Sephora, La Redoute à Roubaix ? La grande déglingue des circuits pharmaceutiques s’est accélérée et arrive à son terme. Quelque 60 à 80 % des bacs de médicaments viennent de Chine ou d'Inde. Un bateau bloqué, les Chinois qui nous font les gros yeux et hop, rupture des stocks. Qu’est devenue l’indépendance médicamenteuse de l’Europe ? Une chercheuse commande de l’amoxicilline en Inde. Elle contrôle pour son étude ce qui n’était finalement que de la poudre : concentration en amoxicilline, zéro. Qui contrôle ces usines du bout du monde ?
Rupture de stocks
Ces usines fonctionnent comme tout Ie reste, en flux tendu. Les grossistes OCDP et compagnie fonctionnent en flux tendu. « Mon pov’ Monsieur, stocker coûte cher ». Ce n’est pas faux. Les pharmaciens ne stockent pas. Notamment pour les quarante pharmacies dans Ie centre de Paris, parfois des mouchoirs de poche. N’y a-t-il pas des régles de distance minimales entre deux pharmacies ? Sont-elles respectées ? Non. Lorsque l’on vient chercher son médicament, on reçoit le conseil de repasser Ie lendemain. Pourquoi ne pas rebaptiser les pharmacies « La Redoute à Roubaix » ?
Entrant dans une officine moderne, on se demande si l’on est chez Marionnaud ou Séphora. Virons tous ces produits de beauté sur les trottoirs pour y mettre à la place des laits spéciaux, des médicaments et des vaccins.
Plusieurs fois par semaine, les pharmaciens nous appellent pour signaler une rupture de médicaments ou de vaccins. Récemment, il y a eu une rupture de vitamine D (faut-il revenir à l’huile de foie de morue), de Fumafer ? Faut-il nous-même aller creuser à la mine ! Ce qui n’empéche pas d’envoyer un satellite sur une cométe à l’autre bout de l’espace. Qui peut Ie plus peut le moins. Ça reste à prouver. Sur les vaccins, on se met à penser que les ruptures sont liées a la vente à plus haut prix de vaccins a l’étranger : l’argent !
Il y a de cela quarante ans, dans un des pays les plus pauvres du monde, en Afrique et de surcroît communiste, on notait trois noms de médicaments dans l’espoir que l’ordonnance serait honorée. L’ultra-libéralisme avec sa petite armée d’ordinateurs, de logiciels produit ce que Ie communisme avait réalisé : la pénurie.
Il faut faire quelque chose
Et l’on entend la chanson des pharmaciens Ie soir au fond des bois : « ce n’est pas de ma faute, on n’y peut rien », c’est ce que l’on appelle Ie fatalisme ou l’aquoibonnisme. Le pharmacien serait-il content avec sa péritonite de s’entendre dire à l’hopital : « repassez dans 48 heures, nous n’avons pas de chirurgien et nous ne savons pas dans combien de temps il sera de retour ». Tout cela s’accélére depuis dix ou quinze ans, depuis quelques mois cela atteint la vitesse de la lumière. Edouard Leclerc et ses copains attendent que Ie fruit soit mûr pour reprendre les pharmacies.
Toute la chaine pharmaceutique est déglinguée, les médecins ont besoin des pharmaciens, les patients de médicaments, il faut faire quelque chose.
Sinon, il nous ne nous reste peut-étre qu’à conseiller à nos patients d’aller chez Séphora pour se fournir en médicaments et en vaccins.
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