« Non, les industriels n’organisent pas sciemment les ruptures de stock ! ». À l’occasion de la présentation de son plan d’action contre les pénuries de médicaments, le Leem a souhaité tordre le cou à certaines « rumeurs infondées » quant aux causes de ces pénuries et modérer les fausses bonnes solutions qui fleurissent sur ce sujet. « Pour un industriel, une rupture de stock est toujours une situation de force majeure avec des conséquences néfastes sur le plan économique mais aussi en termes de réputation » s’est justifié en préambule Philippe Lamoureux, directeur général du Leem, tout en soulignant que le problème est multifactoriel.
Un problème multifactoriel
Selon l’organisation professionnelle des entreprises du médicament, « la première cause de rupture de stock est la tension mondiale entre la demande et la capacité de production (25 %). Interviennent ensuite les fluctuations imprévues du marché (23 %), les problèmes liés à la production en elle-même (20 %), les problèmes d’approvisionnement en principe actif (15 %), les contraintes réglementaires (10 %) et les contraintes économiques (7 %) ».
La question de la prévention des ruptures d'approvisionnement « est donc un sujet qui relève de la responsabilité de nos entreprises mais également de l'ensemble des acteurs de la chaîne » estime Philippe Lamoureux. Partant ce constat, le Leem a élaboré un plan d’action impliquant l’ensemble des parties prenantes.
Mieux cibler les médicaments prioritaires
Décliné autour de 6 grands axes, ce plan prévoit notamment de définir un ensemble de « médicaments d'intérêt sanitaire et stratégique » (MISS) pour lesquels les mesures de gestion de pénurie (stocks de sécurité mobilisables, suivi plus précoce des stocks, etc.) devraient être renforcées. Cette liste établie « au regard de critères précis » permettrait de concentrer les efforts sur les traitements « les plus indispensables et irremplaçables », alors que le périmètre actuel des « médicaments d'intérêt thérapeutique majeur » englobe près de la moitié des produits sur le marché,
L’accent est mis aussi sur l’approvisionnement en matière première. Actuellement, 60 à 80 % des principes actifs sont fabriqués hors Europe (contre 20 à 30 % il y a 30 ans) avec pour de nombreuses molécules plus que 2 ou 3 fournisseurs mondiaux. Dans ce contexte « toute non-conformité sur un principe actif entraîne un arrêt immédiat de la production du médicament ».
Pour sécuriser l’approvisionnement et renforcer l’indépendance de l’Europe à ce niveau, le Leem souhaite « favoriser le maintien ou la relocalisation des sites en Europe des sites de productions de matières premières actives » et défend à ce titre la mise en place de mesures fiscales incitatives.
Les grossistes répartiteurs en ligne de mire
Sans surprise, le secteur est aussi favorable à une revalorisation des prix des médicaments de ville en France. Dans 50 % des cas, ceux pratiqués en France sont ceux les plus bas du marché européen avec des variations pouvant aller du simple au double comme pour les antibiotiques. Ainsi, une ampoule d’Augmentin est vendue 4,34 euros en France contre 7,67 en Allemagne. Ces écarts de prix peuvent inciter les fabricants à limiter, voire arrêter, leur commercialisation en France et « entraînent un développement des exportations parallèles qui peuvent aggraver un risque de tension d’approvisionnement et provoquer des pénuries ». Dans le cadre de la libre circulation des biens au sein de l’union européenne certains grossistes répartiteurs « short-liners » se sont en effet spécialisés dans le commerce entre pays de l’UE, achetant des médicaments en France pour les revendre à d’autres nations plus offrantes. D’où la volonté du Leem d’ « adapter l’encadrement de la distribution en cas de tension ou de rupture d’approvisionnement ».
Le plan prévoit par ailleurs d’ « optimiser le partage d’informations entre les acteurs de la chaîne du médicament et les patients » et de « renforcer le pilotage stratégique au niveau national et favoriser l’harmonisation des pratiques réglementaire à l’échelon européen ».
Si la plupart de ces propositions font écho à celles émises en octobre par le Sénat, les industriels du médicament n’ont pas retenu celle consistant à promouvoir des structures publiques susceptibles de produire des médicaments indispensables, jugée irréaliste au niveau financier.
De même, le durcissement des sanctions financières envers les laboratoires, proposés par certains « ne serait pas une solution car elle risque au contraire de réduire l’offre du médicament en dissuadant certains opérateurs d’intervenir sur le marché français ».
En 2017, 538 signalements de ruptures ou tensions d'approvisionnement ont été recensés par l'ANSM, un record en France, contre seulement 44 en 2008.
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