Les populations en grande précarité sont fortement touchées par le Covid-19 en Ile-de-France. L’enquête « Précarité et séroprévalence de Covid-19 en Ile-de-France », menée par Médecins sans frontières (MSF), Epicentre et l’Institut Pasteur a permis d’estimer la proportion de personnes infectées dans ces populations et d’en évaluer les principaux facteurs associés. Elle a été menée entre le 23 juin et le 2 juillet, auprès de 818 personnes dans 14 lieux d’intervention de l’ONG MSF en région parisienne : deux sites de distribution alimentaire, deux foyers de travailleurs et dix centres d’hébergement d’urgence, situés à Paris, dans le Val d’Oise et en Seine-Saint-Denis.
L’étude a donc révélé que dans ces lieux, la proportion de personnes exposées au virus ayant développé des anticorps était très élevée, mais la séroprévalence varie fortement selon les sites enquêtés. Elle est ainsi de 18 et 35 % sur les deux sites de distribution alimentaire mais de 82 % et 94 % dans les deux foyers de travailleurs, dans les centres d’hébergements d’urgence elle va de 23 à 62 %. Parmi les 543 personnes ayant participé à l’enquête dans les centres d’hébergement, une personne sur deux était séropositive au SARS-COV-2. Des chiffres sans commune mesure avec ceux en population générale. Selon Santé publique France, le taux de positivité en fin de semaine dernière était à 8 % et autour de 12 % sur Paris. « En Europe et en France, aucune autre étude ne montre ce type de prévalence. Ces chiffres-là, ces proportions-là, on ne les retrouve qu'en Inde, dans les bidonvilles du Brésil... et encore, on est plutôt à 40 ou 50 % », s'étonne Thomas Roederer, épidémiologiste chez Epicentre et responsable de l’étude.
Des dispositifs d'urgence générateurs de clusters
Pour ces populations, les conditions d’hébergement en particulier ont pu être la cause de la naissance de clusters importants. « Les résultats confirment que la circulation du virus a été plus particulièrement active dans les situations où la promiscuité était la plus forte, c’est-à-dire quand la personne doit partager chambre, douches et cuisine avec plusieurs autres personnes » souligne Thomas Roederer, dans un communiqué. Dans les foyers de travailleurs, par exemple, un tiers des résidents partagent une chambre avec 2 à 5 personnes, et 21 % avec plus de 5 personnes, tandis que dans les centres d'hébergement ou les hôtels, plus de la moitié (59 %) partagent la leur. Dans ces conditions, c’est donc sur le lieu d’hébergement que le respect des gestes barrières était le plus compliqué, voire impossible. Pendant le confinement, la Direction générale de la cohésion sociale (DGCS) avait élaboré une circulaire précisant des recommandations pour la prise en charge du Covid pour les personnes précaires. Il était notamment préconisé, pour les gestionnaires de structures d'hébergement, de prévoir un lieu d'isolement pour les patients suspectés de Covid ou encore de réserver un sanitaire au patient malade. Mais dans des situations de suroccupation de certains foyers, ces directives semblaient difficiles à appliquer.
Le logement dans des gymnases est aussi problématique
Et les dispositifs d’urgence mis en place pendant la crise, le logement dans les gymnases notamment, ont paradoxalement été aussi une source du problème. D’après l’enquête, la séroprévalence parmi les personnes ayant transité par des gymnases est 3 fois plus élevée que celle estimée chez les personnes ayant été relogées directement en centres d’hébergement.
À l’approche de la période hivernale et avec une reprise de l’épidémie, MSF craint donc que les mêmes erreurs soient répétées. Alors que l’ONG doit être reçue ce mercredi au ministère de la Santé, elle veut alerter sur la nécessité de changer de façon de faire sur ce sujet. « Il ne faut pas que les dispositifs d’urgence qui permettent de mettre à l’abri temporairement des personnes sans hébergement, notamment à l’approche de la période hivernale, contribuent à créer de nouveaux foyers de contamination », alerte Corinne Torre, cheffe de mission en France pour MSF. « Les lieux collectifs comme des gymnases sont donc à éviter au maximum au profit des placements en hôtels et des hébergements avec des espaces de vie individuels qui permettent l’application effective des mesures de prévention », recommande-t-elle.
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