L’Association Française pour l’Étude du Foie (AFEF) vient de publier de nouvelles recommandations sur la prise en charge de l'hépatite C. Elles sont majeures, avec presque une dimension « historique » concernant cette maladie et la santé publique. En effet, l'objectif de ces recommandations est l’élimination en France de l’infection par le virus de l’hépatite C (VHC) avant 2025. Cet objectif n’a cependant rien de présomptueux puisqu’il correspond à celui visé par l’OMS, avec une deadline fixée à 2030.
Les recommandations de l’AFEF avec le soutien de la Société de Pathologie Infectieuse de Langue Française (SPILF), s’appuient sur deux grandes mesures : le dépistage universel pour tous les adultes au moins une fois dans leur vie, et le traitement universel. L’AFEF interpelle de nombreux acteurs de notre système de santé, comme l’Assurance maladie, mais aussi les soignants. Elle incite en particulier les pouvoirs publics à laisser la main aux médecins généralistes pour occuper une place active dans la prescription des antiviraux. Ainsi, une majorité de patients pourraient être pris en charge par un traitement universel, dans le cadre d’un parcours de soin simplifié.
Les généralistes pourraient prescrire des antiviraux pangénotypiques
Le développement des médicaments pangénotypiques a véritablement révolutionné la prise en charge de la maladie, avec des stratégies et des résultats très efficaces sur des durées de 8 à 12 semaines, sans effets indésirables majeurs. Actuellement, ces médicaments ne peuvent être prescrits que par des spécialistes en hépato-gastroentérologie, en médecine interne ou en infectiologie. « Or, aujourd’hui, il n’y a pas d’arguments scientifiques pour empêcher les généralistes de prescrire pour les cas des patients les plus simples, ces médicaments pangénotypiques, comme cela se fait dans certains autres pays », explique le Pr Victor de Lédinghen hépatologue au CHU de Bordeaux et membre du Comité scientifique de ces recommandations de l’AFEF. « Dans leur pratique quotidienne, les généralistes prescrivent des traitements qui sont bien plus à risque que ces antiviraux. Les recommandations de l’AFEF, encadrent de façon précise les conditions pour les prescrire. »
Bilan préalable
Ces conditions de prescription nécessitent d’effectuer un bilan préalable. L’évaluation des comorbidités est indispensable : consommation d’alcool, surpoids, syndrome métabolique, diabète, co-infection VHB et/ou VIH, insuffisance rénale sévère, antécédent de traitement antiviral. À cela s’ajoute un bilan biologique : NFS, plaquettes, fonctions hépatique et rénale. La recherche du génotype du VHC n’est pas nécessaire en raison de la prescription de traitements pangénotypiques. La sévérité de l’atteinte hépatique doit être évaluée. Celle-ci peut être écartée en cas de Fibroscan® < 10 kPa ; ou par des tests sanguins : si Fibrotest® ≤ 0,58 ou Fibromètre® ≤ 0,786.
Enfin, avant de prescrire un traitement antiviral, le médecin doit vérifier quels sont les autres médicaments pris, interroger le patient sur une éventuelle auto-médication ou prise de naturothérapie. Et connaître sa consommation de millepertuis, de pamplemousses, et d’oranges sanguines.
Deux médicaments possibles
Une fois ces prérequis établis, deux types de traitements peuvent être envisagés : Epclusa® (sofosbuvir + velpatasvir) durant 12 semaines ; ou Maviret® (glecaprevir + pibrentasvir) durant 8 semaines. À noter que le premier médicament arrive en officine d’ici quelques jours, le deuxième est déjà en pharmacie.
Le résultat du traitement antiviral doit être évalué 12 semaines après la fin de la prise des médicaments en analysant la charge virale. Si celle-ci est indétectable, le patient est considéré comme guéri. Par la suite aucun suivi particulier n’est nécessaire, sauf : 1. en cas de comportements à risque (usagers de drogues, comportements sexuels à risque…), une recontamination doit être régulièrement recherchée (analyse de la charge virale VHC) ; 2. chez les patients avec une co-morbidité hépatique (consommation d’alcool, syndrome métabolique).
Pour les patients aux profils plus complexes, en raison de comorbidités hépatiques ou métaboliques mal contrôlées, rénales sévères, d’une co-infection à VHB et/ou VIH, ou d’une atteinte jugée sévère du foie selon les tests évaluant la fibrose hépatique, il est recommandé au médecin généraliste de passer la main, par une prise en charge spécialisée.
Dimension historique
Pour conclure ses recommandations, l’AFEF souligne la dimension historique que représente l’élimination de cette infection par le virus de l’hépatite C. Et cet objectif va d’ailleurs bien au-delà du rôle des généralistes : « Tous les acteurs impliqués dans la prise en charge de cette infection doivent s’associer pour permettre à la France d’être le premier pays Européen à pouvoir annoncer l’élimination virale sur son territoire. Ce défi unique dans l’histoire récente de la médecine est à la potée de notre pays grâce à tous : autorités sanitaires, personnels soignants, et associations de patients. »
LE DÉPISTAGE UNIVERSEL
e n’est pas la première fois que les hépatologues réclament à cor et à cri un dépistage généralisé pour l’hépatite C. Dans l’objectif d’éliminer d’ici 7 ans cette infection, les spécialistes préconisent une nouvelle fois le dépistage universel, à effectuer au moins une fois dans la vie de chaque adulte. L’argument est qu’en France, encore 75 000 personnes ignoreraient être porteuses du VHC. Pour identifier rapidement ces sujets, les hépatologues préconisent le remboursement à 100 % de la sérologie virale par prélèvement sanguin et du test rapide d’orientation diagnostique (TROD). En cas de positivité de l’un de ces examens, une charge virale devrait être prescrite. L’AFEF recommande que ce dépistage du VHC soit associé à ceux du VHB et du VIH.
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