À Mayotte, les niveaux déclarés de consommation de substances psychoactives (tabac, alcool et cannabis) sont globalement nettement plus faibles qu’en métropole, selon l’enquête « Unono Wa Maore », menée en 2019 par Santé publique France (SPF). Mais, comme en métropole, les hommes sont plus souvent consommateurs que les femmes, leur tabagisme étant équivalent à celui des métropolitains.
Réalisé auprès de 4 770 personnes âgées de 15 à 69 ans, ce travail a permis de fournir des « données de référence » sur les consommations de ce territoire d’un peu plus de 250 000 habitants (données de 2017), aux caractéristiques sociodémographiques « atypiques » avec notamment une espérance de vie plus courte qu’en métropole (inférieure de 9 ans pour les femmes et de 5 ans pour les hommes, en 2016), souligne SPF.
Concernant l’alcool, seuls 26 % des 18-69 ans interrogés ont déclaré en avoir déjà consommé (14 % déclarent une consommation dans l’année), contre 95 % des métropolitains âgés de 18-75 ans (85 % dans l’année) en 2017. Chez les mineurs (15-17 ans), 8 % déclarent avoir déjà expérimenté l’alcool (3 % dans l’année), contre 85 % des lycéens métropolitains en 2018. De fortes disparités sont relevées selon le genre : « 42 % des hommes avaient expérimenté l’alcool et 24 % en avaient consommé dans l’année contre respectivement 12 % et 5 % des femmes », est-il indiqué.
Un taux de tentative d’arrêt du tabac supérieur à celui observé en métropole
Cette disparité se retrouve dans le tabagisme quotidien. Sa prévalence s’établit à 21 % parmi les hommes et 2 % parmi les femmes et se situe à 4 % chez les mineurs. Le tabagisme masculin est ainsi proche des niveaux observés en métropole où 24 % des adultes étaient des fumeurs quotidiens en 2019. Cependant, le taux de tentative d’arrêt au cours des 12 derniers mois est supérieur à celui observé en métropole (40 % contre 33,3 % en 2019).
S’agissant du cannabis, la part des adultes ayant expérimenté le cannabis était de 11 % des hommes et 1 % des femmes (3 % des hommes et moins de 1 % des femmes déclarent une consommation dans l’année). Chez les mineurs, 5 % des garçons et 1 % des filles ont déjà expérimenté le cannabis (2 % et 1 % dans l’année). L’île est par ailleurs confrontée à la circulation d’un cannabinoïde de synthèse, « qui s’est brusquement répandu dans les années 2015-2016 », souligne SPF. Selon l’enquête, moins de 5 % des hommes et moins de 1 % des femmes de 15-69 ans ont déclaré avoir expérimenté cette substance.
Quelle que soit la consommation envisagée, « la part de consommateurs est nettement supérieure parmi les adultes nés en métropole », relèvent les auteurs. Et concernant l’alcool, ceux se considérant en situation financière difficile avaient une probabilité plus grande d'en avoir consommé.
Pour expliquer ces niveaux d’usage « nettement inférieurs » à ceux observés en métropole, SPF rappelle le contexte religieux de Mayotte, où la religion musulmane est majoritaire. Ce facteur peut influencer les comportements de consommation, mais aussi les déclarations des enquêtés, « du fait du fort biais de désirabilité sociale induit » (tendance à vouloir se présenter sous un jour favorable). Ce biais a par ailleurs pu être renforcé par le dispositif de l’enquête, les entretiens pouvant se dérouler en présence d’autres membres du foyer, et pour les mineurs, en présence des parents.
Une autre explication aux faibles niveaux de consommation peut relever d’une accessibilité plus faible aux produits, en raison d’un faible pouvoir d’achat et de prix élevés. Selon l’Insee, en 2015, les boissons alcoolisées et le tabac coûtaient en moyenne 64 % plus cher qu’en métropole.
Des inconnues sur les plus vulnérables
Malgré ces moindres consommations, « des efforts de prévention restent cependant indispensables sur ce territoire », estime SPF, citant le tabagisme masculin, « probablement » un déterminant très important de la santé des habitants de Mayotte.
Une attention particulière est également à porter aux populations très vulnérables, telles que les mineurs isolés, les sans-domicile, les personnes vivant dans une grande précarité ou dans des zones d’accès difficile. Ces populations n’ont pas été couvertes par l’enquête, mais « pourraient avoir des comportements plus à risque, notamment concernant les consommations de substances psychoactives comme l’alcool ou les drogues illicites », est-il souligné.
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