La Cour des comptes a publié ce mercredi son rapport annuel 2017, qui met en lumière plusieurs exemples de mauvaise gestion publique. Voici les principales critiques formulées par les magistrats financiers.
• Finances publiques : trop d'optimisme
Pour la Cour, l'objectif de réduction de déficit public, que le gouvernement entend ramener à 2,7 % du produit intérieur brut (PIB) en 2017, après 3,3 % l'an dernier, sera « très difficile à atteindre ». La prévision gouvernementale repose « sur des hypothèses de recettes optimistes » et des économies « qui ne pourront pas atteindre les montants attendus », déplore la juridiction financière.
• Intenable ONDAM…
» Les dépenses sociales risquent de dépasser les prévisions », a pointé ce mercredi Didier Migaud, premier président de la Cour de comptes. Dans son viseur, l'objectif national de dépenses d'assurance maladie (ONDAM), passé de 1,75 % en 2016 à 2,1 % en 2017, qui pourrait « ne pas suffire à absorber l'impact des mesures salariales de la fonction publique sur les hôpitaux, ni les effets des augmentations de tarif accordées par la nouvelle convention médicale ». La Cour juge que « des risques importants de dépassement » pèsent sur cet ONDAM 2017.
• Hôpitaux corses : déficits et congés anarchiques
Les déficits des centres hospitaliers d'Ajaccio et de Bastia ne cessent de se creuser. De 2010 à 2015, celui du CH d'Ajaccio est passé de 5,5 à 17,6 millions d'euros. L'établissement a pourtant bénéficié de subventions de fonctionnement à hauteur de 69,2 millions d'euros. Même chose pour l'hôpital de Bastia dont le déficit a bondi au cours de la même période de 2,8 à 7,6 millions d'euros malgré des subventions de 25,3 millions d'euros. En cause, l'incapacité à améliorer le recouvrement des actes médicaux mais aussi l'augmentation des charges de personnel « sans lien avec l'activité ».
Didier Migaud souligne « un abandon systématique de toute volonté de réforme face aux résistances rencontrées ». La Cour recommande de mettre fin à une politique de congés supplémentaires « ne reposant sur aucune base réglementaire ». Elle réclame la mise en place d'un outil de suivi du temps de travail.
• Accidents médicaux : l'ONIAM peu performant, son président débarqué…
Le rapport dresse un tableau accablant de l'activité de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux (ONIAM), établissement public censé faciliter l'indemnisation à l'amiable des victimes d'erreurs et d'accidents médicaux. Gestion « laxiste », délais trop longs, rejets de dossiers au détriment de victimes, défaillances, anomalies comptables, la liste est longue des griefs imputés… En l'état actuel, « il serait aventureux » de lui « confier la mission d'indemniser les victimes de la Dépakine dont l'ampleur et les enjeux seraient encore plus importants que dans l'affaire du Mediator », assènent les magistrats.
Didier Migaud estime que « la victime a été trop souvent oubliée par l'institution pourtant chargée d'en protéger les intérêts ». Il en va ainsi des avis des Commissions de conciliation et d'indemnisation (CCI), chargées dans chaque région de faciliter le règlement amiable des litiges. Selon la Cour des comptes, l'ONIAM s'est arrogé le droit « de réexaminer les avis des CCI en en modifiant parfois radicalement le sens ».
La résultat de ce réquisitoire a été immédiat : le ministère a annoncé son intention de procéder au remplacement d'Erik Rance, directeur de l'ONIAM depuis 2011. Un candidat a déjà été choisi, Sébastien Leloup, actuel directeur délégué de la Haute Autorité de santé (HAS). Il sera prochainement auditionné par l'Assemblée nationale et le Sénat avant d'être adoubé.
• Dentistes : bijoux et grands vins, un Ordre qui mène grand train…
« Dérives dans la gestion », « indemnités indues », contrôle insuffisant : la Cour étrille l'Ordre national des chirurgiens-dentistes (ONCD), dont les cotisations annuelles s'élèvent à 20 millions d'euros. « Au moyen des cotisations », l'Ordre a acheté en faveur de ses conseillers et des membres de leur famille des bijoux, des « accessoires de haute couture », des soins en thalassothérapie, des « grands vins », et même des vacances dans des hôtels de luxe, énumère le rapport.
En outre, l'institution s'est éloignée de ses missions initiales « au profit d'activités de revendication et de défense d'intérêts professionnels » dévolues aux syndicats.
• Écotaxe poids lourds : la gabegie
L'abandon de l'écotaxe, décidé en 2014 face à la fronde des « Bonnets rouges », constitue « un échec de politique publique dont les conséquences sont probablement très durables », selon les magistrats financiers, qui évoquent un pilotage « centré sur des objectifs de court terme ». Le dispositif, entériné lors du Grenelle de l'Environnement, devait permettre le financement des infrastructures de transport. Son abandon, au bout du compte, a coûté à l'État près d'un milliard d'euros en indemnisations, tandis que la solution de remplacement adoptée - une hausse de la taxe sur les carburants - a pénalisé les automobilistes et les poids lourds français.
• Buralistes : des aides contestables
Même si les montants consacrés par l'État au soutien de ces professionnels tendent à décroître, la Cour critique la nature et la répartition des aides accordées qui profitent à tous les buralistes, « y compris ceux dont les chiffres d’affaires sont les plus élevés ». Cet état de fait « n'encourage en rien l'indispensable réorientation de l'activité des débitants de tabac, pourtant dictée par nos objectifs de santé publique ». La Cour invite les pouvoirs publics à supprimer les aides au revenu, et à revoir ses relations avec la profession.
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