LE COLLECTIF INTERASSOCIATIF sur la santé (CISS) veut frapper un grand coup. Ulcéré par la suppression dans le projet de loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) des mesures protectrices des usagers – renversement de la charge de la preuve, testing, aggravation des sanctions en cas de dépassements d’honoraires excessifs- –, l’association livre des conclusions, qu’elle veut éloquentes, d’une enquête sur le refus de soins. Réalisé par téléphone entre le 6 avril et le 5 mai 2009 auprès d’un échantillon de 496 médecins spécialistes libéraux de secteur II de 11 villes de l’Hexagone (1), ce « testing » avait pour objectif de mesurer le taux de refus de soins des patients bénéficiaires de la couverture médicale universelle complémentaire (CMUC). Le CISS assure de la fiabilité de sa méthodologie. « Pour chaque entretien, l’appelante assurait posséder une carte Vitale ainsi qu’une attestation des droits en cours de validité. Parfois, l’existence d’un médecin traitant déclaré et d’une lettre d’adressage a été confirmée, et en cas de demande, les symptômes ressentis ont été précisés », indique le collectif.
Les résultats sont significatifs. Selon le CISS, 22 % des médecins spécialistes contactés ont refusé de recevoir le patient. « Ce résultat démontre que les situations de refus de soins ne sont pas marginales et procèdent d’intentions clairement discriminatoires dans la mesure où les cas de refus de soins nuancés ont été traités dans une catégorie spécifique représentant 5 % des réponses », affirme le collectif. À Paris, la part des médecins de secteur II refusant des patients en CMU grimpe à 46 %. À cela, plusieurs raisons parmi lesquelles le coût de l’exercice plus élevé pour les professionnels à Paris qu’en province. « La fréquence des refus de soins croît à mesure que le niveau de richesse de la patientèle augmente, constatent les auteurs de l’enquête. La CMU a été créée pour permettre et faciliter l’accès de tous à la santé mais avec sa création ont émergé des pratiques, des adaptations chez certains professionnels qui prennent la liberté de sélectionner leur patientèle selon qu’elle bénéficie ou pas de ce dispositif ».
Peu de recours de patients.
Pourtant, la majorité des victimes de refus de soins renonce à exercer leurs voies de recours. « Ils doutent de l’efficacité d’éventuels recours, estimant que la procédure est perdue d’avance, commente Marc Paris, du CISS . De plus, l’administration de la preuve est souvent problématique pour des patients. Le testing apporte une bonne réponse dans ce domaine ». Seules quelques caisses primaires déclarent avoir connaissance de refus de soins. Avec la FNATH et l’UNAF, le CISS demande au législateur de rétablir toutes les dispositions en faveur de l’accès aux soins de tous qui se trouvaient dans le texte initial du projet de loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST), notamment de reconnaître le testing comme mode de preuve opposable. « Le risque du renoncement à exercer ses voies de recours glisse de plus en plus dangereusement vers un renoncement aux soins », note le collectif. Par ailleurs, les associations d’usagers demandent qu’une enquête de l’IGAS soit diligentée pour mesurer l’accès aux soins des enfants bénéficiant de l’Aide sociale à l’enfance (ASE). Elles devraient également saisir la Haute autorité de lutte contre les discriminations (HALDE) pour combattre les refus de soins.
(1) L’enquête a été menée auprès de 9 spécialités (gynécologie, ophtalmologie, psychiatrie, ORL, dermatologie, gastro-entérologie, cardiologie, neurologie et pneumologie) dans 11 villes (Paris, Marseille, Toulouse, Strasbourg, Bordeaux, Rennes, Lille, Clermont-Ferrand, Besançon, Rouen et Poitiers).
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