Après la Puff – cigarette électronique jetable –, un nouveau type de produit séduit les jeunes : le snus. Et depuis le début de l’année, certains professionnels de santé et acteurs de la lutte contre le tabagisme s’inquiètent de cet engouement pour ce dérivé suédois du tabac à chiquer, utilisable par voie orale, sans fumée (smokeless). Ainsi, le Syndicat des femmes chirurgiens-dentistes (SFCD) tire la sonnette d’alarme dans un communiqué publié le 11 janvier. « Il est urgent de réagir », estime l’instance.
Une mode née sur les réseaux sociaux
C’est aux réseaux sociaux que le snus doit son récent succès auprès des jeunes adultes européens et français – « voire (des) adolescents », s’alarme le SFCD. Selon le syndicat, « le snus a été récemment popularisé en cette fin d’année 2022 sur (…) Tiktok, Snapchat et Instagram, notamment par des personnalités du sport de haut niveau comme Zlatan Ibrahimovitch, Karim Benzema ou Marcus Thuram ».
Outre l’effet de mode internet, l’engouement du snus chez les jeunes tient aussi à ses modalités de consommation, sans fumée – et avec de multiples arômes disponibles. « Les codes culturels et sociaux incitent les jeunes adultes et adolescents à faire différemment des plus âgés : la cigarette est ainsi « ringardisée », et l’effet « smokless » est recherché pour sa discrétion », analyse le SFCD.
En effet, ces produits se présentent en pratique comme « de petits sachets en mousseline de coton à l’instar des sachets de thé », destinés à être « disposé entre la gencive et la lèvre supérieure, directement au contact des muqueuses (…) quelques minutes ou plusieurs heures », décrit le SFCD. Certains de ces produits, qui relèvent du « snus » à proprement parler, contiennent « un mélange de tabac, d’eau, de sel, de carbonate de calcium et éventuellement d’arôme ». Dans d’autres produits, qualifiés de « lyftsnus » ou « snuf », ou encore « snus sans tabac », le tabac se voit remplacé par de la poudre de nicotine.
Des produits hautement addictifs
L'un comme l'autre apparaissent particulièrement addictifs, en lien d'abord avec leur administration par voie buccale. Comme l’explique le SFCD, « la diffusion topique de la nicotine via les capillaires sanguins entraîne une libération d’endorphines plus intense et prolongée qu’une cigarette classique », avec par ailleurs des effets marqués sur la concentration.
D’autant que le snus comme le lyftsnus se révèlent particulièrement dosés en nicotine. « Un sachet peut contenir de 3 à 20 mg de nicotine », contre 1 à 2 mg dans une cigarette classique, pointe le syndicat. Une boîte de 20 sachets peut ainsi « contenir l’équivalent en nicotine de 60 cigarettes », calculent les chirurgiens-dentistes.
Surrisque de cancer buccal, de l’œsophage et du pancréas
Au-delà de ce potentiel addictogène, le SFCD pointe un surrisque de cancer associé au snus. Des investigations conduites en Asie du Sud-Est, en Méditerranée orientale ou en Europe auraient montré une corrélation entre consommation de tabac sans fumée et risque accru de cancers buccaux, de l’œsophage ou du pancréas. De plus, « en Suisse une étude menée conjointement en 2016 par l’université de médecine dentaire et par la clinique de parodontologie de Berne, met en évidence une corrélation directe entre la consommation de Snus et l’installation de lésions orales type leucoplasies et lésions parodontales type récessions gingivales », ajoutent les chirurgiens-dentistes.
Et le snus sans tabac pourrait lui-aussi s’avérer cancérigène, selon le Comité national contre le tabagisme (CNCT), qui a lui aussi alerté ce mois de janvier sur la diffusion du snus et du lyftsnus. « Si les sachets de nicotine, qui ne contiennent pas de tabac, semblent être une alternative moins risquée que la consommation de produits du tabac dont le snus, une récente étude allemande indépendante a relevé la présence de nitrosamines spécifiques du tabac, dont certaines sont cancérigènes (NNN, NNK) dans une grande partie des sachets de nicotine testés », rapporte l’instance.
Flou juridique
À noter qu’aux yeux du CNCT, l’arrivée du lyftsnus relève d’une stratégie industrielle qui vise à « infléchir les réglementations autour des produits du tabac ». Car comme le souligne l’instance, « alors que le fabricant de snus Swedish Match vient d’être racheté par Philip Morris International », la vente de snus reste à l’heure actuelle interdite en France comme dans le reste de l’Union européenne – à l’exception de la Suède. Et ce, depuis 1992. D’ailleurs, le snus reste à l’heure actuelle seulement « marginalement disponible sur Internet », ainsi ses nouveaux adeptes se tournent-ils davantage vers le lyftsnus.
Or ce dernier bénéficie, lui, d’un « flou juridique », pointe le CNCT. Car en France et dans l’UE, le lyftsnus, en tant que produit sans tabac, n’est pas clairement considéré comme appartenant à la catégorie des « produits du tabac et produits connexes ». De ce fait, il n’est pas soumis aux obligations de déclaration qui incombent aux cigarettiers. D’où son apparition « dans des débits de tabac sous la qualification trompeuse de « snus ou snuf » au dernier trimestre de l’année 2022 », notamment sous les marques Aroma King, dénonce le CNCT.
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