Après avoir reçu le 10 juin le feu vert de l'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM), l'institut Pasteur de Lille a lancé l'essai clinique en double aveugle contre placebo d'un potentiel traitement du SARS-CoV-2 qui doit impliquer plus de 40 médecins généralistes.
L'essai clinique Thérapide vise à vérifier l'intérêt thérapeutique contre le Covid-19 à un stade précoce du Clofoctol, une molécule commercialisée en Europe dans une autre indication. Particularité de cet essai : il se déroule uniquement en ville et via des médecins généralistes. Les tests in vitro et l’utilisation de modèles précliniques ont montré l’efficacité de cette molécule pour inhiber la réplication du virus, explique l'IPL.
Bouffée d'oxygène ?
26 médecins ont déjà répondu à l'appel de l'Institut Pasteur de Lille, transmis par l'URPS-ML, précise le Dr Marc Bayen, généraliste près de Douai et président de CNGE Formation. Les premiers s'apprêtent à inclure des patients à Château-Thierry puis à Lille, Senlis et Maubeuge. Le recrutement de médecins investigateurs se poursuit* pour accroître leur nombre et les sites concernés dans les Hauts-de-France, souligne Benoit Déprez, directeur scientifique de l'IPL, qui pilote cet essai.
Pour le Dr Marc Bayen, « c'est un projet qui a du sens car ce médicament, s'il fonctionne, permettra de proposer un traitement à tout le monde. Ce serait une bouffée d'oxygène, en plus de la vaccination ». L'essai clinique doit porter, d'ici à la fin 2021, sur 692 patients avec un arrêt possible à 346 recrutés.
Éligibilité
Grâce au partenariat avec deux laboratoires d'analyses, les patients dont le test PCR est positif – et qui résident près d'un des médecins investigateurs – reçoivent un SMS les informant qu'ils sont potentiellement éligibles à cet essai clinique et les invitant à faire acte de candidature par téléphone ou via un site web.
Les critères d’inclusion sont définis dans le protocole de l’essai qui a été validé par le CPP et l’ANSM, à savoir : un test positif récent, avoir plus de 50 ans, avoir au moins un symptôme et ne pas avoir été vacciné. Le centre d'appel vérifie leur éligibilité et, le cas échéant, les « apparie » avec le médecin investigateur le plus proche (le médecin traitant est également prévenu de la proposition d'inclusion dans l'essai). « Le médecin investigateur est alerté qu'un patient est recruté, explique Benoit Déprez. Il se rend chez lui et lui présente l'étude, lui fait signer le consentement. Ensuite, il peut utiliser le service IVRS [permettant l’attribution de traitements selon un processus de randomisation d'une étude clinique] qui va attribuer au patient le médicament ou le placebo de manière aléatoire. »
Suppositoire deux fois par jour pendant cinq jours
Le médecin réalise aussi ce jour-là un premier examen clinique et un prélèvement naso-pharyngé. Le soir même, le patient prend la première dose puis une dose matin et soir pendant cinq jours (sous la forme de suppositoire). L'essai commence ainsi dans les 48 heures après le diagnostic.
Après cette première visite à J0, le médecin investigateur contacte chaque jour le patient par téléphone, effectue une nouvelle visite à domicile à J3 (avec nouveau prélèvement) et à J7 (prélèvement non obligatoire). Le suivi téléphonique quotidien se poursuit jusqu'à J22. Le patient dispose d'un oxymètre pour mesurer la saturation du sang tous les jours.
Label « priorité nationale de recherche »
Les généralistes intéressés (mais non habitués à la recherche clinique) se verront proposer « une formation aux bonnes pratiques de recherche clinique sous la forme d'un serious game » élaboré par le CNGE Formation, explique le Dr Bayen. Ils seront formés au déroulé de l'étude et à l'outil informatique de recueil des données de l'essai, en e-learning. Après validation de ce parcours de formation, ils signent le protocole de l'essai et bénéficient d'un frigo spécial pour stocker les suppositoires, avant les premières notifications d'inclusion.
L'essai clinique a obtenu en avril le label « Priorité nationale de recherche » du comité ad hoc de pilotage national des essais thérapeutiques (Capnet).
*Les médecins généralistes souhaitant participer à l'essai peuvent se manifester auprès de l'équipe Thérapide par mail à medecin.therapide@pasteur-lille.fr
Guyane : circulation silencieuse du poliovirus, la couverture vaccinale insuffisante
La néphroprotection intrinsèque aux analogues de GLP-1 clarifiée
Choléra dans le monde : moins de cas, plus de décès et pénurie de vaccins, une situation « profondément préoccupante » pour l’OMS
Traitement de la dépendance aux opioïdes : une meilleure observance pour la méthadone