L'incidence du cancer de la thyroïde a beaucoup augmenté partout dans le monde, y compris en France, est-il indiqué dans le dernier « Bulletin épidémiologique hebdomadaire » (« BEH ») consacré au cancer de la thyroïde dans le contexte du 30e anniversaire de l'accident nucléaire de Tchernobyl.
L'exposition aux rayonnements ionisants durant l'enfance, qu'ils soient externes (rayons X ou gamma) ou internes (incorporation d'iode 131 par ingestion ou inhalation) reste aujourd'hui le principal facteur de risque connu de ce cancer. Si l'exposition estimée en France est « de l'ordre de 100 fois inférieure » par rapport aux territoires contaminés, « les retombées de l'accident nucléaire de Tchernobyl ont suscité beaucoup d'inquiétudes en France et en Europe », souligne le « BEH ».
L'amélioration des pratiques diagnostiques sur la sellette
Cependant, pour les épidémiologistes de l'Institut de veille sanitaire (InVS) et les chercheurs de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), les retombées radioactives de l'accident nucléaire ne sont pas la cause principale de la hausse d'incidence. Celle-ci serait principalement due à « l'amélioration des pratiques diagnostiques », expliquent-ils en ajoutant que « certains auteurs considèrent même qu'elle conduit à un important surdiagnostic ».
L'équipe dirigée par Agnès Rogel note que l'augmentation de l'ensemble des cancers thyroïdiens se fait aux dépens « de l'augmentation des cancers de petites tailles (microcancers papillaires, c'est-à-dire inférieurs à 10 mm) et de stade précoce qui, en général, n'évoluent pas vers une expression clinique ». D'après les données des registres des cancers, l'équipe de Marc Colonna précise que le phénomène concerne surtout les cancers papillaires, avec « un taux annuel moyen d'augmentation dépassant les 6 % » sur la période 1982-2012.
Pas de gradient géographique pour la thyroïde
Les variations géographiques sont importantes sur le territoire, sans qu'il soit possible « de conclure à un gradient géographique particulier » cohérent avec celui des retombées radioactives. Trois départements ont une incidence élevée (Isère, Gironde et Vendée) et trois autres une faible incidence (Bas-Rhin, Haut-Rhin et Manche).
Ces dernières données épidémiologiques ne sont pas superposables à la contamination des sols par un autre radioactif, le césium 137, mesuré par la Commission de recherche et d'information indépendantes sur la radioactivité (CRIIAD). Selon cette association de citoyens qui a mis en faux le discours officiel trop rassurant tenu dans les suites immédiates de l'accident, les retombées entre 1987 et 1993 étaient le plus élevées (> 30 000 Bq/m2) en Alsace, dans le Jura, les Alpes-de-Haute-Provence ou encore la Corse.
Le CRIIAD alerte, les autorités réagissent
Selon le CRIIAD, les derniers carottages de sol en 2014 et 2015 en Alsace et en Rhône-Alpes retrouvent une forte contamination du sol (> 10 000 Bq/m2) sur de nombreux sites. Pour le collectif, ces observations faites « à 1 900 km de Tchernobyl, et 30 ans après » doivent interpeller « les autorités internationales, européennes et nationales », dont l'action menée jusqu'à présent « n'est pas au bénéfice des populations ».
De leur côté, « dans l'éventualité d'un accident en Europe », François Bourdillon, directeur général de l'InVS et Jacques Repussard, directeur général de l'IRSN, expliquent dans l'éditorial du « BEH » vouloir « définir une stratégie d'intervention », la première étape étant « de disposer d'une estimation fiable de l'exposition réelle à l'iode radioactif ». Les deux agences affirment « collaborer activement » à la mise en place de recommandations pour le suivi médical et sanitaire des populations affectées par un accident nucléaire dans le cadre du programme de recherche Shamisen financé par l'Union européenne.
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