Quatrième année de médecine générale : le gouvernement lâche du lest et recule sur l'obligation des stages exclusivement ambulatoires

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Publié le 07/11/2022

Crédit photo : S.Toubon

Face à la fronde des internes qui ont annoncé une nouvelle manifestation la semaine prochaine, l'exécutif finirait-il par lâcher du lest ? Dans un amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) déposé au Sénat vendredi dernier, le gouvernement fait marche arrière sur un point de l'article sur la controversée quatrième année d'internat médecine générale. Il recule en effet sur l'obligation que les stages soient exclusivement réalisés en ville. Si l'année supplémentaire d’internat « a pleinement vocation à se faire en ambulatoire, j’ai entendu que, dans quelques situations très ciblées et exceptionnelles, il était important pour les étudiants de déroger à ce principe, a justifié le ministre de la Santé ce lundi après-midi au début de la discussion générale sur le PLFSS au Sénat. Le gouvernement a déposé un amendement en ce sens pour tenir compte des échanges en cours dans le cadre de la mission sur les conditions de mise en œuvre de cette quatrième année ».

Celui-ci prévoit finalement que les futurs généralistes puissent réaliser un stage « en milieu hospitalier », « à titre exceptionnel », sous des conditions qui sont renvoyées aux voies réglementaires. Serait-ce un premier élément de réponse aux inquiétudes des carabins qui dénonçaient un « remplacement déguisé » ? L’exécutif évoque plutôt une dérogation pour coller d’avantage « au projet professionnel » des internes, « indiqué dans leur contrat de formation ».

Diversification des lieux de stages

En réalisant une partie de leur dernière année à l’hôpital, le gouvernement souhaite que les internes de médecine gé’ puissent se « familiariser davantage avec les conditions d'exercice qui seront les leurs une fois diplômés ». Ce stage « pourra notamment être réalisé au sein des hôpitaux de proximité, des centres hospitaliers, des centres de lutte contre le cancer ou des soins de suite et de réadaptation », indique-t-il encore dans l'exposé des motifs de l'amendement. La diversification des lieux de stages est une demande de longue date des carabins.

Cette ouverture pourrait également répondre à une volonté exprimée par les doyens de médecine. Fin octobre, le vice-président de la conférence des doyens souhaitait que cette année supplémentaire permette aux internes « de colorer leur exercice », en ouvrant la possibilité à certains futurs généralistes de s’orienter vers des formations spécialisées transversales (FST), comme la « médecine polyvalente hospitalière, qui prépare à un exercice mixte ville-hôpital », illustrait alors le Pr Benoît Veber. Sur le sujet, le PU-PH affirmait avoir discuté avec des conseillers ministériels pour « qu’il y ait une précision dans la loi » sur ces FST. Une possibilité en théorie ouverte par cet amendement.

Apaisement

Ces derniers jours, les signes d’apaisement se sont d'ailleurs multipliés de la part du ministère de la Santé. En visite à Tours, vendredi dernier, pour le congrès interne de l’Association nationale des étudiants en médecine de France (Anemf), Agnès Firmin Le Bodo a tenté d'étendre le feu. « On ne vous obligera pas à aller dans les zones sous-denses. Nous vous inviterons, vous inciterons, mais nous ne vous obligerons pas », a déclaré la ministre chargée des Professions de santé, alors que le PLFSS prévoit la réalisation de la quatrième année « en priorité » dans les zones sous-denses. « Des engagements forts » pour l’Anemf, « qui restent maintenant à prouver ».

Ce lundi, c’était au tour de la ministre de l’Enseignement supérieur, Sylvie Retailleau de jouer le dialogue. Interrogée sur « Sud Radio », elle a souligné que « des ajustements sont en train d’être discutés, en particulier avec les étudiants ». « Je tiens à le redire si nous favorisons cet exercice [de la quatrième année] en zone sous dense, ce ne sera pas une obligation » a martelé François Braun au Sénat dans l'après-midi.

« Hypocrisie notable »

Mais malgré toutes ces recherches de compromis, la colère des carabins n'est pas encore retombée. La nouvelle journée d’action est, pour l'instant, toujours prévue le 17 novembre prochain. Dans un communiqué diffusé dimanche, le syndicat des internes de médecine générale parisien (SRP-IMG) a répété que cette « 10e année d’étude » était « une menace pour la médecine générale ». En 2021, selon une enquête menée par le SRP-IMG sur 1 500 internes franciliens, seuls 12 % d’entre eux étaient en faveur d’une 4e année obligatoire.

Le syndicat parisien dénonce une « hypocrisie notable » du gouvernement, alors que les motivations pédagogiques sont « inexistantes » et l’encadrement « déplorable ». « En Île-de-France - premier "désert médical" en métropole -, près de trois maîtres de stages sur dix partiront à la retraite en 2027 », souligne le SRP-IMG. Les internes parisiens craignent par ailleurs que la mesure ne retarde les installations pérennes de jeunes. 


Source : lequotidiendumedecin.fr