Une pression artérielle élevée est responsable d’une mortalité prématurée estimée à 10 millions de morts dans le monde, dont 4,9 millions par pathologies cardiaques ischémiques et 3,5 millions par AVC. Ce rappel annoncé en préambule de la mise à jour des recommandations européennes ESC/ ESH veut justifier l’attitude plus agressive préconisée dans cette actualisation 2018. Comme dans la précédente version de 2013, la définition de l’HTA reste identique, avec une PA ≥ 140/90 mmHg. Le texte européen est moins offensif que les guidelines américaines (2017) qui ont adopté le seuil de 130/80 mmHg pour définir une HTA, ce qui impose outre-Atlantique un traitement médicamenteux chez des personnes seulement considérées comme ayant une pression artérielle “normale haute” en Europe.
Objectif 130/80
Néanmoins, la nouveauté européenne est qu’il est désormais recommandé de ne plus se contenter de traiter en vue de descendre sous les 140/90, mais de viser les valeurs de 130/80, voire moins (mais pas en deçà de 120/70) chez la plupart des patients hypertendus, en particulier les moins de 65 ans. Un objectif plus agressif que les recommandations de la Société française d’hypertension artérielle qui visent 130-139 et moins de 90 mmHg. Les cibles tensionnelles ont été individualisées pour chaque catégorie d’hypertendus : entre 120 et 130 mmHg chez les moins de 65 ans et éventuellement chez les patients en post-AVC/AIT (selon les comorbidités et le niveau de risque), 130 mmHg ou moins chez les diabétiques et/ou coronariens, entre 130-140 mmHg en cas de maladie rénale chronique ou d’un âge supérieur ou égal à 65 ans. La pression diastolique doit être inférieure à 80 mmHg mais jamais à 70 mmHg. « En 2018, le traitement de l’HTA est moins conservateur qu’auparavant chez les personnes âgées et très âgées », fait remarquer le Pr Bernard Vaïsse, président du Comité français de lutte contre l’hypertension artérielle. « Des seuils plus bas, entre 130 et 140 mmHg, mais pas moins de 130 mmHg, doivent être atteints respectivement chez les hypertendus de 65-79 ans et les 80 ans ou plus, à adapter à l’âge biologique plutôt qu’à l’âge civil, et à la tolérance médicamenteuse. »
Bithérapie dès 160 mmHg
Afin d’améliorer l’efficacité et l’observance des traitements, les experts européens misent désormais sur une bithérapie d’emblée. Selon les précédentes recommandations – qui restent préconisées en France – la monothérapie était la règle, avant d’opter pour une bithérapie en cas d’échec. Cette dernière permet de contrôler 60 à 70 % des hypertendus (vs 40 % pour une monothérapie). Cette stratégie de double thérapie ne concerne pas les hypertendus de grade 1 (140-159/90- 99 mmHg) surtout si leur systolique est inférieure à 150 mmHg, ni les 80 ans ou plus, ni les très fragiles.
En matière de molécules, les guidelines européennes valident toutes les combinaisons médicamenteuses, en dehors de l’association de deux bloqueurs du système rénine-angiotensine (ARA II et IEC). La bithérapie initiale en un unique comprimé comporte un bloqueur du système rénine-angiotensine et un inhibiteur calcique ou un diurétique. « Selon les enquêtes, en France, seules 60 % des bithérapies prescrites sont conformes aux guidelines », souligne Bernard Vaïsse : « Celles qui ne le sont pas comportent des alpha-bloquants voire des bétabloquants, chez les plus de 60 ans où ils sont pourtant moins efficaces. Ces molécules devraient être remplacées par un anticalcique. » En cas d’échec, le principe est identique, avec une trithérapie en association fixe et l’ajout d’un diurétique (de l’anse en cas d’insuffisance rénale eGFR < 30). À noter qu’en France, la trithérapie fixe n’est pas remboursée par l’Assurance maladie – une aberration pour beaucoup de spécialistes.
Enfin, nouveauté des guidelines européennes, si l’hypertension est résistante, on ajoute de faibles doses de spironolactone à la trithérapie en monoprise, protocole déjà conseillé en France. S’il elle est mal tolérée, on préférera un autre diurétique (eplerenone, amiloride, thiazide/diurétique thiazidique ou de l’anse), un alpha-bloquant (doxazosine) ou un bétabloquant (bisoprolol). Cette dernière classe doit d’ailleurs être envisagée à chaque étape lorsqu’il existe une indication spécifique (angor, insuffisance cardiaque, post-IDM, fibrillation atriale, femmes jeunes ou enceintes).
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