Le gouvernement et les élus doivent « renoncer à tout projet portant atteinte à l’Aide médicale d’État (AME) ou venant restreindre son périmètre », exigent 3 000 soignants dans une tribune publiée ce lundi dans Le Monde. Ceux-ci exigent « le maintien de l’AME pour la prise en charge des soins des personnes étrangères », alors que la suppression de ce dispositif sera sans nul doute au cœur des débats sur la loi immigration, en lecture au Sénat à partir du 6 novembre.
Parmi les premiers signataires, on retrouve notamment la Pr Françoise Barré-Sinoussi, virologue et Prix Nobel de médecine en 2008, le Pr Jean-François Delfraissy, professeur d’immunologie et président du Comité consultatif national d’éthique, la Dr Agnès Giannotti, présidente du syndicat MG-France et la Dr Florence Rigal, présidente de Médecins du monde France.
Les signataires de la tribune expliquent que les bénéficiaires de l’AME (qui résident en France depuis plus de trois mois sans titre de séjour) ne sont pas, dans leur grande majorité, des personnes qui ont migré vers la France pour se faire soigner, mais « des personnes qui ont fui la misère, l’insécurité ou qui l’ont fait pour des raisons familiales ». « Prioritaire » en matière de santé publique, cette population est, selon eux, exposée à des risques importants : « problèmes de santé physique et psychique, maladies chroniques, maladies transmissibles ou contagieuses, suivi prénatal insuffisant et risque accru de décès maternels ».
Dégradation de l'état de santé
Limiter leur accès aux soins entraînerait donc une dégradation de leur état de santé, mais aussi, plus globalement, « celui de la population tout entière », poursuivent les signataires qui donnent l’exemple de l’Espagne. Dans ce pays, la restriction de l’accès aux soins des étrangers en situation irrégulière, votée en 2012, a provoqué « une augmentation de l’incidence des maladies infectieuses ainsi qu’une surmortalité », raison pour laquelle cette réforme a été abrogée en 2018.
Une remise en cause de l’AME pourrait également entraîner une « paralysie » de notre système de santé, car les personnes étrangères sans papiers « n’auraient d’autre choix que de consulter dans les permanences d’accès aux soins de santé (Pass) et les services d’accueil et d’urgences, déjà fragilisés et en tension », estiment les auteurs de la tribune. Or, l’éloignement du système de santé aboutit in fine à « des retards de diagnostic, au déséquilibre et à l’aggravation des maladies chroniques, ainsi qu’à la survenue de complications », poursuivent les soignants.
Ce scénario sombre aurait des coûts « bien plus élevés pour la collectivité », car ces patients seraient pris en charge en urgence « avec des hospitalisations complexes et prolongées, parfois en réanimation, dans des structures déjà fragilisées », mettent en gardent les signataires de la tribune, qui refusent de « faire une sélection parmi les malades entre ceux qui pourront être soignés et ceux laissés à leur propre sort ».
Selon un rapport de l’Assemblée nationale, l'AME a bénéficié à 400 000 personnes en 2023 pour un coût de 1,2 milliard d’euros.
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