Après des difficultés majeures d'approvisionnement de médicaments ces dernières années, le Premier ministre Édouard Philippe a annoncé jeudi le « renforcement d'un certain nombre de sanctions » qui pourront aller jusqu'à un million d'euros contre les laboratoires qui n'anticipent pas assez les pénuries. Ces pénalités seront introduites dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2020.
Le chef du gouvernement a indiqué vouloir muscler les sanctions qui peuvent être imposées lorsque l'information de l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) n'est pas suffisante, lorsqu'elle est trop tardive ou lorsque la constitution de stocks n'est pas à la hauteur de l'exigence et de l'intérêt décelé.
Deux à quatre mois de stocks
Édouard Philippe a souligné « la nécessité d'avoir un comportement exemplaire », évoquant un « sujet difficile et qui suscite des inquiétudes du côté des Français », après avoir reçu à Matignon une délégation d'entreprises du secteur du médicament (LEEM).
Agnès Buzyn a détaillé de son côté les trois cas pour lesquels des sanctions seront prévues et qui figureront dans le PLFSS 2020. Les industriels devront « augmenter la durée des stocks disponibles sur le territoire national pour pallier d'éventuelles pénuries » s'il s'agit de médicaments d'intérêt thérapeutique majeur ou qui n'ont pas d'alternative. Pour ces médicaments, « deux à quatre mois de stock de sécurité obligatoire » seront requis, a détaillé Édouard Philippe sur Twitter.
Des sanctions seront également prévues en cas d'arrêt de commercialisation s'ils n'ont « pas suffisamment prévenu à l'avance l'agence du médicament » ou s'ils n'ont « pas préparé suffisamment à l'avance des alternatives ».
Enfin, les laboratoires devront éviter des « défaillances dans la gestion des risques ».
Matignon a précisé qu'en cas de rupture, l'entreprise pourra se voir appliquer une sanction pour chaque jour de rupture pouvant aller jusqu'à un maximum de 30 % du chiffre d'affaires journalier moyen réalisé en France, dans la limite de 10 % du chiffre d'affaires annuel ou 1 million d'euros.
25 % des Français concernés
Réagissant à ce plan, Frédéric Collet, le président du LEEM, a souligné qu'il y avait « déjà des sanctions, notamment sur l'information qui doit être donnée ». « La France fait partie des pays dont le cadre réglementaire autour de la disponibilité des médicaments est le plus large. Nous bénéficions déjà d'un arsenal très complet. Je ne suis pas sûr que de nouvelles sanctions amélioreraient la situation », a-t-il déclaré à l'AFP.
Les laboratoires font valoir que les ruptures d’approvisionnement sont un « phénomène mondial et qu’elles ont des causes complexes et multifactorielles » telles que l’augmentation rapide de la demande mondiale, la complexification des chaînes de production ou encore la concentration de la production de principes actifs autour de quelques pays (parfois situés à grande distance, en Inde ou en Chine) et de quelques producteurs. Le LEEM pointe aussi des causes « spécifiquement françaises » dont le développement des exportations parallèles souvent liées aux faibles prix des médicaments en France comparés à ceux de ses voisins européens et les mécanismes d’achats hospitaliers « inadaptés à la réalité de l’offre disponible ».
En juillet, la ministre de la Santé avait dévoilé une feuille de route provisoire qui prévoyait la généralisation en 2020 d'une plateforme permettant entres autres aux pharmaciens de signaler les ruptures d'approvisionnement au laboratoire concerné.
Un quart des Français s'est déjà vu refuser la délivrance d'un médicament ou d'un vaccin pour cause de pénurie, selon une enquête publiée en janvier à l'initiative de France Assos Santé. Et selon l'ANSM, les signalements de tensions d'approvisionnement ont été multipliés par 20 en 10 ans, pour atteindre 868 cas en 2018.
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