François Asselineau (UPR) : « Si on ne sort pas de l’Europe, la médecine sera ubérisée »

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Publié le 05/04/2017
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Crédit photo : AFP

Le candidat de l’Union populaire républicaine plaide pour une sortie immédiate de l’Europe, seule façon selon lui de sauver la Sécurité sociale. François Asselineau défend la médecine libérale et plaide pour une revalorisation des consultations. Il milite également pour une ouverture aux médecines douces, « une forte demande du public ».

LE QUOTIDIEN : Vous êtes le candidat du FrExit. Qu’apporterait aux médecins une sortie de l’Europe ?

FRANÇOIS ASSELINEAU : Les médecins sont des citoyens comme les autres. Ils s’intéressent à l’avenir de leur pays et c’est à ce titre qu’une sortie de l’Union européenne les concerne. Les traités européens ont un impact direct sur les professions de santé. Dans le dernier rapport des GOPE*, que la France doit appliquer, il est écrit noir sur blanc la remise en cause de toutes les professions réglementées. Les médecins, les pharmaciens, les dentistes, etc. seront mis en concurrence frontale avec l’ensemble des ressortissants de l’UE. Toutes les protections et régulations mises en place en France seront mises à mal par cette volonté de déréglementation de Bruxelles. On va vers une ubérisation de la société. Je ne le veux pas, tout comme je ne veux pas qu’on démantèle la Sécurité sociale.

Quelle est votre position sur l’obligation de tiers payant généralisé ?

Je souhaite que les honoraires soient directement payés aux médecins. Ce système, qui fonctionnait jusqu’à présent, a satisfait les Français. Pourquoi en changer ? Je ne veux pas aller vers une médecine fonctionnarisée. Maintenant, je suis pragmatique. S’il y a une volonté forte d’aller vers le tiers payant généralisé, et que cela ne remet pas en cause le bon fonctionnement du système, je suis prêt à en discuter.

Faut-il faire évoluer les honoraires ?

Il faut aller vers une revalorisation des actes médicaux. Les médecins de ville sont submergés ! Leur exercice se transforme en apostolat, ce n’est pas normal. Il faut leur permettre d’exercer une médecine de qualité. Par ailleurs, je me méfie des paiements au forfait car c’est revenir, petit à petit, sur les principes de la médecine libérale auxquels je suis favorable. C’est la même chose pour l’hôpital. Je le dis dans mon projet, il faut réévaluer les salaires du personnel des hôpitaux de l’Assistance publique.

Quelles mesures préconisez-vous pour lutter contre les déserts médicaux ?

Justement, je viens de voir qu’une gynécologue bradait sa patientèle un euro pour trouver un successeur… Au-delà de cet épisode qui a défrayé la chronique, le problème de la désertification médicale est plus vaste : il est lié à la désertification rurale, à la disparition des petits commerces, des services publics, à la fin de l’agriculture familiale. S’il n’y a plus d’agriculteurs dans les campagnes, on ne voit pas pourquoi il y aurait des médecins ! Il faut engager une politique globale de réaménagement du territoire. Je veux également favoriser les maisons de santé pour que les médecins puissent se regrouper, partir en vacances comme tout le monde. Je souhaite donner un coup de pouce aux médecins qui viendraient s’installer dans ces zones très rurales.

Vous évoquez l’influence des laboratoires pharmaceutiques sur les médecins. Que préconisez-vous pour aller au-delà de la législation actuelle ?

Déjà, je me réjouis de voir que le gouvernement actuel va dans le sens des propositions que je faisais il y a 5 ans. Cela veut dire que je ne me trompais pas. Il faut aller plus loin pour lutter contre le lobbying des labos qui s’exerce à Bruxelles, mais aussi à l’hôpital, auprès des médecins, des étudiants, etc. Je ne dis pas qu’il faut totalement interdire le lobbying mais il faut davantage de transparence. Je pense qu’on devrait former les étudiants en santé à faire preuve de vigilance par rapport aux activités des lobbyistes.

Vous souhaitez développer les médecines douces. Lesquelles ? Comment ces pratiques seraient-elles encadrées ?

Il y a une forte demande du public pour ces médecines douces comme l’ostéopathie, l’acupuncture ou la phytothérapie. Il faut donc aller vers une meilleure reconnaissance de ces pratiques, sans verser dans le charlatanisme. Nous devons garder le contrôle, soit à travers une certification, soit une autorégulation de la profession. Mais je suis favorable à un peu plus d’ouverture sur ces questions.

Le cannabis doit-il être légalisé ?

C’est moins au président de la République qu’au Parlement de se prononcer sur ce sujet. Dans mon programme, il y a le principe du référendum d’initiative populaire. On peut très bien imaginer que la question de la légalisation du cannabis soit posée par des citoyens. Il suffirait que 500 000 Français le demandent. Les citoyens en ont assez qu’on décide de tout à leur place. Il faut leur redonner la parole. 

Question des lecteurs du « Quotidien » : que proposez-vous en termes de revalorisation du salaire des étudiants en médecine ?

Je suis un peu juge et partie parce que j’ai une fille qui est en 7e année de médecine en gynécologie obstétrique. Je l’ai vue récemment, elle était extrêmement fatiguée… Elle travaille 70 heures par semaine. Ce n’est pas normal. C’est une question de santé publique et d’humanité. Il faut revenir à un rythme de travail acceptable et faire respecter ces dispositions. Je pense que les internes doivent être payés au minimum au SMIC pour 35 heures, et qu’on leur paye les heures supplémentaires.

* Grandes orientations de politique économique, fixées par le Conseil européen

Propos recueillis par Stéphane Long

Source : lequotidiendumedecin.fr