La variole du singe pourrait bel et bien se transmettre des êtres humains aux animaux domestiques. C’est ce que suggère une publication du Lancet datée du 10 août, dans laquelle des cliniciens français rapportent un cas d’infection à Monkeypox chez un chien dont les maîtres étaient contaminés.
Pour rappel, dès la mi-juin, les autorités sanitaires ont recommandé aux personnes atteintes de variole du singe de s’isoler non seulement de leur entourage mais aussi de leurs animaux de compagnie. Et ce, par crainte que le Monkeypox se transmette de l’être humain à d’autres espèces, et qu’un réservoir animal se constitue dans l’Hexagone – ce qui compliquerait l’élimination du virus à long terme.
Toutefois, jusqu’à maintenant, cette inquiétude apparaissait très théorique, faute de données de vie réelle sur la transmission du virus de l’être humain aux animaux de compagnie. Comme le soulignait en particulier l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) au début de l’été, « aucun cas clinique (n’a encore) été rapporté » chez le chat et le chien domestiques.
Un premier cas clinique suspect chez un petit lévrier italien
Mais un cas observé à Paris semble finalement confirmer la réceptivité (définie par l’Anses comme la « capacité d’une espèce animale à héberger le virus sans forcément développer de symptômes ») mais aussi la sensibilité (« capacité de l’espèce animale à exprimer des signes cliniques ou des lésions dues au virus ») du chien au Monkeypox. « Nous décrivons le premier cas d’infection confirmée Monkeypox chez un chien, infection qui pourrait avoir été acquise par transmission humaine », déclarent les auteurs de ce case report.
L’histoire commence le 10 juin, quand deux hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes (HSH) multipartenaires mais vivant ensemble se présentent à l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière (AP-HP) avec des symptômes évocateurs de la variole du singe : ulcération anale apparue 6 jours après un contact sexuel, suivie d’une éruption cutanée (sur le visage, les oreilles et les jambes pour un patient, et sur les jambes et le dos pour l’autre), d’asthénie, de céphalées et de fièvre. L’infection à Monkeypox a été confirmée par PCR, précisent les auteurs.
Peu après, leur chien développe également des troubles suspects. « 12 jours après le début de (leurs) symptômes, leur petit lévrier Italien, âgé de 4 ans et sans antécédent médical, présente des lésions cutanéomuqueuses, incluant des pustules abdominales et une légère ulcération anale », racontent les cliniciens. Suite à la réalisation de prélèvements et d’un test PCR, l’animal s’est finalement lui aussi révélé positif au Monkeypox.
L'hypothèse d'une transmission cohérente au plan cinétique, clinique et virologique
Dans ce contexte, les auteurs concluent à un cas de transmission interespèce. « La cinétique de l’apparition des symptômes chez les deux patients puis chez leur chien suggère une transmission du Monkeypox de l’être humain au chien », qui relèverait qui plus est « d’une vraie maladie canine, et non d’un simple portage du virus lié à un contact rapproché avec l’être humain ou à une transmission aéroportée », estiment-ils. Une conclusion entendue par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), la responsable technique pour la variole du singe de l’instance, Rosamund Lewis, ayant déclaré, selon l’AFP, qu’il s’agit bien du « premier cas rapporté de transmission de l’être humain à l’animal ».
À noter qu’aucune mutation du virus ne semble s’être produite au cours de cette transmission interespèce. « Les deux échantillons (issus d’un des patients humains, d’une part, et du chien, d’autre part N.D.L.R.) contenaient le virus (…) qui se propage dans les pays non endémiques depuis avril 2022 », avec « 100 % d'homologie de séquence sur les 19,5 paires de kilobases séquencées », détaillent les auteurs. « Il est néanmoins certain que dès que le virus se déplace dans un autre environnement touchant une autre population, il y a évidemment une possibilité qu'il se développe différemment et mute différemment », aurait rappelé Rosamund Lewis.
Le risque lié à l'infection des animaux de compagnie en question
L’experte juge cependant que cette menace concerne plus les animaux sauvages que les animaux domestiques. « Je ne pense pas que le virus évolue plus vite avec un seul chien qu’avec une seule personne », a-t-elle indiqué, selon l’AFP.
Quoi qu’il en soit, la vigilance est de mise. « Nos résultats devraient susciter un débat sur la nécessité d'isoler les animaux de compagnie des individus positifs au virus monkeypox », affirment les auteurs, qui appellent à réaliser des études « plus approfondies sur les transmissions secondaires via les animaux de compagnie ».
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