C'est une problématique rarement abordée, mais de plus en plus d'aidants accompagnant les patients Alzheimer sont désormais des aidants dits « actifs », devant jongler entre une vie professionnelle et la gestion au jour le jour d'un malade. « Huit aidants actifs sur 10 rencontrent des difficultés et sont obligés de déposer des jours de congés, et 17 % ont dû réduire leur temps de travail », détaille le président de France Alzheimer, Joël Jaouen, au moment de remettre un livre blanc sur ce sujet à la secrétaire d'État chargée des personnes âgées et de l'autonomie, Pascale Boistard.
Dévoilé à l'occasion de la journée mondiale Alzheimer, le livre blanc dresse le constat de l'invisibilité de la souffrance des aidants actifs, dont 2 % seulement indiquent avoir informé leur hiérarchie de leurs statuts, alors même que 90 % déclarent ressentir d'avantage de stress et de fatigue, et que 72 % signalent que le rôle d'aidant à un impact négatif sur leur concentration au travail.
4 millions d'aidants actifs en France
Bien qu'invisible, la problématique prend de l'ampleur. Les données de l'enquête Handicap-Santé publiée en 2008 par la direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES), évaluent que sur 8,3 millions d'aidants, environ 4 millions occupent encore un emploi. Les femmes sont particulièrement exposées puisque subissant « une double peine », dénonce Joël Jaouen : « Celle de la maladie et celle de la discrimination au travail. »
« De plus en plus d'aidants ont une activité professionnelle », explique Pauline De Charry, du service de suivi des politiques publiques de France Alzheimer qui a dirigé la rédaction du livre blanc. « Cette augmentation est liée à plusieurs facteurs, comme la participation accrue des femmes au monde du travail, le recul du départ à la retraite et le nombre croissant de malades jeunes », ajoute-t-elle.
« D'une manière générale, les aidants actifs éprouvent de grandes difficultés à accompagner les patients en consultation, reconnaît pour sa part le Dr Aurore Laumond-Burlaud, du service d'hospitalisation de jour en gérontologie de l'hôpital Paul Brousse (AP-HP). Ils ont également du mal à rencontrer l'assistance sociale et il leur est très compliqué de poser des jours de congé pour mettre en place une aide à domicile. Il y a des patients qui restent tous seuls, enfermés à domicile. »
Les progrès encore insuffisants des deux premiers plans
Au cours des deux premiers plans alzheimer (2001-2005 puis 2004-2007), des dispositifs ont été mis en place pour favoriser les répits, sous la forme d'accueil de jours et d'hébergement temporaire dans les EHPAD. « Ces places sont en nombre insuffisant, mal réparties, et avec un reste à charge de l'ordre de 30 euros par jour auxquels doivent se rajouter des frais de transport pas toujours pris en charge », précise Pauline De Charry.
Le nouveau plan maladies neurovégétatives prévoit la création de 65 nouvelles plateformes d’accompagnement et de répit (6,5 millions d'euros y seront consacrés), et une extension de leur mission aux accompagnants de malades atteints de la maladie de Parkinson ou de la sclérose en plaque, mais pas de création de nouvelles places d'hébergement temporaire.
Depuis le vote de la loi relative à l'adaptation de la société au vieillissement, les aidants peuvent bénéficier d'une aide ponctuelle pour le répit de l’aidant de 500 euros par an, et de 992,77 euros par an en cas d'hospitalisation de l'aidant, au-delà des plafonds de l’allocation personnalisée d'autonomie (APA). Une aide qualifiée d'« obole » par Joël Jaouen. « Face aux problèmes d'organisation, les aidants actifs ont du mal à trouver des places », et à profiter de cette aide, selon Pauline De Charry. Il existe aussi un frein psychologique pour les aidants qui hésitent à faire la démarche de confier un malade à un EHPAD.
13 propositions
Le livre blanc contient 13 propositions, dont la prise en compte du temps d'accompagnement dans le calcul de la retraite, la mise en place de campagnes d'information sur les droits des aidants, la possibilité de rémunération de l'aidant par l'APA, quel que soit le lien de parenté et la formalisation d'accords d'entreprise ou de branche, pour faciliter la mise en place de mesures de conciliation.
« Nous proposons aussi que l'aide de l'APA serve à accompagner les offres de séjours de notre fondation, afin que nous proposions du répit gratuit », ajoute Joël Jaouen.
Vers un plan Maladies rénales ? Le think tank UC2m met en avant le dépistage précoce
La prescription d’antibiotiques en ville se stabilise
Le Parlement adopte une loi sur le repérage des troubles du neurodéveloppement
Chirurgie : les protocoles de lutte contre l’antibiorésistance restent mal appliqués, regrette l’Académie