À l’échelle mondiale, la pancréatite aiguë (PA) a touché plus de 17 millions de personnes en 2013, ce qui la place au 35e rang des maladies les plus répandues dans le monde. Aux États-Unis, on estime que l’incidence annuelle de la PA est environ de 40 pour 100 000 personnes, ce qui correspond à plus de 130 000 nouveaux cas par an (1).
Historiquement, la pancréatite a été considérée principalement comme une maladie de l’adulte, fortement associée à la consommation d’alcool et aux calculs biliaires. Cependant, la pancréatite chez l’enfant a fait l’objet d’une attention accrue au cours de la dernière décennie. Selon des études menées auprès de centres universitaires, l’incidence de la PA pédiatrique aux États-Unis se situerait entre 3,6 et 13,2 pour 100 000 personnes par an, en augmentation dans toutes les tranches d’âge de l’enfant. Une tendance qui reflète celle observée pour les adultes (2).
Tabagisme et génétique
En 2012, la PA a été identifiée comme la première cause d’hospitalisation pour maladies gastro-intestinales aux États-Unis, coûtant environ 2,6 milliards de dollars en coûts d’hospitalisation. C’est aussi la première cause d’admission pour urgence abdominale en Europe et aux États-Unis (1, 3). Sa forme grave, nécrosante est la source de longs séjours d’hospitalisation, de même que la défaillance d’organe. Dans ce dernier cas, la mortalité est élevée, de 16 % à 29 % selon les études. Au-delà de ses conséquences économiques directes, la pancréatite a un impact important sur la qualité de vie des enfants et des adultes.
La consommation chronique d’alcool et une origine biliaire représentent près de 80 % des causes de PA en Occident. Mais cette approche est probablement réductrice, et on peut s’interroger sur le rôle de l’interaction d’autres facteurs dans son incidence croissante ces dernières décennies et dans la part non négligeable des cas touchant les enfants. On sait déjà que le tabagisme et la génétique sont des facteurs de risque indépendants, ou de susceptibilité aux autres facteurs environnementaux pour la seconde.
Le rôle de l’obésité encore à préciser
Un probable nouvel acteur est l’obésité. Selon les données de l’OCDE de 2012, l’obésité touche 10 % de la population française (33 % aux États-Unis), et le surpoids 40 % (66 % aux États-Unis). Ces chiffres en constante augmentation depuis 1975 s’accompagnent de l’augmentation du syndrome métabolique. Même si aucune étude épidémiologique bien conduite ne permet de conclure à une relation de cause à effet, on constate en parallèle une augmentation de l’incidence des PA biliaires (le surpoids est facteur de risque de calculs) et de celle des pancréatites sur hypertriglycéridémie. Une étude de 2014 rapportant les données de 1 582 patients suivis pour PA sur une durée de quinze ans (de 1990 à 2005) relève ainsi une nette progression au cours du temps des PA biliaires et de celles dues à une hypertriglycéridémie, qui représenteraient respectivement 52 % et 7,8 % des cas (4).
Plus largement, l’obésité est un facteur de risque de sévérité des PA (RR : 2,48 ; [1,34-4,6]), de complications locales (RR : 2,58 ; [1,2-5,57]) et de mortalité (RR : 3,81 ; [1,22-11,83]). On peut se demander si elle est en soi facteur de risque indépendant de pancréatite. La masse adipeuse sous-cutanée et viscérale peut s’apparenter à une nouvelle glande endocrine capable de jouer un rôle central dans le métabolisme des lipides et des glucides. Elle synthétise une série d’hormones et de cytokines à l’origine d’un syndrome inflammatoire chronique : TNF-α, interleukine-6, adiponectine, leptine, résistine et plasminogen activator inhibitor-1. Est-ce suffisant pour provoquer une pancréatite ? Des études cliniques et expérimentales sur des modèles murins tendent à le confirmer. D’un point de vue épidémiologique, la cohorte américaine NAPS2 (The North American Pancreatitis Study 2) a permis le suivi de 1 035 patients (460 avec PA récurrente et 540 avec pancréatite chronique) pendant six ans. L’obésité était le seul facteur de risque trouvé chez plus de 30 % des patients, et l’alcoolisme chronique ne touchait que 40 % des cas (2).
Il est très vraisemblable que très prochainement la notion d’obésité comme facteur de risque indépendant de pancréatite soit validée sur de grandes cohortes.
Service de pancréatologie-gastroentérologie de l’hôpital Beaujon (Clichy), Inserm UMR 1149 (1) Global Burden of Disease Study 2013 Collaborators. Lancet 2015 Aug 22;386(9995):743-800 (2) Park A et al. J Pediatr Gastroenterol Nutr. 2009 Sep; 49(3): 316-22 (3) Yadav D, Lowenfels AB. Gastroenterology. 2013 Jun; 144(6):1252-61(4) Huang YX et al. Pancreas. 2014 May;43(4):548-52
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