Éventuels troubles psychiques, risque de rupture médicamenteuse, vaccination, dépistage de maladies infectieuses… Dans une mise à jour de son avis de 2015 sur la visite médicale des étrangers primo-arrivants en France, le Haut conseil de la santé publique (HCSP) définit les priorités pour l’accueil médical des réfugiés ukrainiens.
Des risques spécifiques
Au 15 mars, « la France (avait) déjà accueilli plus de 15 000 personnes migrantes en provenance d’Ukraine », indique le HCSP et ce chiffre est probablement loin d'être définitif.
Or, en matière de santé publique, ces sujets venus d’Ukraine « peuvent être soumis à des risques spécifiques, en raison de l'incidence accrue de diverses maladies infectieuses dans leur pays d'origine, des conditions de vie perturbées avant et pendant leur déplacement et d’éventuelles séquelles de traumatismes », souligne le HCSP. Ainsi, un statut de protection temporaire permettant la prise en charge immédiate des frais de santé des réfugiés a été mis en place mi-mars.
En parallèle, le HCSP s’est attelé à préciser et à prioriser les besoins de santé de ces nouveaux arrivants.
Soins d'urgences
L’avis du HCSP identifie une première étape concernant les « soins d’urgence », à prescrire voire administrer dès le « premier accueil (immédiat) ».
Une prise en charge précoce d’abord centrée sur les conséquences directes des violences subies, qu'elles soient physiques ou psychiques. « Une large partie de la population ayant été témoin des combats ou ayant subi les bombardements et étant l’objet de déracinement ou de séparation familiale, le risque de traumatisme psychologique et ses conséquences en termes de santé mentale (syndrome anxieux, syndrome de stress post-traumatique et troubles de l’humeur) risquent d’être au premier plan des besoins en soins de la population accueillie », prévoit le HCSP.
Mais les conditions de vie – dégradées par la guerre et le déplacement – endurées par nombre de réfugiés sont aussi à l’origine d'autres problématiques à résoudre au plus vite. À commencer par une exposition accrue aux maladies infectieuses. En effet, pour le HCSP, « toux, fièvre et/ou diarrhée en particulier » doivent être recherchés, évalués et le cas échéant pris en charge immédiatement.
L’instance attire également l’attention sur le défaut d’accès aux soins en Ukraine et au cours de la migration, et en particulier sur les « risques de rupture médicamenteuse (diabète, anticoagulant, contraception, …) ou de perte de dispositifs médicaux (lunettes, appareils auditifs…) » – à évaluer et represcrire au plus vite. Dans le même esprit, le HCSP pointe la nécessité « d’assurer (sans tarder) l’accès aux couches et au lait maternisé pour les nourrissons ».
Organiser la prise en charge des femmes enceintes et des nourrissons
Ce « premier accueil » constitue aussi l’occasion d’organiser « le suivi de grossesse des femmes enceintes » ainsi que « la prise en charge immédiate en centre de protection maternelle et infantile (PMI) (des nourrissons) ».
Et ce, « avec un focus particulier sur la prévention tuberculose (BCG) ». Car selon le rapport annuel 2021 de surveillance et de suivi de la tuberculose en Europe, basé sur les données de 2019, l'Ukraine a déclaré le deuxième plus grand nombre de cas de tuberculose (28 539).
Dépistage des maladies infectieuses
D’ailleurs, le HCSP conseille dans un deuxième temps - au cours d’un « rendez-vous santé » proposé idéalement dans les 4 mois suivant l’arrivée - de mettre en place des mesures plus poussées de lutte contre les maladies infectieuses.
Car au-delà de la tuberculose, l’Ukraine fait face à une circulation intense de plusieurs pathogène, du VIH (« en 2020, le taux de diagnostic du VIH pour l'Ukraine était le deuxième plus élevé de la région européenne », rapporte le HCSP) à la grippe saisonnière en passant par le SARS-CoV-2 (« l’Ukraine faisait face à sa quatrième vague de Covid-19 due au variant Omicron en février 2022 »). Ainsi le HCSP préconise-t-il « d’assurer un dépistage des symptômes pouvant faire évoquer le Covid-19, la grippe et réaliser une radio pulmonaire précoce pour le dépistage de la tuberculose maladie ».
Rattrapage vaccinal
De plus, l’Ukraine déplore de faibles taux de vaccination pour nombre de pathologies infectieuses pourtant inscrites au calendrier vaccinal national, à l’instar de la diphtérie, du tétanos et de la poliomyélite. « Cette situation a conduit à la survenue récente, depuis septembre 2021, de plusieurs cas de poliomyélite liés à la circulation d’un virus Sabin-like de type 2 », souligne le HCSP. De même, une couverture vaccinale contre la rougeole insuffisante a causé, en Ukraine, « une épidémie très importante en 2017-2019 avec plus de 50 000 cas notifiés en 2018 ».
Aussi le HCSP recommande-t-il d’« effectuer un rattrapage vaccinal contre () les principales maladies transmissibles, particulièrement la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite et la rougeole (ROR) ». Et ce, en se reportant aux recommandations HAS/SPILF en cas de statut inconnu ou incomplètement connu, et en donnant la priorité aux enfants du fait de leur scolarisation. Un rattrapage qui ne doit toutefois « pas constituer un préalable à l’admission à l’école », souligne le HCSP.
À noter qu’en matière de vaccin, l’instance préconise aussi de ne pas oublier le vaccin anti-Covid-19 du fait de la faible adhésion à la campagne vaccinale en Ukraine (35.6 % de primo-vaccinés).
En outre, nombre d'Ukrainiens ayant quitté leur pays avec leur animal de compagnie, le HCSP rappelle « l’importance de la vaccination antirabique de ces animaux, dont la couverture est faible en Ukraine ».
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