Dans un rapport rendu public ce matin, l’Académie nationale de pharmacie met en garde contre les compléments alimentaires à base de plantes et appelle à durcir la réglementation.
En vente libre non seulement en officine mais aussi dans les rayons des grandes et moyennes surfaces, des boutiques bio et bien-être ou sur internet, ces produits séduisent : un Français sur cinq en consomme régulièrement. Le public les croit sûrs, puisqu’autorisés à la vente, et inoffensifs au prétexte que plante rime avec « naturel ».
Sans forcément savoir que leur mise sur le marché, s’agissant d’un complément alimentaire — donc d’un aliment — ne répond pas aux mêmes exigences réglementaires qu’un médicament (balance bénéfice risque étayée d’études) : une simple déclaration suffit à les faire enregistrer, sans que les autorités ne vérifient l’allégation d’innocuité dont la responsabilité pèse sur le fabricant.
Sans mesurer non plus qu’il existe de réels risques d’interaction entre les plantes, qui composent environ 64 % de ces compléments, et des traitements médicamenteux en cours. Les phyto-œstrogènes du soja font mauvais ménage avec certains traitements anticancéreux, dont ils altèrent l’efficacité. Le Citrus maxima (pamplemousse) est connu pour augmenter les effets indésirables de certains traitements, anticholestérol notamment, mais rien n’exige aujourd’hui qu’il soit mentionné sur l’étiquette. « Les médecins sont trop peu formés aux interactions phytothérapie médicaments, regrette le Pr Jean-Pierre Fouchet, rapporteur de l’Académie sur ce dossier : ils devraient néanmoins toujours penser à poser la question à leurs patients en consultation ».
Des médicaments qui s’ignorent
Dans la jungle des compléments alimentaires, l’Académie de pharmacie met particulièrement en garde contre ceux qui, sous l’allégation « d’améliorer le transit intestinal » ou la promesse d’un « ventre plat », contiennent des principes actifs (hétérosides hydroxyanthracéniques) identiques à ceux de médicaments classés comme « laxatifs stimulants », aussi puissants qu’irritants pour le tube digestif. Suc d’aloe, racine de rhubarbe de chine, sené, écorce de bourdaine ne devraient ainsi pas avoir droit de cité dans la liste des 540 plantes autorisées pour les compléments alimentaires, établie par arrêté ministériel le 24 juin 2014. « Ces plantes n’ont jamais été utilisées comme aliments, souligne Pierre Champy, du laboratoire de pharmacognosie de l’Université Paris sud : si elles n’ont aucune vertu alimentaire, elles ont en revanche des propriétés pharmacologiques, qui nous amènent à les considérer comme des médicaments ». À ce titre, elles nécessiteraient au minimum de préciser posologie et durée de traitement à ne pas dépasser. Outre que ces principes actifs sont clairement contre-indiqués pour les moins de 12 ans et en cas de syndrome occlusif, de douleurs abdominales de cause indéterminée, de rectocolite ou de maladie de Crohn, ils se révèlent en effet dangereux. Leur usage à long terme engendre un risque de dépendance, de lésions définitives de la paroi intestinale (maladie des laxatifs), d’hypokaliémie et de déshydratation.
Réviser la réglementation
Dans ce contexte, les académiciens demandent « une révision rapide » de la liste des plantes autorisées dans les compléments alimentaires et plaident pour un renforcement du dispositif de nutrivigilance et une information plus exhaustive des consommateurs.
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