L’usage actuel de la cigarette électronique concerne 6 % de la population des 15-75 ans. Ils sont 57,3 % à l’utiliser quotidiennement, 30 % de manière hebdomadaire et 12,7 % moins souvent. Sur l’ensemble de la population générale, les utilisateurs quotidiens de cigarette électronique représentent 2,9 %, soit entre 1,2 et 1,5 million d’individus. En actualisant son avis du 25 avril 2014 relatif aux bénéfices-risques de la cigarette électronique étendus en population générale, il ressort que la cigarette électronique peut être considérée comme une aide pour arrêter ou réduire la consommation de tabac des fumeurs. Mais elle pourrait constituer aussi une porte d’entrée dans le tabagisme. Et induirait « un risque de renormalisation de la consommation de tabac compte tenu de l’image positive véhiculée par son marketing et sa visibilité dans les espaces publics ».
Demi-avis ?
Le HCSP recommande d’informer le public mais sans en faire la publicité. La cigarette électronique serait donc une aide à l’arrêt du tabac et un mode de réduction des risques. Mais il recommande toutefois de maintenir les modalités d’interdictions de vente et de publicité prévues par la loi et d’étendre l’interdiction d’utilisation à tous les lieux affectés à un usage collectif.
Flou
Le HCSP invite au renforcement du dispositif observationnel du tabagisme, à la réalisation d’études épidémiologiques et cliniques robustes sur la cigarette électronique, ainsi qu’au lancement de recherches en sciences humaines et sociales sur cette question. Il demande que soit clarifié le statut de la cigarette électronique et des flacons de recharge. Il recommande que soient poursuivis les efforts de labellisations et de marquages pour informer les consommateurs et assurer leur sécurité.
Attente
Selon l’instance de santé publique, les travaux scientifiques ne montrent pas la supériorité de la cigarette électronique, nicotinée ou non, sur les substituts nicotiniques que sont les patchs. Toutefois, ses utilisateurs déclarent que la cigarette électronique leur a permis de réduire leur consommation de tabac. Aussi, la cigarette électronique devrait être considérée comme un outil de réduction des risques. De plus, les e-liquides présentent l’intérêt d’annuler, ou de significativement réduire les risques de cancers et sont « beaucoup moins nocifs que le tabac, même si d’autres risques subsistent, apparaissent ou sont à ce jour inconnus. Une extrême vigilance reste donc de mise concernant la toxicité de ces produits ».
Lobbys
Le HSCP souligne par ailleurs l’implication de l’industrie du tabac dans le marché de la cigarette électronique. « Comment s’assurer de l’indépendance et de l’impartialité de certains travaux scientifiques alors même que certaines publications apparaissent biaisées, ou au minimum, sujettes à caution dans leur méthodologie et leurs résultats ? Il est souligné aussi que des conflits d’intérêt ont été mis en évidence dans certaines publications vantant les mérites de la cigarette électronique (The Lancet, 2015). Le second point repose encore sur la capacité de lobbying et d’influence de l’industrie du tabac. Certaines parties prenantes s’interrogent sur certaines directions prises par la directive 2014/40/UE du Parlement européen et du Conseil, en particulier celles concernant les futures caractéristiques techniques dont devront disposer les recharges d’e-liquide et les cigarettes électroniques. Selon ces parties prenantes, l’obligation d’adhérer à ces caractéristiques techniques ne peut que favoriser l’industrie du tabac dont l’assise financière et technique, supérieure à celle des industriels de la cigarette électronique, leur conférera un avantage probable sur le marché. »
Doutes
Au final, la dissonance existante à l’heure actuelle entre toxicologie, épidémiologie et pratiques, ou en d’autres termes, entre les conclusions contradictoires de la littérature scientifique et l’observation de terrain des professionnels de santé et des usagers met clairement le HCSP en difficulté. Comment établir des recommandations de santé publique « evidence-based » alors même que tous les signaux qui remontent du terrain apparaissent convergents en contredisant, ou tout au moins en relativisant, les conclusions scientifiques ? Comment établir des recommandations fondées sur les preuves alors que l’établissement de ces preuves est d’un autre ordre temporel que les pratiques individuelles ?
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