Agnès Buzyn n'a jamais exclu de recourir à l’obligation de vaccination contre la grippe pour les professionnels de santé. « Si nous ne voulons pas rendre la vaccination grippale obligatoire pour les professionnels de santé, nous devons absolument tout faire pour améliorer le taux de professionnels vaccinés », affirmait-elle il y a un an.
Dans un rapport rendu public ce lundi, l'Académie de pharmacie va encore plus loin. L'institution réclame l'extension de l'obligation vaccinale des professionnels de santé contre la grippe mais aussi contre la rougeole, la coqueluche et la varicelle.
Selon l'Académie de pharmacie, l’absence de vaccination des professionnels de santé est responsable d’infections nosocomiales parfois graves lorsqu’elles surviennent chez les sujets physiologiquement (nourrissons, personnes âgées) ou pathologiquement immunodéprimés.
« Les doutes à l’égard de la sécurité, de l’efficacité et de l’utilité de certains vaccins atteignent une partie non négligeable des professionnels de santé », observent les auteurs. Et si les professionnels de santé sont globalement bien couverts par les vaccinations obligatoires (DTP, hépatite B), avec des taux se situant toujours au-dessus de 90 %, « la couverture vaccinale des professionnels de santé pour les vaccinations recommandées est peu documentée, voire ancienne, mais serait très insuffisante ».
Elle serait inférieure à 50 % pour la rougeole « deux doses » pour les personnes sans immunité connue ; inférieure à 45 % pour le rappel coqueluche de l’adolescence ; et inférieure à 30 % pour la varicelle, pour les personnes sans immunité connue, cite le rapport.
Avant de se prononcer dans ce document d'une quarantaine de pages, les Académiciens ont auditionné plusieurs experts du sujet : le Pr Odile Launay (Cochin-Pasteur), le Dr Daniel Lévy-Bruhl (Santé publique France) et le Pr Bruno Lina (Centre national de référence).
Pour une traçabilité de la vaccination antigrippale
L'Académie recommande tout d'abord que la vaccination contre la grippe saisonnière soit obligatoire pour tous les professionnels de santé et a minima, pour ceux, en exercice ou en formation dans une structure hébergeant des personnes âgées. Afin de faciliter cette mesure, elle propose que les professionnels puissent être vaccinés chaque année gratuitement, sur leur lieu de travail, et qu’un système de traçabilité de la vaccination puisse être mis en place afin de vérifier que l'injection a bien eu lieu, avec un registre annuel électronique.
Selon les académiciens, l’obligation vaccinale contre la rougeole devrait concerner tous les professionnels de santé en exercice ou en formation (avec rattrapage à deux doses pour tous les professionnels non vaccinés et sans antécédents et ce, quel que soit l’âge). La vaccination contre la coqueluche devrait, elle, être rendue obligatoire pour tous les professionnels de santé en formation ou en poste, sans exception, notamment pour les personnes qui sont en contact étroit et répété avec les nourrissons ainsi que pour ceux qui exercent dans les établissements et services pour personnes âgées.
Enfin, l’obligation vaccinale contre la varicelle devrait s'adresser à tous les professionnels de santé et les personnels médico-sociaux en contact avec les jeunes enfants (crèches et collectivités) ainsi qu'à tous les étudiants en santé dès la première année.
Défendre la vaccinologie dès la formation initiale
L'Académie de Pharmacie se dit favorable au développement de « stratégies motivationnelles » vantant les bénéfices individuel et collectif de la vaccination. Elle souhaite par ailleurs une harmonisation du calendrier vaccinal, des recommandations et des obligations vaccinales en Europe.
Selon l'Académie, des messages ciblés sur « l’utilité, l’efficacité et le rapport bénéfices/risques positif des vaccinations » doivent être tenus dès la formation initiale pour convaincre les professionnels de santé de l'utilité de la vaccination et « dénoncer et contrer les fausses informations, quelle qu’en soit la source, relayées par les médias et les réseaux sociaux ».
Un avis calqué sur ceux du HCSP, sauf pour la grippe
Le Haut Conseil de Santé Publique ne disait pas autre chose, sauf pour la grippe en raison de son efficacité aléatoire.
Pour la varicelle, dans un avis de 2004, le HCSP recommandait la vaccination à l’entrée en première année des études médicales et paramédicales aux étudiants sans antécédents de varicelle et qu’un rattrapage soit effectué auprès de l’ensemble du personnel de santé sans antécédents.
En période épidémique de rougeole, les experts enjoignaient les professionnels au contact de populations vulnérables, en particulier les personnels de santé à se faire vacciner.
Enfin, concernant la coqueluche, le HCSP recommande aux professionnels de santé « que les rappels administrés à l’âge de 25, 45 et 65 ans comportent désormais la valence coquelucheuse (vaccin dTcaP).»
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