Fumer pendant ou (dans une moindre mesure) avant une grossesse entraîne des modifications épigénétiques (méthylation de l’ADN) qui pourraient avoir des conséquences sur le développement du fœtus et la santé future de l’enfant. C’est ce qui ressort d’une étude menée au sein de l’Institut pour l’avancée des biosciences (INSERM, CNRS, université de Grenoble), publiée dans « BMC Medicine ».
« Beaucoup d’études se sont intéressées aux effets d’une exposition environnementale (dont le tabagisme) sur le placenta et sur les évènements de santé de l’enfant, mais les mécanismes moléculaires impliqués sont encore mal compris », met en contexte, pour « Le Quotidien », la Dr Johanna Lepeule, épidémiologiste à l'INSERM et auteure principale de l’étude.
Une majeure partie des altérations est réversible
Afin de mieux comprendre ce qui se joue, l’équipe de chercheurs a analysé des échantillons d’ADN placentaire de 568 femmes, issues de la cohorte EDEN, qui a suivi 2 002 femmes enceintes de 2002 à 2006. Parmi les femmes participantes (âge médian de 29 ans), 381 (67,1 %) étaient non-fumeuses, 117 (20,6 %) fumaient, et 70 (12,3 %) étaient d'anciennes fumeuses (arrêt du tabac dans les trois mois avant la grossesse). « Les prélèvements effectués lors des accouchements ont été congelés jusqu’à ce que les évolutions techniques permettent leur analyse », raconte Johanna Lepeule.
L’analyse des échantillons a révélé une altération de la méthylation de l’ADN placentaire liée au tabagisme. Chez les fumeuses, des altérations ont été observées dans 178 régions du génome placentaire. Chez les anciennes fumeuses, 26 régions présentaient des altérations, suggérant que le placenta conserverait une « mémoire épigénétique » de l'exposition au tabac. Malgré cette mémoire du tabagisme, « ces altérations sont en grande partie réversible chez les anciennes fumeuses, insiste la Dr Johanna Lepeule. Les efforts de sevrage ne sont donc pas vains ».
Un suivi des effets sur la santé des enfants
L’étude met également en évidence que les régions altérées correspondaient le plus souvent à des zones dites « enhancers », qui contrôlent à distance l’expression des gènes. Par ailleurs, « le tabac affecte préférentiellement les zones connues pour être impliquées dans le développement du fœtus, souligne l’auteure. Il nous faut maintenant comprendre les conséquences de la persistance des altérations observées ».
Les travaux vont également se poursuivre grâce au suivi des enfants des femmes de la cohorte EDEN (poids à la naissance, développement neuropsychologique et santé respiratoire). « Nous voulons mesurer les effets de long terme sur les enfants exposés au tabagisme maternel pendant la grossesse et/ou la petite enfance, explique Johanna Lepeule. Nous savons déjà que ces enfants ont un risque accru de maladie chronique à l’âge adulte, mais on peine encore à expliquer la survenue tardive de ces effets. »
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