La résistance à l'artémisinine, le principal médicament utilisé actuellement pour traiter le paludisme à Plasmodium falciparum est pour le moment confinée en Asie du Sud-Est et n’a pas atteint l’Afrique subsaharienne. La première cartographie mondiale en la matière le confirme.
« Cette cartographie établie par l’étude KARMA est une des avancées de santé publique majeures tant attendues pour combattre le paludisme », s'enthousiasme Didier Ménard, responsable de l’unité d’Épidémiologie moléculaire du paludisme à l’Institut Pasteur du Cambodge qui a participé activement au projet. Soutenu par l'Organisation mondiale de la santé, KARMA (K13 Artemisinin Resistance Multicenter Assessment Consortium – Consortium pour l’évaluation multicentrique de la résistance à l’artémisinine K13) s’appuie sur une découverte effectuée en 2014 par son laboratoire avec le département des Parasites et insectes vecteurs de l’Institut Pasteur : l’identification du gène K13 comme déterminant majeur de la résistance de Plasmodium falciparum à l’artémisinine.
L'étude KARMA a ainsi été dirigée par l'Institut Pasteur et conduite, avec 41 partenaires internationaux, de mai à décembre 2014, pour étudier le polymorphisme du gène K13 sur 14 037 échantillons sanguins de patients infectés par P. Falciparum, provenant de 59 pays endémiques (72 % d’Afrique, 19 % d’Asie, 8 % d’Amérique latine et 1 % d’Océanie).
70 nouvelles mutations identifiées
Résultats : alors que 103 mutations de la protéine K13 étaient déjà connues, l’étude KARMA a permis d’en identifier 70 nouvelles. Sur l'ensemble, 9 de ces mutations confèrent une résistance à l’artémisinine que l'on retrouve essentiellement dans deux régions distinctes d'Asie : d'une part aux Cambodge, Vietnam, Laos et d'autre part dans une région incluant l'ouest de la Thaïlande, le Myanmar et une partie du sud de la Chine. « Seul un faible nombre de mutations est associé à la résistance, ce qui devrait faciliter la surveillance de la résistance à l’artémisinine au niveau mondial », rassure Odile Mercereau-Puijalon, du département des Parasites et insectes vecteurs de l’Institut Pasteur de Paris. En effet, l’étude KARMA révèle que la mutation la plus fréquemment observée en Afrique (A578S) n’est pas associée à la résistance. « Des études antérieures ont mis en lumière l’émergence de cette mutation en Afrique. Nous allons plus loin en observant que cette mutation ne s’étend pas et en démontrant qu’elle ne confère pas de résistance à l’artémisinine aux parasites. »
Les résultats de l’étude KARMA sont d’autant plus importants que les parasites résistants à la chloroquine, première génération de molécules utilisée contre le paludisme, ont d’abord émergé en Asie du Sud-Est, à la fin des années 1960. Mais faute de marqueurs moléculaires pour détecter cette résistance, la propagation de ces parasites en Afrique a entraîné des millions de morts. « Grâce aux marqueurs moléculaires, nous avons désormais la possibilité de tracer la résistance aux antipaludiques à l’échelle mondiale et quasiment en temps réel », ajoute Didier Ménard. « Nous devons impérativement utiliser cette technologie pour prendre le parasite de vitesse et empêcher ce scénario tragique de se reproduire en Afrique. » Selon les dernières estimations de l’OMS, 214 millions de cas de paludisme, dont 438 000 mortels, ont été constatés en 2015, principalement en Afrique subsaharienne.
Vers un plan Maladies rénales ? Le think tank UC2m met en avant le dépistage précoce
La prescription d’antibiotiques en ville se stabilise
Le Parlement adopte une loi sur le repérage des troubles du neurodéveloppement
Chirurgie : les protocoles de lutte contre l’antibiorésistance restent mal appliqués, regrette l’Académie