Le Conseil économique, social et environnemental (CESE) a adopté ce 10 avril un avis appelant à ouvrir un nouveau droit pour une personne malade : celui de demander au médecin « une médication expressément létale ».
Rédigé par une commission temporaire constituée pour répondre à cette autosaisine, dans laquelle on retrouve Étienne Caniard, ancien président de la Mutualité française, la Pr Sylvie Castaigne (hématologue), ou encore le psychiatre Michel Debout, l'avis, intitulé « Fin de vie : à l'heure des choix », fait d'abord le constat d'une insuffisante mise en œuvre des droits actuels : accès compliqué aux soins palliatifs, notamment à domicile, méconnaissance des dispositions visant à placer le malade au centre de décisions le concernant, et mise en œuvre de la sédation profonde et continue « entravée par des difficultés d'ordre tant médical que juridique et éthique ».
L'avis propose plusieurs mesures pour améliorer l'application de la réglementation en vigueur : lancer une campagne d’information sur les soins palliatifs, augmenter les moyens qui y seront alloués dans le plan 2019-2021 pour gonfler l'offre à l'hôpital de 20 à 40 %, les exclure de la tarification à l'activité (T2A) et mieux prendre en compte la rémunération du médecin coordonnateur, autoriser la prescription par la médecine de ville de médicaments nécessaires à la sédation profonde et continue et leur dispensation par les officines, ou encore préciser par décret la procédure collégiale afin de conforter la place des non-médecins et des associatifs…
Éviter des « mots qui crispent »
Dans un second volet, l'avis veut élargir le champ des possibles en « autorisant les derniers soins », c'est-à-dire donner la possibilité à une personne malade de demander au médecin, y compris à travers les directives anticipées ou sa personne de confiance, dans des conditions strictes, de recevoir une médication expressément létale. Des mots pesés pour éviter les termes d'euthanasie ou de suicide assisté : « Il y a des mots qui immédiatement crispent, qui bloquent, et qui sont les mots de suicide et d'euthanasie », s'est justifié le rapporteur du texte Pierre-Antoine Gailly, représentant au CESE du groupe des entreprises. « L'opinion, depuis 2001, est d'avis que le pays devrait autoriser des formes de mourir plus volontaristes que les dernières lois », analyse-t-il.
« Un tel amendement, qui réaliserait une dépénalisation conditionnelle de l’aide à mourir, devrait préciser la définition de ce soin ainsi que les modalités de l’acte, selon que celui-ci est réalisé par le médecin (et donc assimilable à une euthanasie) ou par la personne elle-même (et donc assimilable à un suicide assisté). Cela induit une révision des règles éthiques définies par l’Ordre des médecins pour éviter qu’un acte « dépénalisé » puisse faire l’objet de sanctions professionnelles », lit-on dans le corps de l'avis.
En parallèle, la loi doit inclure une clause de liberté de conscience, permettant à toute personne, quelle que soit sa profession, de refuser la prescription, la dispensation, ou l'administration de cette médication expressément létale.
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