En pleine recomposition parlementaire, les sénateurs Daniel Chasseing (Corrèze) et Jean-Pierre Decool (Nord), membres du groupe Les Indépendants-République et territoires, (re)passent à l'offensive avec une proposition de loi qui vise à favoriser l'accès aux soins spécifiquement dans les déserts médicaux.
Dans leur exposé des motifs, les deux élus rappellent les facteurs expliquant les déséquilibres actuels, à savoir « le manque d’anticipation des besoins futurs avec une diminution du numerus clausus jusqu’au début des années 2000 » et « une moindre attractivité de certains territoires au regard de l’évolution des attentes des jeunes médecins, dans un contexte de liberté d’installation ».
Aux yeux des sénateurs, les incitations financières jusque-là instaurées (primes, bourses, bonus) ont été « peu efficaces ». En revanche, remarquent-ils, une récente étude de la Drees (service statistique du ministère) a démontré que « les étudiants issus de déserts médicaux et ceux ayant effectué un stage en médecine générale ambulatoire, en particulier dans un désert médical, sont plus enclins à s'installer dans ces mêmes zones ». D'où le pari de les intéresser le plus tôt possible à s'implanter dans ces zones fragiles, à court et à plus long terme, et de cibler les mesures dans ces secteurs prioritaires.
Exonération du forfait patient urgences
Dans leur courte proposition de loi (quatre articles), les parlementaires proposent en premier lieu, de façon palliative, de « limiter le reste à charge » des patients contraints de se rendre aux urgences à cause d'une offre de soins limitée, grâce à une exonération ou une limitation du nouveau forfait patient urgence (FPU) dans les zones sous-dotées. Une mesure de court terme qui vise à « améliorer l'accès aux soins non programmés dans les déserts médicaux » et à lutter contre le renoncement aux soins. Ce forfait patient urgences (FPU) de 19,61 euros est entré en vigueur en 2022 et s'applique à chaque personne qui se rend aux urgences sans être hospitalisée.
Pour faciliter « l'immersion » des étudiants dans les territoires en difficulté, le texte recommande ensuite d'allonger d'un an la durée des études de médecine générale (une réforme dans les tuyaux) afin de prévoir « une année de stage dans une zone sous-dotée », et ce sous la responsabilité d'un médecin référent. Une façon d'y « encourager l'installation ultérieure (...) sans remettre en cause la liberté d'installation », avancent les deux sénateurs, même si ce « fléchage » des internes en fin de cursus (ou docteurs juniors) dans les déserts médicaux est très loin de faire l'unanimité chez les jeunes.
Du renfort dans les MSP et les centres de santé
Afin de renforcer l'offre de soins dans les maisons et centres de santé situés dans les zones déficitaires, la PPL suggère aussi que les CHR et CHU leur mettent à leur disposition du personnel médical. « Les conditions de cette mise à disposition (de personnel) seraient assurées par les projets territoriaux de santé », précise le texte, qui semble parier sur des vacations de praticiens hospitaliers pour renforcer l'ambulatoire.
Et pour compenser la perte de recettes résultant de l'application de ce texte, les sénateurs proposent des mesures de gage financier avec la création « d'une taxe additionnelle aux droits mentionnés à l’article 575 du code général des impôts » (taxes sur les produits du tabac).
Mentorat et médecine rurale
Mais ce n'est pas tout. En complément de ces dispositions législatives, les sénateurs avancent diverses « mesures d'ordre réglementaire ». La première consiste à instaurer pour les jeunes médecins un vrai « guichet unique d’accompagnement à l’installation » dans les déserts, au sein de chaque département, pour centraliser les besoins territoriaux, toutes les aides et l'accompagnement familial.
Les carabins issus des zones sous-dotées devraient de leur côté être mieux soutenus grâce au « mentorat » pour favoriser leur réussite lors du premier cycle, souvent décourageant. Plus globalement, les sénateurs veulent améliorer l'attractivité des études médicales pour les élèves issus des campagnes et même instaurer au sein des facs de médecine une filière dédiée à la « médecine rurale ».
La proposition de loi sénatoriale prévoit enfin de « limiter le délai » de soutenance de la thèse d'exercice en médecine, à l’issue des études, afin de favoriser… l'installation rapide.
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