LED et santé, l'Anses appelle à la prudence

Publié le 14/05/2019
Lumière bleue

Lumière bleue
Crédit photo : lchumpitaz / Adobe Stock

Pour la performance énergétique, les ampoules LED ou diodes électroluminescentes, qui consomment peu au regard de leur rendement, n’ont que des avantages. C’est même pour cela qu’une directive européenne de 2005 a entériné le retrait progressif de leurs ancêtres, les ampoules à incandescence et halogènes. L’usage des LED à lumière bleue s’est considérablement étendu depuis, à l’éclairage privé comme public, mais aussi à une foule d’objets (rétro-éclairage des écrans, phares automobiles, décorations et même jouets). Or les inconvénients de cette lumière bleue sur la santé sont de plus en plus avérés, estime l’Agence nationale de sécurité sanitaire, alimentation, environnement et travail (Anses), qui vient de rendre un rapport sur cette question. L’agence avait déjà émis un premier avis soulignant les risques potentiels liés à usage de ces nouveaux éclairages en 2010, alors que ces LED ne concernaient que l’éclairage domestique et que les études étaient encore rares. Ce deuxième rapport, pour lequel un groupe d’une dizaine d’experts a passé en revue plus de 600 publications scientifiques, a étudié l’exposition de la population au travers de plusieurs scénarios et évalué les moyens de protection enfonce le clou contre les dangers.

La toxicité de la lumière bleue confirmée

 « Aucune étude n’a prouvé de lien direct entre LED et DMLA. Mais les méta-analyses de ces dernières années donnent un faisceau d’arguments solides pour dire que l’exposition à la lumière solaire, la plus chargée en lumière bleue est l’un des facteurs de stress oxydatif et de risque de DMLA » indique le Pr Francine Behar-Cohen, ophtalmologiste rétinologue à Paris et à l’INSERM, qui a présidé le groupe de travail. Des études ont confirmé la toxicité à court terme de la lumière bleue, lorsqu’elle est intense et que l’œil y est exposé de manière aiguë.

Le risque est faible avec les ampoules qui équipent nos domiciles. Soumises à des normes photo-biologiques elles ne sont accessibles au public que si elles entrent dans la catégorie risque 0 ou 1. Le problème est que d’autres éclairages LED, comme celle des lampes torches, des phares, des décorations lumineuses, de certains jouets échappent à cette réglementation, souligne l’agence, qui recommande de faire évoluer le cadre réglementaire pour qu’il s’applique à tous les systèmes LED. « Dans la mesure où hors exposition aiguë, on peut aussi suspecter des effets à long terme, liés à une exposition chronique, il nous paraît également nécessaire de revoir les limites d’exposition, qui nous semblent aujourd’hui insuffisantes » ajoute Olivier Merckel, chef de l’unité risques des agents physiques à l’Anses.

Menace sur les rythmes biologiques

Les experts confirment par ailleurs la mise en garde des chronobiologistes et spécialistes du sommeil : une exposition, même faible à la lumière bleue émise par les LED le soir, alors que la rétine y est plus sensible, interfère avec le rythme chronobiologique, retarde l’endormissement et perturbe le sommeil. Les écrans des ordinateurs tablettes, smartphones sont une source importante. Enfants et adolescents sont particulièrement à risque pour une raison physique : leur cristallin n’est pas assez formé pour filtrer pleinement cette lumière, car il ne s’opacifie que vers 20 ans.

De solutions de protections d'efficacité très variable

Pour se protéger de la lumière bleue des LED, il faut aujourd’hui avant tout compter sur… nos comportements. Limiter son exposition aux écrans le soir et l’éviter aux plus jeunes. À l’achat d’ampoules, privilégier celles qui dispensent une lumière « blanc chaud » (température de couleur est inférieure à 3 000 Kelvin) : plus la lumière est « froide » en effet, plus sa température de couleur est élevée (entre 3 900 et 6 900 K) et riche en lumière bleue. Verres correcteurs traités par les opticiens, lunettes spéciales ou filtres d’écrans : impossible de compter sur les dispositifs vendus dans le commerce qui promettent de protéger nos yeux, prévient l’Anses, qui les a évalués. Outre que « leur efficacité est trop variable, aucune information n’est donnée sur l’intensité d’atténuation qu’elles sont censées assurer. »

Claudine Proust

Source : lequotidiendumedecin.fr