Alors que le projet de loi relatif à la bioéthique arrive ce 24 septembre dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, l'Académie nationale de médecine (ANM) rend publiques ses réserves, qui portent essentiellement sur les articles relatifs à l'assistance médicale à la procréation (AMP). Ce rapport, porté par l'ancien ministre de la Santé Jean-François Mattéi, a été adopté le 18 septembre par 69 voix pour, 11 contre et 5 abstentions.
Si elle ne se prononce pas directement sur l'extension de l'AMP aux couples de femmes et aux femmes seules, « qui relève d'une loi sociétale », l'Académie se positionne comme la défenseur des enfants, et met en garde contre d'éventuels « risques » que la « conception délibérée d'un enfant privé de père », « une rupture anthropologique », ferait courir sur leur développement psychologique.
Jugeant les données existantes peu convaincantes, et interprétant l'aspiration aux origines des enfants issus du don comme le signe d'une souffrance psychique, l'Académie demande de nouvelles études en milieu pédopsychiatriques sur les enfants « privés de père ».
L'Académie fait aussi valoir que la figure du père « reste fondatrice pour la personnalité de l'enfant » et que les questions de « l'altérité et de la différence homme-femme » ne peuvent être méconnues. Ce qui va à l'encontre de l'extension de l'AMP aux femmes seules, argue-t-elle.
Peur d'un déficit de sperme
Si elle se déclare « favorable à une évolution maîtrisée vers l'accès aux origines » pour les enfants issus du don, l'Académie craint néanmoins que la levée possible de l'anonymat du don de gamètes ne décourage le don. Dans un contexte d'extension de l'AMP à toutes les femmes, cela conduirait à un déficit de sperme, qui entraînerait selon elle, une régression dans la prise en charge des couples hétérosexuels. « Les médecins ne comprennent pas qu'on puisse considérer de la même façon les indications médicales et les demandes sociales », lit-on. Et d'alerter sur « le réel danger » que représenterait une marchandisation des produits du corps humains — si pour pallier une pénurie, l'on recourait à des banques de gamètes étrangères (ce contre quoi s'oppose le gouvernement).
Risques de l'autoconservation ovocytaire pas suffisamment précisés
Sans totalement renier un précédent avis en faveur de l'ouverture de l'autoconservation ovocytaire à toutes, l'Académie considère que la loi n'informe pas suffisamment sur les risques médicaux de cette pratique, ainsi que sur les effets sociétaux (surmédicalisation des grossesses et recul de l'âge moyen de la première grossesse). Sur le plan des principes, elle regrette la fin des critères médicaux qui encadraient l'AMP ou l'autoconservation ovocytaire, estimant que la mission de la médecine « est de soigner », et non de répondre à des « demandes sociétales ».
L'Académie est par ailleurs en accord avec les autres dispositions de la loi, tout en réclamant davantage de discussion sur l'Intelligence artificielle, le don d'organes, l'infertilité, et la formation des étudiants en santé à l'éthique.
« Des arguments peut-être datés », selon Agnès Buzyn
« Considérer qu'il y a un lien direct entre défaut de construction de l'enfant et famille monoparentale est faux », a réagi la ministre de la Santé Agnès Buzyn, invitée du Grand Jury RTL-LCI-Le Figaro. « Aujourd'hui, nous avons un quart des familles françaises qui sont des familles monoparentales (...) Ne me dites pas qu'un quart des enfants français qui vivent et qui naissent dans ces familles ont des difficultés de construction », a-t-elle répliqué.
« Les études que nous avons à notre disposition sur les enfants qui sont élevés dans des familles monoparentales ne sont pas des études inquiétantes », a-t-elle poursuivi.
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