« Quand tu seras mort, tes patients, tu ne pourras plus les soigner ! », assène un jour le médecin traitant du Dr Maxim Challiot. De fait, patient bien avant de devenir médecin, le jeune praticien était confronté à des problèmes de santé : « Je n’ai pas une énergie illimitée. Et je ne pouvais plus assumer des journées de 15 heures sans me mettre en danger… sur la route, en rentrant », raconte ce dernier, aujourd’hui âgé de 32 ans et qui souffre, depuis ses 16 ans, de narcolepsie. De surcroît alors étudiant en deuxième année de médecine, le jeune homme a déclaré une grave maladie nécessitant un parcours en réanimation. « J'avais failli mourir, mais ce qui me préoccupait, c'était mes partiels ». En rééducation, il rencontre un spécialiste en médecine physique et réadaptation (MPR). « Il m'a porté une attention sincère. Et a saisi l’origine de mon stress et le frein à ma rééducation. J’avais trouvé incroyable qu'il ait pris ce temps d’écoute ! » . Un mentor à l’origine du choix de la spécialité de Maxim Challiot : « Je voulais devenir ce type médecin… Attentif ».
Je ne pouvais plus assumer des journées de 15 heures sans me mettre en danger… sur la route, en rentrant…
Dr Maxim Challiot
Désenchantement
À son tour MPR, le jeune praticien a exercé deux années à l'hôpital public en région Provence-Alpes-Côte-d'Azur et en clinique, auprès de patients amputés. « J’ai vite désenchanté », confie celui qui est passé de quatre à cinq visites à 25 en matinée ! Un rythme effréné qui le contraint à limiter les échanges médecin-patient, à la seule douleur de l’amputation. Or, souligne le praticien : « Cela ne peut suffire. Il faut aussi, prendre en compte le phénomène du traumatisme lié à la perte d’un membre et le deuil de la vie d'avant… ». Le jeune médecin décide alors de se rendre au chevet de ses patients le week-end via les astreintes. « Mais je me suis totalement épuisé à la tâche… », témoigne ce dernier. S’il a évité le burn-out, le praticien est rattrapé par le brown-out (perte de sens au travail).
Du milieu hospitalier au médico-social
Le jeune MPR prend alors la décision de quitter le milieu hospitalier. « J’ai réfléchi au domaine dans lequel je voulais mettre le plus d'énergie possible et où mon attention aux autres pouvait avoir le plus d'utilité. » Crève cœur mais nécessité. Changement de cap pour celui qui est spécialiste depuis deux ans ! Il décide de s’investir dans le secteur médico-social qui concerne les établissements dédiés au grand et moyen handicap. Certains gèrent la scolarité d’enfants polyhandicapés, d’autres prennent soin des adultes en manque d’autonomie (foyers, maisons d’accueil…). Le jeune praticien choisit de s’engager dans la réinsertion professionnelle des victimes d’accidents de vie (AVC, traumatisme crânien, burn-out…). Depuis deux ans, il prend en charge, à mi-temps, les traumatisés crâniens. Le médico-social est encore trop peu connu des professionnels de santé d’autant que « le problème, c'est le salaire… », reconnaît volontiers le Dr Maxim Challiot. « Mais je trouve que c'est un milieu très respectueux de l'humain, de la charge mentale, de la qualité de vie… », plaide-t-il cependant.
Prendre soin des soignants
Plus que jamais sensible à la détérioration de la santé des professionnels, le Dr Challiot a créé un groupe de soutien sur Facebook. Initialement destiné aux seuls médecins en souffrance – il compte aujourd’hui près de 1 000 confrères et s’est désormais élargi à tous les soignants. Fortement engagé dans la prévention, le jeune MPR œuvre aussi, au sein de l’Association SPS (Soin aux Professionnels de santé et aux étudiants) pour laquelle il est délégué régional en région PACA. L’organisme offre une aide psychologique permanente via une appli mobile : Asso SPS qui réoriente vers une prise en charge médico-psychologique et en toute confidentialité.
Impliqué dans ces problématiques, le Dr Challiot s’est également investi dans la direction d’une thèse portant sur la qualité de vie et la santé mentale des généralistes libéraux en 2024. « C'est catastrophique ! Les résultats recueillis auprès de 980 confrères, devraient être publiés en septembre. Plusieurs éléments ont été évalués : la santé mentale, l'alimentation, le sommeil, la consommation de médicaments… », détaille le médecin qui pointe la fréquence de la dépression, des troubles anxieux et des addictions et souligne que la situation est « significativement plus dégradée chez les généralistes que pour la population générale ». Et le travail effectué révèle qu’un praticien sur quatre n’a pas de médecin traitant. Une profession qui soigne les autres mais qui n’a pas le temps de prendre soin d’elle, un constat qui fait écho à sa propre expérience.
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