C’ÉTAIT PRÉVISIBLE, c’est désormais officiel. Les négociations entre la CNAM et les syndicats de médecins libéraux ont échoué : les partenaires conventionnels n’ont pu signer une nouvelle convention médicale un mois avant l’échéance de la précédente (il aurait fallu que l’accord intervienne au plus tard le 11 janvier au soir). Dans ce contexte d’impasse conventionnelle et de litige, l’Union nationale des caisses d’assurance-maladie (UNCAM) ne peut que constater la rupture des négociations et saisir Bertrand Fragonard, ex-président du Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance-maladie, désigné en qualité d’arbitre. C’est à lui que revient la lourde tâche d’arrêter un projet de convention, sous forme de « règlement arbitral », dans le respect du cadre pluriannuel des dépenses de santé. Les dispositions conventionnelles antérieures continueront de produire leurs effets jusqu’à l’entrée en vigueur du règlement.
Quelles sont les règles du règlement arbitral ? Sur le principe, ce texte est arrêté pour une durée de... cinq ans. Toutefois, les partenaires conventionnels doivent engager des négociations en vue de la nouvelle convention au plus tard dans les deux ans qui suivent l’entrée en vigueur du règlement arbitral (celui-ci cessant de s’appliquer dès la nouvelle convention). Le scénario est le suivant. Bertrand Fragonard disposera d’un délai de trois mois pour transmettre au gouvernement son projet de règlement arbitral. Pour y parvenir, il auditionnera l’UNCAM, les syndicats représentatifs et si besoin les complémentaires santé.
Transition.
Pour quel contenu ? Roselyne Bachelot a posé le principe d’une certaine neutralité du règlement arbitral en annonçant dans nos colonnes (voir « le Quotidien » du 11 janvier) que ce texte forcément transitoire « ne sera pas le lieu ni le moment de discussions tarifaires approfondies ». Si rien n’empêcheque le règlement arbitral reprenne et développe certains thèmes récemment discutés par les partenaires (prévention, efficience, informatisation et télétransmission, simplification administrative, exercice regroupé…), il peut aussi s’en tenir au strict minimum et laisser le champ libre au gouvernement. C’est la crainte de plusieurs syndicats qui redoutent une mise sous tutelle de la médecine libérale dans les prochains mois (d’autant que les agences régionales de santé, les ARS, vont se mettre en place qui coiffent la médecine de ville).
Le scénario le plus probable est que ce règlement arbitral assure une transition relativement courte jusqu’à ce que les conditions soient réunies pour relancer la machine conventionnelle sur des bases rénovées. Première étape : les nouvelles élections professionnelles (en trois collèges pour les médecins) que Roselyne Bachelot veut organiser dès juin prochain. Dans la foulée sera lancée une nouvelle enquête de représentativité syndicale, tenant compte des résultats du scrutin, ce qui risque de prendre au minimum un trimestre. C’est seulement une fois le paysage syndical stabilisé que de nouvelles négociations s’ouvriront... Beaucoup de temps perdu, jugeront certains, quand d’autres veulent croire que la convention médicale se ressourcera à l’issue de ce processus compliqué.
C’est en tout cas une période d’incertitude qui s’ouvre aujourd’hui, où les médecins libéraux peuvent craindre le gel tarifaire et la mise en jachère de nombreux dossiers.
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