Pendant une année, la promo « crash test » 2020-2021 avait essuyé les plâtres de la mise en place de la réforme de l’entrée dans les études de santé. Une mission sénatoriale, qui avait tiré un premier bilan en mai 2021, vient de rendre un nouveau rapport sur la poursuite de sa mise en place. Conduite par Sonia de la Provôté, sénatrice centriste du Calvados et médecin du travail, elle dresse un bilan de la deuxième année « plus apaisée, marquée par une meilleure appropriation générale ».
En effet, l'an dernier, elle avait dénoncé des « carences », un « défaut d’anticipation et des disparités intolérables » dans la réforme qui avait remplacé l'ancienne Paces par deux filières distinctes : le parcours d’accès santé (PASS) et la licence accès santé (LA.S). Manque d’équité sur le nombre de places attribuées en médecine, examens flous et mise en place bâclée : les étudiants avaient subi une année éprouvante, avait alors dénoncé la mission, appelant le gouvernement à prendre des mesures urgentes, comme de permettre un redoublement des étudiants lésés. Il est « très dommageable que la réaction soit arrivée si tard dans l’année universitaire, le mal étant, en partie, déjà fait », regrette aujourd'hui Sonia de la Provôté. C'est en juin 2021 que Jean Castex avait fini par annoncer la mise en place de commissions spéciales de repêchages dans chaque fac. Bilan : 1 800 dossiers ont été déposés à l’été et 438 étudiants ont pu in fine redoubler. Cette mesure « a sans doute permis d’éviter le pire », note cependant la parlementaire.
Voie royale
Mais alors que la réforme promettait de diversifier les profils des 56 000 étudiants de première année, la PASS se place toujours comme la voie royale d’accès en médecine. Ainsi, parmi les 10 700 jeunes admis en deuxième année de médecine, 46 % provenaient d’une PASS, 34 % de la dernière promotion de PACES et 19 % seulement d’une L.AS. Au total, le taux de réussite 2020-2021 est de 19,6 % en médecine, toutes filières confondues. Le nombre de places en médecine a, par ailleurs, été augmenté de près de 20 % cette année-là.
Parmi les 11 0000 recalés de la première année, la moitié a dérivé en deuxième année de licence (L.AS 2), 10 % en kiné et les 40 % restant se sont orientés vers des études infirmières, ont changé de voie, abandonné ou sont partis à l’étranger… « Des remontées font état, dans certains établissements, de nombreux départs à l’étranger (médecine en Roumanie, dentaire en Espagne, pharmacie en Belgique…), sans que ce phénomène soit précisément quantifiable », indique Sonia de la Provôté.
Malgré les « efforts collectivement réalisés depuis un an » - notamment des universités qui ont mis en place des commissions de suivi pédagogique - la promo 2021-2022 subit encore « un manque de transparence et de communication de la part de certaines universités ». Par exemple, certaines ont publié leurs capacités d’accueil « en catimini sur le site internet sans transmission formelle aux étudiants, où les documents officiels ne sont ni datés, ni signés, et, qui plus est, évoluent au fil du temps », illustre le rapport. À Bordeaux encore, les modalités d’examen ne seront connues des étudiants que 15 jours avant l’épreuve. Une information « trop tardive », pour le Sénat.
Difficultés de niveau
Si les instigateurs de la réforme voulaient diversifier les profils des étudiants, rêvant même d'attirer de jeunes littéraires, les choses semblent plus compliquées dans les faits. Dans certains établissements, comme en Bourgogne ou à Montpellier, le ratio d’étudiants admis est parfois de l’ordre de 90 % de PASS, 10 % de L.AS. Et une fois passé en deuxième année, les étudiants de licence présentent « globalement plus de difficultés à suivre que les ex-PASS ». Mais là encore, tout dépend des facs. À Lyon, Clermont ou Reims, les L.AS ont de moins bon résultats qu’à Paris où ils font, à l’inverse « partie des meilleurs éléments » en médecine.
En conséquence, Sonia de la Provôté recommande aux universités de « développer le tutorat et les sessions de remise à niveau » et d’établir un socle de connaissance commun. Elle souhaite par ailleurs « lancer une enquête scientifique » pour analyser si, oui non, les profils des étudiants en médecine ont évolué. Le rapport sénatorial conclut finalement sur une interrogation : faut-il maintenir, à terme, ce système « bicéphale » de PASS et de L.AS ? Un basculement progressif vers un système « tout L.AS » est, en tout cas, l’une des options envisagées par la sénatrice. Au risque d’imaginer, encore, de nouveaux changements pour les futurs médecins.
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