« De nombreuses morts à la naissance sont invisibles car elles ne sont pas enregistrées », relève le Dr Flavia Bustreo, sous-directeur général de l’OMS chargée de la santé familiale. Avec les chiffres de la série spéciale publiée en ligne ce jeudi par « The Lancet »*, la mortinatalité ne devrait plus être « un problème négligé » comme c’est le cas actuellement : en 2009, ce sont 2,6 millions d’enfants mort-nés qui ont été recensés, soit plus de 7 200 mortinaissances par jour. Et peu de progrès ont été accomplis puisque la baisse par rapport à 1995 n’est que de 1,1 %. Elle « est encore plus lente que la réduction de la mortalité de la mère et de l’enfant au cours de la même période », souligne l’OMS.
Presque toutes ces mortinaissances (98 %) surviennent dans des pays à revenu faible ou moyen. Et les deux tiers ont lieu dans 10 pays : Inde, Pakistan, Nigeria, Chine, Bangladesh, République démocratique du Congo, Éthiopie, Indonésie, Afghanistan et Tanzanie. Le Pakistan détient avec 47 le triste record du taux pour 1 000 naissances, suivi du Nigéria (42), du Bangladesh (36) de Djibouti et du Sénégal (34). En Inde, les taux varient selon les États de 20 à 66.
La France mal placée.
Mais si la Finlande et Singapour ont le taux le plus bas (2 pour 1 000 naissances), les pays à revenu élevé ne sont pas épargnés, avec un enfant mort-né sur 320 naissances. Et parmi ces pays, c’est la France qui, avec 3,9 pour 1 000, est la plus mal placée, derrière 40 autres pays, dont l’Allemagne (2,4), l’Italie (2,7), les États-Unis (3), l’Espagne (3,2), le Royaume-Uni (3,5). Selon l’étude de Vicki Flenady, le nombre de mort-nés à partir de 28 semaines de grossesse est bien supérieur à celui des morts inattendues du nourrisson et sont pourtant moins prises en considération dans les programmes de prévention et de recherche.
Sur la totalité des mortinaissances, la moitié ont lieu au moment du travail et sont liées au manque de soins qualifiés. Les deux tiers surviennent en milieu rural, où il n’existe pas toujours de personnel ad hoc. Derrière les complications lors de l’accouchement, les quatre autres causes principales de mortinaissance sont les infections de la mère pendant la grossesse, les pathologies telles que l’hypertension ou le diabète chez la mère, le retard de croissance intra-utérin et les anomalies congénitales.
Plus d’un million de décès évitables.
Selon les études du « Lancet », le meilleur moyen de lutter contre ce problème est de renforcer les programmes de santé de la mère, du nouveau-né et de l’enfant qui existent déjà. D’après une analyse à laquelle a contribué l’OMS, 1,1 million de mortinaissances seraient évitables avec une couverture universelle pour les soins obstétricaux d’urgence complets (696 000 morts évités), le dépistage et le traitement de la syphilis (136 000), le dépistage et le traitement du retard de croissance intra-utérine (107 000), le dépistage et le traitement de l’hypertension gravidique (57 000), le repérage et l’information des mères ayant dépassé 41 semaines de gestation (52 000), la prévention du paludisme (35 000), la supplémentation en acide folique avant la conception (27 000) et le dépistage et le traitement du diabète pendant la grossesse (24 000). Dans les pays à hauts revenus, les priorités de la prévention sont l’obésité et le tabagisme maternels ainsi qu’un âge tardif à la maternité (après 35 ans).
Lutter contre la mortinatalité, c’est aussi protéger les mères qui, dans certaines régions du monde, sont encore tenues pour responsables de la mort d’un enfant et qui, partout, avec cette expérience vécue comme un échec, peuvent souffrir de dépression, d’anxiété, de stress post-traumatique.
Les auteurs du « Lancet » fixent des objectifs ambitieux pour 2020, auxquels souscrit l’OMS : pour les pays avec un taux supérieur à 5 pour 1 000, une réduction de 50 % ; pour les autres, l’élimination de tous les décès évitables.
* Série « Stillbirth », avec six articles scientifiques, 2 comptes-rendus de recherche et 8 commentaires, auxquels ont collaboré 69 auteurs de 18 pays, réalisée avec l’OMS et de l’Institut norvégien de santé publique : www.thelancet.com/series/stillbirth.
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