Le projet Iatroprev de prévention de la iatrogénie médicamenteuse concerne aujourd'hui 164 médecins généralistes, 133 pharmaciens d'officine et 188 patients. Originalité, il a été initié par des médecins et pharmaciens hospitaliers des CHU d'Amiens et de Lille, en collaboration étroite avec les URPS médecins libéraux et des pharmaciens des Hauts-de-France.
Ce programme consiste à réévaluer l'ordonnance des patients de plus de 75 ans quand elle contient plus de 10 médicaments différents. Ces patients sont identifiés lors d'une hospitalisation dans le service de gériatrie de l'un ou l'autre CHU. Les coordinateurs du programme leur proposent d'être inclus dans ce dispositif de suivi puis, s'ils acceptent, convient leur médecin traitant et le pharmacien habituel à un échange de concertation interprofessionnelle. Ensemble, hospitaliers et libéraux réévaluent la pertinence des différentes molécules et le risque iatrogénique associé. Le cas échéant, ils préconisent des recommandations d'optimisation médicamenteuse et un plan pharmaceutique personnalisé (PPP).
Simplifier l'ordonnance
Le Dr Joseph Mancaux, généraliste à Crèvecœur-le-Grand (Oise), fait partie des médecins libéraux qui expérimentent ce dispositif. Il a été contacté par l'équipe du service de gériatrie du CHU d'Amiens, où était hospitalisée une de ses patientes. Son traitement, issu des ordonnances de deux praticiens, « comportait une quinzaine de médicaments ».
De fait, l'examen de l'ordonnance de patients polymédiqués est souvent réalisé avec d'autres partenaires hospitaliers mais, dans le cas du parcours Iatroprev, la discussion associe tous les professionnels impliqués dans la prise en charge du patient et concernés par la prévention de la iatrogénie. En l'occurrence, la réunion de concertation à laquelle le Dr Mancaux a participé a réuni pendant une demi-heure, en visio, un pharmacien hospitalier, un pharmacologue, un médecin du service où était hospitalisée la patiente et le pharmacien d'officine. En pratique, « nous avons repris l'historique de l'introduction de chaque traitement qui pouvait potentiellement poser problème dans ses interactions avec les autres, poursuit-il. Nous avons pesé le pour et le contre par rapport à leur maintien ou non, cherché s'il était possible de simplifier l'ordonnance, de l'optimiser et abouti à son toilettage, avec une prescription de sortie très allégée », unique et exhaustive. La patiente, revue après sa sortie de l'hôpital, se portait bien. Une nouvelle évaluation de son état de santé a été programmée prochainement.
Se remettre en question
Le Dr Mancaux apprécie que ce temps d'échange associe toutes les parties prenantes en simultané. « On a pu discuter ensemble des décisions prises. C'est toujours bénéfique de se remettre en question de manière constructive, avec des explications », dans un sens comme dans l'autre. En temps ordinaire, observe-t-il, « on n'a pas toujours le recul suffisant et le temps de refaire les ordonnances ».
Quant aux alertes des logiciels d'aide à la prescription, elles ne se déclenchent qu'au cabinet, pas lors des visites à domicile, pourtant fréquentes chez les patients âgés. Une telle concertation constitue donc un véritable atout en termes de prévention de la iatrogénie.
Selon les deux CHU partenaires de ce projet (mené dans le cadre des expérimentations article 51 prévues par la loi Sécu 2018), « les premiers résultats montrent une importante évolution des thérapeutiques et une excellente adhésion par les patients et les professionnels de santé ». Sur les 40 premiers plans pharmaceutiques personnalisés, les préconisations ont été mises en place à 92 % à J+45 et à 89 % à trois mois.
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