Réunion « lunaire », « mépris » : reçus et choyés par Castex après le gros couac des doses, les syndicats médicaux pas convaincus

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Publié le 11/03/2021

Crédit photo : AFP

La polémique sur l’approvisionnement des doses de vaccins AstraZeneca pour les médecins libéraux n’est pas terminée. Après avoir écarté au profit des pharmaciens les médecins généralistes des nouvelles commandes de doses pour la semaine du 8 mars, déclenchant un très vif mécontentement dans leurs rangs, le ministère de la Santé a d’abord été obligé de clarifier sa position en début de semaine et d’appeler à l’union sacrée entre médecins et officinaux.

Matignon reprend la main

Mercredi soir, coup de théâtre : conscient des dégâts croissants dans les rangs médicaux, c’est le Premier ministre Jean Castex lui-même qui a tenté d’apaiser la fronde en recevant en visioconférence l’Ordre et les syndicats représentatifs de médecins libéraux, accompagné du ministre de la Santé, Olivier Véran. Selon Matignon, l’objectif de cette rencontre de pacification était de « repartir sur des bases saines, clarifiées et apaisées », alors que les syndicats dénoncent toujours le décalage entre les affirmations rassurantes du ministère de la Santé sur l’approvisionnement des flacons et les retours du terrain sur la disponibilité des vaccins.

Le chef du gouvernement a assuré aux médecins libéraux qu’ils auront 1,1 million de doses disponibles (toutes commandes cumulées) dès cette fin de semaine, et que « tout médecin généraliste qui n’a plus de doses pourra aller en chercher chez son pharmacien la semaine prochaine ».

Excuses exigées

Même si le Premier ministre a admis des couacs et erreurs de formulation de l’administration – en donnant le sentiment de prioriser les pharmaciens – les leaders syndicaux n’ont pas été convaincus par cette réunion organisée à la hussarde.

« Nous avons été convoqués en fin de matinée pour la fin de journée, confie le Dr Jean-Paul Ortiz, président de la CSMF. Nous avons expliqué au premier ministre toute la lourdeur administrative de cette vaccination, il nous a écoutés, mais je n’ai pas été convaincu par cette réunion. La colère gronde chez les médecins libéraux face à tant de mépris et c’est bien légitime ! Le gouvernement ne se rend pas compte de l’engagement des médecins sur le terrain et de ce que cela implique de devoir convaincre les patients, caler les rendez-vous et ensuite les appeler pour tout annuler ! »

« Les médecins libéraux n’ont pas vocation à être la variable d’ajustement des errements logistiques et encore moins des caprices des pharmaciens qui auraient pu attendre une semaine de plus que les quantités de vaccins suffisantes soient réunies », recadre le SML, « pas convaincu » par les arguments de l’exécutif qui continue de maintenir « une logique en flux tendus ». La centrale du Dr Philippe Vermesch appelle le gouvernement à changer de stratégie pour les officines « afin de constituer des stocks minimaux de vaccins et permettre une organisation plus fluide de l’approvisionnement des médecins ».

« Agression » de la profession

« Nous avons eu l’impression d’être dans le bureau du proviseur qui tente, vous enfants, de vous rabibocher avec le professeur », ironise la FMF, rappelant que les médecins « ont dû annuler des rendez-vous pris avec leur patientèle sur plusieurs semaines ». Cette séance témoigne « d’un réel mépris par la vacuité des propos et de l’absence totale de réelle stratégie vaccinale », juge la centrale qui décrit même une « réunion lunaire ». La FMF souhaite un courrier d’excuses à l’ensemble des médecins « pour les erreurs de communication qui les ont rendu responsables d’un ralentissement de la vaccination ».

MG France n’est pas davantage satisfait des explications de Matignon reçues hier soir, qui « ne suffiront pas pour calmer la colère des généralistes ». « Le médecin généraliste qui n’aura pas obtenu les vaccins pour ses patients le samedi ne sera sans doute pas enthousiaste pour aller vacciner le dimanche, prévient la structure. Contourner la médecine générale dans la vaccination est une agression pour la profession et une perte de chance pour la population. »

Vers plus de transparence ?

Selon une source gouvernementale citée par l’AFP, Olivier Véran devait envoyer ce jeudi un nouveau courrier aux médecins en prenant plusieurs engagements dont celui de « donner de la visibilité sur les livraisons », de « permettre aux médecins qui ont écoulé toutes leurs doses de pouvoir recommander » ou de « veiller à ce qu’il n’y ait pas de médecins en panne de doses alors qu’il y a des créneaux disponibles ».


Source : lequotidiendumedecin.fr