En matière de système de santé, dire que le Danemark est un modèle pour le gouvernement français relève presque de l'euphémisme.
« La France est le pays qui nous rend le plus visite au monde », a souri lors d'une matinée organisée à Paris par l'ambassade danoise Anne Smetana, directrice adjointe d’Healthcare Denmark, organisation qui regroupe plusieurs promoteurs de l'excellence du royaume (gouvernement, industriels du médicament et du numérique, etc.).
Comme le gouvernement français tente de le faire avec son plan Ma santé 2022, la monarchie scandinave de 5,8 millions d'habitants a mené une grande réforme de son système de santé en 2007 en partant des mêmes constats : politique sanitaire trop centralisée, hôpitaux vieillissants, attente interminable aux urgences, population vieillissante et souffrant de plus en plus de pathologies chroniques. La gouvernance du système de santé est ainsi passée à la main des régions, et surtout d'une centaine de territoires d'environ 50 000 habitants. Un programme de reconstruction hospitalière et de répartition des spécialités médicales et chirurgicales a été engagé. Concentrés de soins ultra-spécialisés et des urgences vitales, 16 établissements de pointe ont été déployés dans les territoires.
Cette mesure fait écho à la gradation des soins voulue par le projet de loi de santé français, que le Parlement devrait définitivement adopter d'ici fin juillet. On y retrouve le principe d'hôpitaux de proximité au premier niveau (sans plateaux de chirurgie), de soins spécialisés au niveau intermédiaire et ultra-spécialisés à un dernier échelon (CHU, centres de lutte contre le cancer).
En ville, les soins primaires et le rôle des médecins traitants ont également été renforcés au Danemark. Les 3 500 généralistes y ont un rôle pivot (avec une file active moyenne de 1 600 patients) et sont les garants de l'accès à un médecin spécialiste. Ils gèrent aussi les « urgences » non vitales. « Un patient danois n'ira pas aux urgences pour une grippe, il contacte son médecin généraliste », explique Anne Smetana.
Là encore, l'inspiration scandinave infuse dans l'Hexagone avec la création des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), chargées notamment de l'organisation du parcours des patients et de la prise en charge des soins non programmés. « Il faut mettre en place des organisations innovantes grâce à la coordination. En France, nous sommes autour de 800 ou 900 patients en moyenne par médecin, en déléguant des tâches à une infirmière ou à un assistant médical, on peut aller bien au-delà », plaide le Dr Thomas Mesnier (LREM, Charente), député (LREM, Charente) et rapporteur général du projet de loi de santé.
Virage numérique
Le Danemark est aussi passé par une phase de digitalisation intense de la santé, à l'instar de ce prévoit le gouvernement (création d'un espace numérique de santé, e-prescription, déploiement du Health data hub). Tous les patients possèdent l'équivalent d'un dossier médical partagé (DMP) – relancé en France en novembre 2018 – et peuvent consulter leurs informations de santé des trente dernières années. Depuis 2009, une base de données recense toutes les prescriptions du royaume.
Les médecins de ville danois se sont fortement impliqués dans ce virage numérique. « Nous suivons en ligne nos patients diabétiques. Cela permet par exemple de les alerter quand ils ne sont pas venus consulter depuis longtemps ou d'une anomalie dans leur taux de glycémie. Ils peuvent aussi nous contacter en cas de problème, par mail sécurisé », explique le Dr Palle Mark Christensen, généraliste dans une maison de santé près d'Odense, au sud du pays.
Rémunéré pour le temps passé à répondre aux mails ou au téléphone (trois euros par contact), le généraliste perçoit également un forfait pour le suivi des patients diabétiques (400 euros par an). Le reste de son salaire est composé d'une base fixe et d'une partie à l'activité. En France, la création d'un forfait pour le suivi des pathologies chroniques est fortement envisagée.
Ces efforts ont payé au Danemark : l'espérance de vie générale s'est améliorée (78,4 ans en 2007 et 80,9 en 2016) et la prise en charge des patients a largement gagné en fluidité. Le tout avec une part de PIB consacrée à la santé (10,4 %) inférieure d'un point aux efforts français.
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