9 décembre, une date devenue traditionnelle pour les membres du collectif Femmes de santé : c’est le jour de leurs États Généraux. Avec, chaque année, une thématique de santé sur laquelle elles travaillent, pour comprendre les enjeux et trouver des solutions utiles, pratiques et concrètes.
Elles (et ils) sont professionnelles de santé dans le public ou le privé, start-uppeuses, avocates, directrices d’établissements de santé et médico-sociaux, coachs de soignants, DRH, cadres et dirigeantes de l’industrie pharmaceutiques, patientes-expertes, présidentes d’associations, chercheures, secrétaires médicales… Elles œuvrent pour une santé plus juste et plus égalitaire, et utilisent leur pluridisciplinarité, l’intelligence collective et la sororité pour faire des propositions qui font avancer la santé.
Cette année, les deux tiers d’entre elles ont choisi (elles sont désormais 2 500 et ce chiffre croît tous les mois), comme thématique : Santé de la Femme… Trop vaste : on touche 50 % de la population et la revue de la littérature grise révèle trop de trous dans la raquette, trop d’incohérences et trop d’insuffisances… Des maladies mixtes dont on ignore les symptômes féminins ; en passant par la banalisation des manifestations cliniques, des symptômes et des douleurs tant par les femmes et que par les professionnels de santé ; par la recherche trop peu développée sur les maladies féminines, ou les tabous – ô combien présents — des deux côtés également et les traitements mal remboursés (la taxe rose existe aussi dans la santé)… la santé de la femme est un gigantesque champ en friche. Et pourtant, il est cultivable. À condition de s’y mettre ensemble, ce qu’ont fait les Femmes de Santé.
Trois axes ont été choisis et travaillé en amont des États Généraux à travers dix ateliers collaboratifs dans l’objectif d’améliorer la santé de toutes les femmes.
D’abord, la charge mentale – prouvée — est avant tout une source d’inégalité de santé et un réel frein aux préventions. L’ensemble des actions proposées prennent du temps que l’on n’a pas, nécessitent d’obtenir des rendez-vous dans des structures surchargées ou de faire des déplacements chez des spécialistes trop rares, nous accaparant l’esprit… En d’autres termes, ces propositions alourdissent la charge mentale, elle-même responsable des retards de prises en charges et d’accès aux soins et aux préventions ! Le serpent se mord la queue ! Comment faire en sorte que les préventions ne soient pas perçues comme des contraintes supplémentaires mais un moyen de lever la charge mentale des femmes ? Premier grand thème de ces États généraux… Elles ont osé s’y atteler et ont proposé 12 solutions simples à mettre en œuvre… que je vous révélerai lors de ma prochaine tribune d’humeur !
Trois axes et dix ateliers collaboratifs
Ensuite, « La bonne information, le bon choix, au bon moment (les risques des traitements mais aussi les bénéfices ; le poids de la parole des patientes…) ». Un marronnier. Et pourtant jamais abordé comme cela a été fait. Comment faire prendre conscience des biais genrés dans les soins, des tabous, des questionnements intimes ? Comment contrer les fake news et les applications dont le contenu est faux, comment pallier le manque de données ne permettant pas un diagnostic optimisé et un suivi adapté voire entraînant une errance diagnostique ? Comment combattre les difficultés d’accès aux soins dans les territoires ? J’en passe. Ce ne sont pas 12 mais 18 propositions qui ont émergé de ces femmes aux profils complémentaires.
Et un jour, au détour d’un atelier, l’une de ces femmes propose la mise en place d’une stratégie nationale santé de la femme. Silence dans la salle de visio… Une évidence, une acceptation unanime. Ce n’est pas une solution simple, utile, pratique, concrète, c’est une prise de position politique, un appel… L’idée d’une lettre ouverte au gouvernement émerge. Les Femmes de Santé prennent position et travaillent sur la lettre, qui interpelle certes, mais propose aussi : 10 piliers fondateurs de cette stratégie, de la recherche à l’accès aux soins, s’érigent avant d’être couchés sur le papier. Commence alors le tour des cabinets ministériels, pour proposer et pour informer. Le soutien est donné, les propositions rendues « en off » pour la réunion interministérielle « égalité ». François Braun accorde son parrainage, Isabelle Rome et Stanislas Guerini leur haut parrainage et la lettre sera remise à madame la ministre, Agnès Firmin le Bodo, présente le 9 décembre… et l’ensemble des Femmes et Hommes de santé pourront la cosigner en ligne. Ensemble. Encore et toujours.
Exergue : C’est une prise de position politique, un appel... L’idée d’une lettre ouverte au gouvernement émerge
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