Alors que les pharmaciens négocient leur nouvelle convention avec l’Assurance-maladie, le texte en voie de finalisation prévoit « d’être très ambitieux sur la prévention », s'est réjoui Philippe Besset, président de la Fédération des syndicats pharmaceutiques de France (FSPF), jeudi 17 février. Cette convention, dont la signature est prévue dans les prochaines semaines, promet de « faire du pharmacien un acteur de la prévention », selon Philippe Besset, notamment en lui octroyant deux dépistages conventionnés.
Ainsi, dès mai 2022, l’officine pourrait remettre des kits de dépistage du cancer colorectal aux patients éligibles, puis les orienter vers leur médecin traitant une fois l’examen réalisé. « Nous attendons cela depuis longtemps ! », s’enthousiasme le pharmacien de Limoux dans l’Aude. Second dépistage à l’officine : la réalisation de bandelettes urinaires, en cas de suspicion de cystite. Le pharmacien effectuera une grille de test avec le patient puis l’orientera vers son généraliste. Mais sur ce point, les représentants des officinaux sont déçus, à ce stade, de ce nouvel acte, qu’ils auraient espéré coupler avec la délivrance d’antibiotiques urinaires. Une dispensation protocolisée portée par le Dr Thomas Mesnier en 2019 « mais qui n’est pour l’heure pas réellement possible », souffle Philippe Besset.
Pour dépister les cancers colorectaux et les cystites, les pharmaciens seraient rémunérés à hauteur de 5 euros l'acte (sans prendre en compte le coût du matériel qui est remboursé par ailleurs).
Vaccins : « rémunération alignée sur celle des médecins »
Aux actes de dépistage viennent s’ajouter deux nouvelles missions pour le pharmacien, à commencer par la vaccination élargie.
Après le feu vert de la Haute Autorité de santé fin janvier, le pharmacien sera bientôt autorisé à prescrire et injecter tous les vaccins de l’adulte hormis les vaccins à virus vivants atténués. L’Assurance-maladie lui propose une rémunération de 7,50 euros – si le patient est adressé par un courrier de l’organisme, comme c'est le cas pour la grippe – et de 9,60 euros si la prescription est directement réalisée par l’officine. « Nous souhaitions une rémunération alignée sur celle des médecins, c’est chose faite », se félicite le président de la FSPF. « Je souhaite dire aux médecins que désormais nous pourront nous battre ensemble pour une revalorisation de l’acte vaccinal », glisse-t-il.
La nouvelle mouture de la convention pharmaceutique prévoit également de verser cinq euros aux pharmaciens qui réaliseraient des entretiens courts pour prévenir les risques tératogènes chez la femme enceinte. « Cinq minutes environ » au comptoir, pour passer en revue les médicaments pris par ces femmes — traitement de fond et automédication – sur la base d’un support fourni par l’Agence du médicament.
Renouvellement des ordonnances
L’année 2022 marquera également la mise en application concrète du « pharmacien correspondant ». En pratique, un patient pourra désigner directement auprès de l'Assurance-maladie son pharmacien correspondant via un formulaire Cerfa, similaire à celui du médecin traitant. Le pharmacien sera en mesure – après accord du généraliste – de renouveler périodiquement un traitement chronique ou d’adapter les posologies, pour une durée maximum de 12 mois.
« Nous ne sommes toutefois pas satisfaits de la réglementation actuelle », nuance Philippe Besset. Il craint que cette nouvelle casquette du pharmacien soit limitée par le fait qu’il doive exercer en zones sous-denses et dans la même structure coordonnée que le médecin traitant, « or justement il n’y a pas de médecins dans ces zones-là ».
Baisse d'honoraires ?
Début mars, la FSPF sera en passe de signer la nouvelle convention pharmaceutique avec Thomas Fatôme, directeur général de la Cnam, à la seule condition « qu’un point particulier de blocage soit levé », détaille Philippe Besset. Le syndicat n’accepte pas l’une des propositions de l’Assurance-maladie de baisser les honoraires de délivrance des conditionnements trimestriels de 2,70 euros à 2,50 euros. « Nous n’avons jamais accepté une baisse de rémunération, c’est comme si Thomas Fatôme proposait aux syndicats de médecins de baisser le C de 25 à 24 euros », s’insurge le pharmacien. Cette décote représenterait une économie de 30 millions pour la Sécu.
Les pharmaciens ont enfin obtenu de la Cnam un bonus d’un euro pour réaliser des dispensations à l’unité d’antibiotiques, démarche rendue en partie possible il y a deux semaines pour lutter contre l'antibiorésistance.
Un second volet de la convention pharmaceutique – axé sur la rémunération – sera signé en 2023. Il devrait faire la part belle à la prévention cardiovasculaire, diabétique et au sevrage tabagique.
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