Associations déconseillées, épilepsie, VIH…

Contraception orale et interactions médicamenteuses

Publié le 17/03/2010
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ContraceptionVIH

ContraceptionVIH
Crédit photo : Phanie

Foie et flore

Foie et flore

Ces interactions médicamenteuses se situent au niveau hépatique, notamment lors de coprescription de médicaments inducteurs enzymatiques (par ex. cytochrome P450), au niveau de la flore intestinale et du cycle entérohépatique par diminution de l’hydrolyse des estrogènes conjugués avec taux plasmatiques diminués. Les conséquences possibles de ces interactions sont diverses : diminution (augmentation) des concentrations d’éthinyl estradiol (EE), augmentation de l’incidence des saignements intermenstruels et des irrégularités menstruelles et surtout réduction de l’efficacité du contraceptif hormonal.

Ceci concerne tous les EP quelle que soit la voie d’administration mais aussi les progestatifs seuls (injectable, implant ou microprogestatifs) sauf le DIU au LNG, le progestatif étant directement délivré dans la cavité utérine.

Associations déconseillées

Les associations déconseillées sont :

- les inducteurs enzymatiques :

. anticonvulsivants : phénobarbital, phénytoïne, primidone, phosphophénytoïne, carbamazépine, topiramate ;

. la rifabutine ; la rifampicine ; le millepertuis ;

- certaines antiprotéases (ritonavir, nelfinavir, lopinavir, elfavirenz…) ;

- le modafinil (Modiodal), médication de l’hypersomnie.

Les interactions ne sont pas démontrées pour les anti-infectieux et antibiotiques : tétracyclines et macrolides, doxycycline, ampicilline, métronidazole, quinolones et érythromycine.

Contraception et épilepsie

Ce problème a un double intérêt : celui d’une interaction médicamenteuse possiblement responsable d’une diminution d’efficacité de la contraception hormonale et l’importance chez les épileptiques d’une contraception car chez elles la programmation d’une grossesse est particulièrement souhaitable pour diminuer les malchances de malformation fœtale [1].

Devant une demande contraceptive chez l’épileptique, il faut s’informer des produits utilisés et savoir s’ils sont ou non inducteur enzymatique, selon les données du Vidal :

- si l’antiépileptique est non inducteur enzymatique (Lamictal, Dépakine…) la contraception est sans particularités, selon le désir de la patiente ;

- en cas d’utilisation d’un antiépileptique inducteur enzymatique (Gardénal, Di-Hydan, Tégrétol…) il faut préférer une méthode non hormonale (à condition de choisir une méthode efficace) ; l’implant, le patch et l’anneau sont concernés par cette restriction alors que Mirena, du fait d’une action locale du progestatif, n’est pas concerné ; bien sûr le DIU au cuivre est possible, même chez la nullipare, en utilisant alors un modèle « short ».

La difficulté vient du refus des femmes d’une autre méthode que la contraception orale. Une pilule normodosée à 50 µg d’EE peut être proposée en sachant que les premiers cas de grossesse avec antiépileptique ont été rapportés avec ce dosage [2]. Par ailleurs il faut parfois réajuster les doses d’anti-épileptiques dont la concentration plasmatique peut être abaissée par l’estroprogestatif, donc moins efficace.

Deux messages méritent d’être connus des patientes épileptiques : la pilule n’est pas dangereuse, elle est simplement moins efficace, ce qui peut rendre nécessaire une autre contraception, selon l’antiépileptique utilisé. Il est d’autre part nécessaire de préparer une grossesse par l’équilibre thérapeutique et la prescription de 5 mg d’acide folique dans les mois précédant la conception.

VIH et contraception

Les préservatifs sont bien sûr la base de la contraception et essentiels pour la protection antivirale même si la charge virale est basse, mais le préservatif a un taux d’échec contraceptif (Indice de Pearl : 5) qui rend raisonnable l’association à une autre méthode contraceptive. L’association n’est pas sans danger car :

- le virus augmente le risque infectieux par immunodépression chez les porteuses de DIU et le risque vasculaire d’hypertension artérielle pulmonaire et de vascularite sous EP [3] ;

- les traitements antiviraux posent également des problèmes avec pour certains d’entre eux augmentation des triglycérides et du cholestérol, de la résistance à l’insuline, des risques de diabète, d’infarctus du myocarde et d’hypertension artérielle liée aux inhibiteurs de la reverse transcriptase ou de certains inhibiteurs des protéases ;

- il y a, enfin, des interactions médicamenteuses avec la contraception hormonale entre inhibiteurs de protéases et EP, responsables d’abaissement ou d’élévation des taux d’EP plasmatiques et parfois une augmentation du risque thromboembolique avec efavirenz ou indinavir. Le DIU est intéressant mais le risque infectieux est réel, fonction du taux de CD4, et la prescription d’un EP nécessite de tout savoir sur la maladie en cours, ses traitements, l’état général et de prendre l’avis de l’infectiologue. L’impact des progestatifs extra-digestifs (implant, injectable) paraît moindre.

Conclusion simple 

Sachons ouvrir le Vidal pour consulter le chapitre des "interactions médicamenteuses" !

Pr Quéreux et Dr Maurice : pas de conflit d’intérêt déclaré.

1] Quéreux C, Thiriaux A, Bednarek N.  Dépistage de l’épilepsie chez la femme avant la grossesse et suivi au cours de la grossesse. Quotidien Médecin 10.09.2004, n° 7587.

[2] Thorneycroft I, Klein P, Simon J. The impact of antiepileptic drug therapy on steroidal contraceptive efficacy. Epilepsy Behav 2 006 ; 9 h 31-9.

3] Bricaire C, Plu-Bureau G. Les contraceptions difficiles. Rev Prat2 008 ; 126 : 13-20.

Pr CHRISTIAN QUÉREUX Dr ODILE MAURICE Institut Mère enfant Alix de Champagne CHU 51092 Reims CEDEX

Source : Le Quotidien du Médecin: 8730