Pour réformer le système, incitons financièrement les professionnels, plaide le think-tank « Économie Santé »

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Publié le 30/03/2017
THINK TANK

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Crédit photo : DR

Chaque année, le think-tank « Économie Santé » dirigé par le Dr Philippe Leduc émet une « reco » pour améliorer le système de soins. Le millésime 2017, présenté ce jeudi, va droit au but. Si l'on veut que les réformes avancent enfin, il faut que les professionnels y aient un intérêt financier direct.

Le groupe d'experts, qui rassemble des universitaires, professionnels ou industriels, a donc choisi un intitulé explicite : « Pour des soins de qualité, agir efficacement sur les tarifs ». «Tout le monde sait ce qu'il faut faire pour améliorer le système de santé », résume Philippe Leduc. Et d'énumérer les sujets faisant d'après lui consensus : virage ambulatoire, réorganisation hospitalière, implication active des patients… Le problème ne serait pas d'élaborer les réformes mais de faire en sorte « que les gens aient intérêt à agir », analyse-t-il.

Modèle suédois

Le document égrène les exemples internationaux prouvant qu'il est possible, en maniant la carotte pécuniaire, d'inciter les professionnels de santé au changement. Dès 2009, la Suède a introduit un paiement par épisode de soins pour l'arthroplastie de la hanche et du genou. Résultat : « une réduction de 26 % des complication postopératoires et une réduction des coûts de 20 % dans le comté de Stockholm », indique la « reco ».

Autre exemple : aux États-Unis, des « budgets virtuels » ont été expérimentés. Pour une période donnée, il s'agit de définir une enveloppe financière considérée comme naturelle par Medicare, l'assureur public. Si les professionnels parviennent à dépenser moins que la somme prévue, ils partagent avec le payeur... les gains réalisés. « Au final, Medicare a réalisé des économies nettes », note le think-tank Économie Santé.

Où en est la France dans l'introduction de ces paiements intelligents ? « La qualité représente 0,6 % des budgets hospitaliers, et la ROSP [rémunération sur objectifs de santé publique] 7 à 8 % des paiements aux libéraux », regrette Étienne Minvielle, professeur à l'Ecole des hautes études en santé publique et membre du think-tank. « L'investissement à réaliser est donc très important. »

Programme pour plusieurs quinquennats

L'effort à faire est d'autant plus important que les soignants peuvent être réticents devant des mécanismes d'incitation souvent perçus comme des usines à gaz, quand ils ne sont pas considérés comme attentatoires à l'indépendance professionnelle. C'est pourquoi le Pr Philippe Amouyel, chercheur à l'INSERM et lui aussi membre du think-tank, conseille de ne pas mettre l'accent sur le levier financier mais d'insister sur l'idée de « catalyseur en vue du bien-être du patient ». Le PU-PH estime que les changements doivent être envisagés sur le long terme. « C'est ambitieux, cela prendra certainement plusieurs quinquennats », prévient-il. « Ce n'est pas pour cela qu'on ne doit pas commencer dès le prochain ! »

Ce vœu pourrait être exaucé. Parmi les représentants des candidats à la présidentielle, seul le représentant de Jean-Luc Mélenchon a affiché des points de désaccord significatifs.  Pour les émissaires de François Fillon, Benoît Hamon et Emmanuel Macron, l'ordonnance passe comme une lettre à la poste. Reste à voir quel sera le niveau d'observance !


Source : lequotidiendumedecin.fr