Par rapport à la version de 2014, les nouvelles guidelines françaises sur l’alcool n’apportent pas de révolution mais soulignent plusieurs évolutions détaillées lors du congrès par le Pr François Paille, addictologue au CHRU de Nancy.
Le dépistage des complications hépatiques revu et corrigé
Côté repères de consommation à risque, la SFA reprend globalement les seuils établis par Santé publique France et l’Inca en 2017 (soit pas plus de 2 verres par jour et pas tous les jours). Sur les repères concernant « l’alcoolisation ponctuelle importante », alors que le sujet fait toujours débat, la société savante reprend divers seuils. À l’instar de ceux de l’OFDT (5 verres en une seule occasion au cours des 30 derniers jours), de l’OMS (6 verres en une occasion une fois par mois, voire une fois par semaine) ou, pour le binge drinking, celle du NIAAA (National Institute on Alcohol Abuse and Alcoholism) (6 à 7 verres en moins de deux heures, avec alcoolémie finale d’au moins 0,8 g/L).
Pour le dépistage de la maladie alcoolique du foie, la SFA préconise désormais de cibler les personnes de plus de 40 ans avec un test Audit pathologique ou une consommation déclarée de plus de 14 verres par semaine, rapporte le Pr Paille. Concernant les techniques de dépistage, exit la biologie classique du fait des « mauvaises performances des transaminases », au profit d’un dépistage direct par fibroscan, fibrotest ou fibromètre alcool, à renouveler « au moins tous les ans ».
Quid du baclofène ?
Sur le plan thérapeutique, les nouvelles recommandations ont intégré les données récentes de la littérature sur le baclofène, dont un essai randomisé américain de 2021 confirmant son efficacité (sur trois mois, presque 14 jours de forte consommation en moins et 13 jours d’abstinence en plus vs placebo) mais avec un effet genre, l’efficacité (et la probabilité d’effets indésirables) étant plus marquée chez les femmes.
Ainsi, la SFA préconise le baclofène. Concernant les posologies, « s’il n’existe plus de dose maximale depuis un arrêté du tribunal de Pontoise, l’ANSM recommande fortement de ne pas dépasser 300 mg/jour », rappelle François Paille. L’addictologue appelle par ailleurs à la vigilance chez les sujets âgés (en lien avec un risque de chute et d’effets cognitifs) et les cirrhotiques (du fait de données d’efficacité et de sécurité insuffisantes).
Le Pr Paille a mentionné d’autres traitements, pas encore préconisés mais pour lesquels des « données intéressantes » se dégagent. Comme l’oxybate de sodium, qui permettrait, selon un article de synthèse, de réduire la consommation de 4,6 verres par jour vs placebo, ou certaines molécules psychédéliques qui suscitent un intérêt croissant dans cette indication.
Les TSO peuvent-ils favoriser l’alcoolodépendance ?
Les traitements de substitution aux opioïdes (TSO) peuvent-ils être à l’origine d’une dépendance à l’alcool ? Telle est la question à laquelle a tenté de répondre le Pr Florence Vorspan, psychiatre et addictologue à l’hôpital de Lariboisière (AP-HP).
Alors que les TSO comptent toujours parmi les meilleures stratégies de prise en charge de ce type d’addictions, « le taux de réponse n’est pas de 100 % », rappelle la Société française d’alcoologie, et certains patients « peuvent effectuer un transfert d’addiction vers d’autres substances dont l’usage est associé à une importante morbimortalité », s’inquiète la société savante.
Pour évaluer ce risque potentiel plus précisément, le Pr Vorspan s’est penchée sur trois études françaises, conduites au total auprès de 167 patients présentant à la fois des antécédents de dépendance aux opiacés, de TSO et de dépendance à l’alcool, à la recherche de corrélations chronologiques entre introduction d’un TSO et dépendance à l’alcool.
Résultat : dans la majorité des cas, les sujets étudiés avaient reçu un diagnostic de trouble d’usage de l’alcool avant tout TSO. Cependant, chez une part non négligeable de patients, la dépendance à l’alcool s’était bien déclarée après mise en place d’un TSO. Ainsi, à la question « est-ce que la dépendance secondaire au TSO existe ? », on peut répondre « oui, pour 24 % des patients », estime le Pr Vorspan. Il s’agit alors de patients présentant une dépendance aux opioïdes particulièrement sévère, survenue précocement, et ayant occasionné une première prescription également précoce de TSO.
Toutefois, aucun rôle d’un potentiel sous-dosage du TSO n’a pu être mis en évidence. Et plus généralement, un lien de cause à effet avec le TSO n’a pu être confirmé – faute de comparateur. D’où la nécessité d’études complémentaires...
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