2e cycle entamée à la rentrée dernière - l’Anemf averti : « les réformes en cours dans les études de santé sont inabouties ».
Alors que les gouvernements successifs d’Emmanuel Macron avaient promis une révolution pédagogique, celle-ci « n'a pas été accompagnée de moyens humains et matériels suffisant », alertent les jeunes, qui réclament désormais aux deux ministres « d'augmenter le nombre de personnels hospitalo-universitaires de manière équitable entre les universités ».
390 euros par mois
« La situation du système de santé et de la formation médicale est préoccupante », tient encore à rappeler l’Anemf, qui, dès 2019, était dans la rue au côté des professionnels de santé pour défendre l’hôpital public « devenu maltraitant ». Désormais, l’Anemf enjoint le gouvernement à répondre clairement à la précarité étudiante, avec une revalorisation des externes « à hauteur de 390 euros par mois ». « Loin du stéréotype du jeune fortuné issu d’une famille de médecins, l’étudiant en médecine est précaire : près d’un étudiant sur quatre a déjà envisagé d’abandonner ses études pour des raisons financières », rappelle l’association.
Si le Ségur de la santé est venu revaloriser les émoluments des stagiaires, « ils restent presque deux fois inférieurs à celui des étudiants stagiaires d'autres filières », déplorent les carabins. Double peine : si jusque-là le statut précaire des externes était maigrement compensé par des aides aux logements (APL) plus élevées, la réforme des APL entrée en vigueur en 2021 « a entraîné une diminution de nos aides de 100 euros par mois », soufflent encore les futurs médecins, excédés par « cette injustice (qui) doit être réparée sans délai et avec rétroactivité par des adaptations à ce statut si particulier ».
Indemnités kilométriques
Malgré la hausse du coût du logement et l'essence, depuis près de dix ans, les externes n’ont bénéficié d’aucune revalorisation de leurs indemnités kilométriques, plafonnées à 130 euros par mois. Ainsi, ils proposent à Brigitte Bourguignon et Sylvie Retailleau de revoir « à la hausse de l’indemnité de transport basée sur le barème national de remboursement des frais kilométriques des agents de la fonction publique ». Un barème d’ailleurs revalorisé d’environ 10 % en mars dernier.
Au passage - à l’unisson avec leurs camarades internes - les étudiants exhortent d’ores et déjà la ministre de la Santé à « suspendre le projet de quatrième année de médecine générale ». Si sa mise en place dès la rentrée prochaine n’a encore rien d’officiel, la crainte monte chez les externes, à un mois des examens classants nationaux. « Il est intolérable de prévoir son application pour la rentrée prochaine. Une décision concernant la moitié des promotions des futurs internes ne peut être prise à la légère », tonne l’Anemf, alors qu'Emmanuel Macron a laissé planer le doute quant au calendrier de mise en place de cette année supplémentaire.
Après des années « de promesses sans lendemain », le courrier des carabins sonne comme un ultimatum lancé à Brigitte Bourguignon et Sylvie Retailleau. « Parce que la vocation ne palliera plus les conditions d'études et d'exercice dégradées, parce que l'espérance de vie de notre système de santé n'atteindra pas la fin du quinquennat sans mesures fortes, nous vous demandons d'agir en urgence », craint l'association étudiante, qui attend désormais une rencontre avec les ministères « dans les jours à venir ».
Suspension de l’interne de Tours condamné pour agressions sexuelles : décision fin novembre
À Clermont-Ferrand, un internat où « tout part en ruine »
« Pour la coupe du monde, un ami a proposé quatre fois le prix » : le petit business de la revente de gardes
Temps de travail des internes : le gouvernement rappelle à l’ordre les CHU