Certaines mauvaises pratiques ont la vie dure. Cela semble être le cas de l’usage détourné d’Ozempic (sémaglutide), analogue du GLP-1 indiqué dans le traitement du diabète de type 2 insuffisamment contrôlé : le mésusage de ce médicament pourtant disponible uniquement sur ordonnance se poursuit en France, alerte l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) le 31 juillet.
Pour rappel, fin 2022, plusieurs voix avaient fait état d’une utilisation « sauvage » d’Ozempic à visée amaigrissante, chez des sujets non diabétiques, promue sur les réseaux sociaux. Si bien que l’ANSM et l’Assurance maladie avaient mis en place une « surveillance renforcée » de l’utilisation du médicament fondée sur le « suivi actif » à la fois des données de ventes et de remboursement du médicament, et à la fois des signalements d’usage non conforme et déclarations d’effets indésirables.
1,4 % des patients sous Ozempic détourneraient le médicament
Et en mars dernier, l’ANSM avait diffusé une première alerte. Car le « mésusage potentiel » d’Ozempic semblait concerner 1 % des patients – en fait non diabétiques – ayant bénéficié d’un remboursement de la spécialité, indiquait l’agence sur la base de données de remboursement. Si l’instance jugeait alors ce type de pratiques « limité » et soulignait une absence de signal de sécurité, elle insistait sur le possible impact de ce détournement sur la disponibilité d’Ozempic pour les individus diabétiques réellement éligibles au médicament.
Quelques mois plus tard, le détournement semble persister, voire même progresser. « La part de patients considérés comme en mésusage parmi ceux ayant perçu un remboursement d’Ozempic est passée de 0,7 % en mai 2022 et 1 % en septembre 2022 à 1,4 % fin mai 2023 », déplore l’ANSM face à de nouvelles données de l’Assurance maladie. Là encore, l’agence attire surtout l’attention sur les conséquences de ces mésusages en termes de disponibilité du médicament. « Nous rappelons que ce mésusage se fait au détriment des personnes diabétiques (de type 2), qui peuvent avoir des difficultés d'accès à leur traitement. »
Enquête européenne sur un risque d’idées suicidaires et d’automutilation
Et cette fois, l’Ozempic fait l’objet d’une enquête de sécurité. « L’Agence européenne des médicaments (EMA) a débuté l’évaluation du risque d’idées suicidaires et d’automutilation », rapporte l’ANSM. En fait, comme l’explique l’EMA sur son site internet, cette évaluation – qui concernait initialement uniquement les spécialités contenant du liraglutide ou du sémaglutide, puis qui a été étendue à l’ensemble de la classe thérapeutique des analogues du GLP-1 – a été lancée après que « l’agence des médicaments islandaise (a rapporté) de cas de pensées suicidaires et d’automutilations chez des personnes utilisant du liraglutide et du sémaglutide ». Sont notamment concernées les spécialités « Victoza (liraglutide), Saxenda (liraglutide), Xultophy (liraglutide/insuline dégludec), Ozempic (semaglutide), Byetta (exénatide), Trulicity (dulaglutide) », disponibles en France, énumère l’ANSM.
Au 11 juillet, l’EMA indiquait avoir identifié « environ 150 signalements de potentiels cas d’automutilation ou de pensée suicidaire » et prévoyait de rendre les conclusions de son enquête en novembre 2023.
Quoi qu’il en soit, en attendant, face à la persistance du détournement d’Ozempic, l’ANSM et l’Assurance maladie comptent réunir à la rentrée associations de patients et professionnels. Et ce, « afin de faire un (…) point d’étape et définir un plan d’actions concerté en fonction des dernières données disponibles ».
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