Rangers, fusils à pompe et gilets pare-balles… On ne badine pas avec la sécurité à l'entrée du site de Fontenay-aux-Roses.
Il faut dire que ce site du Commissariat à l'énergie atomique (CEA) Paris-Saclay a longtemps hébergé le principal centre de recherche sur le nucléaire civil et militaire de France, et notamment Zoé, la première pile atomique française. En face de ce morceau d'histoire se dressent les locaux de l'Idmit (Infectious disease models for innovatives therapies). Cette infrastructure, inaugurée en juin dernier, est dédiée à la recherche préclinique. Elle a notamment pour but d'étudier les mécanismes cellulaires impliqués dans les infections et la réponse immunitaire, et de développer de nouveaux modèles animaux.
Les chercheurs travaillent ici, par exemple, sur un primate modèle de la physiopathologie de la polyartrites rhumatoïde, ou des singes verts ayant développé « un mécanisme de protection vis-à-vis des virus stockés dans leurs follicules lymphatiques », illustre Michaela Muller-Trutwin, responsable de l’unité VIH à l’Institut Pasteur. De tels animaux « peuvent mobiliser des cellules immunitaires précises, les cellules NK, dans ces follicules et contrôler la réplication du virus. C'est un nouveau concept qui peut aussi intéresser la recherche en cancérologie. »
Dans la polyarthrite rhumatoïde et la sclérose en plaque, le Pr Xavier Mariette, chef du service de rhumatologie de l'hôpital Bicètre (AP-HP) compte sur le modèle de singe pour tester des biomédicaments. « Ces animaux ont été immunisés avec un antigène de la sclérose en plaque : la MOG, détaille-t-il. On a récemment découvert que certains singes partageaient le même épitope HLA qui prédispose à la maladie chez l'homme. » Le but de ces travaux ? « Supprimer l'activation spécifique du système immunitaire à l'origine de la réaction auto immune », précise le Pr Martrette.
« Dans 95 % des cas les chercheurs travaillent sur le macaque cynomolgus, ou singe à longue queue », complète Raphaël Ho Tsong Fang, vétérinaire et chef du laboratoire de développement technologique « science et bien-être de l'animal ». Ces animaux sont particulièrement utiles dans l'étude de la réponse immunitaire aux pathogènes infectieux. Des macaques Rhésus, modèle historique de la recherche sur le VIH, ainsi que quelques babouins peuplent également la ménagerie.
Technologies de pointe en milieu confiné
Pourquoi ces chercheurs s'intéressent-ils à ce centre ? Parce que l'Idmit offre la possibilité d'étudier, sur des animaux vivants dans une enceinte sécurisée de niveau 3 (P3), la dynamique des infections provoquées par des agents pathogènes particulièrement dangereux (VIH, Virus de l'hépathite E, etc.). Et ce avec des outils technologiques puissants : TEP-TDM et microscope biphotonique. En temps normal, seuls des échantillons inactivés sont autorisés à sortir de tels laboratoires sécurisés pour être analysés avec de tels outils.
Installer une caméra TEP ou un microscope bi photonique dans un environnement P3 était un défi. Les instruments sont en effet vulnérables aux produits employés pour la décontamination. Pour le microscope, l'astuce a consisté à séparer le microscope proprement dit de la source du laser. Cette dernière, particulièrement fragile, demeure à l'extérieur de la zone confinée. Seuls deux microscopes biphotoniques dans le monde sont capables d'étudier des primates non humains vivants. Le premier, installé à Singapour, est configuré pour l'observation des yeux et de la tête (les singes y sont installés en position assise), tandis que le second, à Fontenay-aux-Roses, se concentre sur l'étude des ganglions, de la peau et du cou (avec des animaux allongés).
De l'autre côté du mur, une vaste pièce abrite le TEP Scan, barrée en son milieu par un mur de plexiglas qui marque la frontière entre la partie confinée, réservée aux chercheurs, et la zone ou des techniciens peuvent inspecter et régler le matériel. L'animal, transporté dans un caisson mobile de confinement, est quant à lui isolé de la couronne de détecteurs par un tube de plexiglas.
L'apport du cyclotron
Dans quelques mois, un cyclotron entrera en fonction dans le bâtiment voisin de l'Idmit. Il fournira les radios marqueurs nécessaires aux biologistes. « En temps normal, les chercheurs sont limités dans la gamme de radiotraceurs disponibles : la distance entre leur site de production et leur laboratoire n'autorise que l'utilisation de marqueur à la demi-vie relativement longue comme le F18 », explique le Dr Anne Flüry-Hérard, directrice du centre CEA de Fontenay-aux-Roses et experte dans les domaines de l'imagerie et de la radioprotection. À l'Idmit, la proximité de l'accélérateur de particule autorise l'emploi de radiotraceurs ayant une demi-vie de 20 minutes pour une imagerie médicale plus ciblée.
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