« NOUS SOMMES dans une nouvelle démarche qui va à l’encontre de l’enfermement à tout prix et à outrance », assurait Nora Berra la semaine dernière lors de l’examen à l’Assemblée du projet de loi qui réforme l’hospitalisation d’office. Tandis que les députés s’apprêtent demain à entériner ce texte (avant un passage au Sénat), Jean-Marie Delarue, Contrôleur général des lieux de privation de liberté (CGLPL) met en exergue les excès entourant actuellement l’hospitalisation sous contrainte.
Dans un avis publié dimanche au « Journal Officiel », le Contrôleur rappelle qu’en tant que mesure privative de liberté, l’hospitalisation d’office ne peut être maintenue que si deux conditions sont réunies, à savoir « qu’une menace grave à l’ordre public soit établie » et « que des soins tels que ceux dispensés à l’hôpital soient nécessaires ». Le respect de ce postulat semble aujourd’hui loin de constituer un préalable. « Les craintes d’atteintes à l’ordre public rendent, dans un nombre croissant de départements, l’obtention des sorties d’essai plus difficiles et les mains-levées de mesures d’hospitalisation d’office plus aléatoires », constate le CGLPL. En effet, poursuit Jean-Marie Delarue, « il est implicitement mais nécessairement considéré par les autorités qui ont à accorder l’autorisation de sortie » qu’au moment de la demande, « le patient demeure aussi dangereux pour lui-même ou pour autrui qu’au jour de l’hospitalisation ». Or, une telle posture est difficilement justifiable : « Seuls des faits actuels devraient pouvoir être pris en considération. Le rappel des faits passés ayant conduit à l’hospitalisation ne saurait établir la réalité de tels motifs ». Ces postures ont pour conséquence « d’accroître le nombre de patients hospitalisés et la durée de leur séjour », de « faire obstacle à des sorties d’essai que l’état des patients permettrait » et de « maintenir à l’hôpital des personnes dont l’état, attesté par les médecins, ne justifie pas qu’elles y soient maintenues contre leur gré ». Jean-Marie Delarue s’inquiète également de la sécurisation croissante constatée au sein de nombreuses unités psychiatriques. « Il y a lieu de s’interroger sur cette manière de faire », écrit-il. D’autant que « la mise sous clé des unités, donc des personnes, a pour effet de mettre dans des conditions identiques des malades entrés sous le régime de l’hospitalisation d’office et des patients présents comme hospitalisés dits libres, c’est-à-dire étant venus à l’hôpital avec leur consentement ».
Peur du détenu.
S’agissant de l’hospitalisation d’office des personnes incarcérées, le CGLPL remarque que par crainte d’évasion (non justifiée), les autorités compliquent sensiblement ce type d’admission hospitalière. De plus, le placement systématique des détenus hospitalisés en chambre d’isolement, et ce quel que soit son état de santé et durant toute la durée de son hospitalisation, est pointé du doigt. Cet état de fait compromet grandement la santé du détenu malade en lui interdisant l’accès aux thérapies collectives. « Elle provoque fréquemment, du fait même des contraintes imposées au malade, la demande de ce dernier de réintégrer au plus vite l’établissement pénitentiaire d’où il provient », ajoute le CGLPL.
Enfin, les droits de recours des patients hospitalisés d’office sont loin d’être garantis en pratique. « La direction et le corps médical des établissements doivent être particulièrement vigilants sur la faculté donnée aux personnes qui sont hospitalisées d’office de contester devant le juge compétent la mesure dont elles font l’objet », souligne Jean-Marie Delarue. « Si l’on est en droit d’exiger des praticiens de donner des assurances d’ordre médical, on est aussi en droit d’attendre des autorités qu’elles établissent le risque qu’elles invoquent pour justifier la poursuite d’une privation de liberté. Dans ces conflits entre praticiens, malades, autorités et protection des tiers, l’autorité judiciaire doit jouer davantage son rôle », conclut le Contrôleur général des lieux de privation et de liberté.
Vers un plan Maladies rénales ? Le think tank UC2m met en avant le dépistage précoce
La prescription d’antibiotiques en ville se stabilise
Le Parlement adopte une loi sur le repérage des troubles du neurodéveloppement
Chirurgie : les protocoles de lutte contre l’antibiorésistance restent mal appliqués, regrette l’Académie