Alors que l’incidence de la gonorrhée est en augmentation dans de nombreux pays, avec de plus en plus de formes antibio-résistantes, la prévention de ces infections constitue un enjeu important.
S’il n’existe actuellement aucun vaccin spécifique, ceux contre le méningocoque pourraient conférer une certaine protection croisée, comme le suggèrent trois articles publiés le 12 avril dans le Lancet Infectious Diseases.
Une protection modérée mais non négligeable
Le premier correspond à une étude observationnelle menée à New York et Philadelphie entre 2016 et 2018. Les auteurs ont identifié, via les dossiers de santé, les cas d’infections à gonocoques et à chlamydiae confirmés en laboratoires recensés parmi les 16-23 ans. Ces données ont été croisées avec celles des dossiers de vaccination permettant de déterminer le statut vaccinal des personnes vis-à-vis du méningo B au moment de l’infection (totalement vaccinées avec deux doses de vaccin multicomposants 4CMenB type Bexsero par exemple ; partiellement vaccinées avec une seule dose ; pas du tout vaccinées).
Plus de 167 000 cas d’infections (18 099 gonorrhées, 124 876 chlamydia et 24 731 co-infections) ont été identifiés. Parmi les 110 000 personnes concernées, seulement 7 692 avaient bénéficié du vaccin 4CMenB, dont un peu moins de la moitié (3 596 - 47 %) avec un schéma complet. Ainsi, « la vaccination 4CMenB était associée à une réduction de la prévalence de la gonorrhée », indique les auteurs, avec une protection estimée de l’ordre de 40 % en cas de vaccination complète et de 26 % en cas de dose unique.
Pour le Dr Winston Abara (Centers for Disease Control and Prevention) qui a dirigé l’étude, « ces résultats suggèrent que les vaccins contre la méningite même s’ils ne sont que modérément efficaces pour protéger contre la gonorrhée pourraient avoir un impact majeur sur la prévention et le contrôle de la maladie. Des essais cliniques axés sur l'utilisation du 4CMenB contre la gonorrhée sont nécessaires pour mieux comprendre ses effets protecteurs et pourraient également offrir des informations importantes sur le développement d'un vaccin spécifiquement contre la gonorrhée ».
Un second travail s’est penché sur l’impact sur la gonorrhée du vaste programme australien de vaccination contre le méningo B (via le vaccin 4CMenB) mis en place fin 2018 et début 2019 auprès des nourrissons, des enfants, des adolescents et des jeunes adultes du pays. Les auteurs ont comparé le poids des infections à gonocoques avant et après l’introduction de la vaccination contre le méningo B. Chez les 15-17 ans, ils ont observé une diminution de l’incidence de la gonorrhée de 24 %, dans la seconde année suivant la mise en place du programme de vaccination et l’efficacité de la vaccination 4CMenB contre la gonorrhée a été estimée à 32,7 % pour un schéma à deux doses.
Pour les auteurs, « l’ampleur sans précédent du programme de vaccination 4CMenB d’Australie du Sud offre des preuves concrètes précieuses de l’efficacité du vaccin contre la méningite à méningocoque B chez les enfants et les adolescents, et la gonorrhée chez les adolescents et les jeunes ».
Une stratégie rentable pour les populations les plus à risque
Dans ce contexte, et en attendant un éventuel vaccin spécifique du gonocoque, « une question clé pour les décideurs est de savoir si le vaccin contre la méningite 4CMenB doit être utilisé contre la gonorrhée », estime le Pr Peter White (Imperial College London, Royaume-Uni) qui a mené une étude médicoéconomique afin de déterminer l’efficience d’une telle vaccination selon les populations ciblées. « Notre analyse suggère que l'administration du vaccin aux personnes les plus exposées au risque d'infection est le moyen le plus rentable d'éviter un grand nombre de cas », poursuit-il.
Sur la base de ces données, les auteurs recommandent de vacciner avec le 4CMenB les hommes ayant des relations sexuelles avec d'autres hommes (HSH) les plus à risque de gonorrhée, ce qui permettrait d'éviter Outre-Manche environ 110 000 cas et d'économiser 8 millions de livres sterling sur 10 ans.
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