Après Rennes, Marisol Touraine renforce la sécurité des volontaires aux essais

Par
Publié le 23/05/2016
rennes

rennes
Crédit photo : AFP

« L'Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) a respecté la réglementation en place, mais cette réglementation doit être renforcée et précisée. »

Quatre mois après l'accident mortel lors de l'essai BIA 10-2474 mené par Biotrial à Rennes, Marisol Touraine a présenté ce lundi 23 mai les conclusions du rapport définitif de l'Inspection générale des affaires sociales (IGAS) et un plan d'action pour renforcer la sécurité des volontaires participant à des études cliniques en France.

Cette étude clinique avait conduit à la mort d'un volontaire en janvier dernier et à l'hospitalisation de 5 autres. « Le rapport final confirme que les conditions dans lesquelles l'essai a été autorisé ne contreviennent pas à la réglementation dans son état actuel, même si des interrogations sont soulevées quant à l'appréciation du niveau de risque du produit par l'ANSM et le Comité de protection des personnes (CPP) », a indiqué la ministre de la Santé.

La responsabilité de Bial et Biotrial confirmée

Cependant, les principaux manquements se sont produits, selon elle, au moment de l'accident et sont attribués à Biotrial, instigateur de l'essai. « La responsabilité du laboratoire Bial (promoteur de l'essai) et de Biotrial est engagée à plusieurs titres », a-t-elle déclaré évoquant la mise en cause du choix des dosages de la molécule administrée et le retard de l'information aux autorités sanitaires. Selon la ministre « cet accident aurait dû être déclaré sans délai à l'ANSM » alors qu'il ne l'a été que 4 jours après l'hospitalisation du premier volontaire et 3 jours après la décision de suspendre l'essai.

Pour l'IGAS, la responsabilité de Biotrial est aussi engagée quant à la conduite de cette étude et la gestion de la crise. Les enquêteurs pointent tout d'abord l'absence de recherche d'informations en temps et en heure par le laboratoire sur l'état de santé du premier volontaire hospitalisé et la non-suspension de l'administration du produit aux autres volontaires.

Ils relèvent en outre que le laboratoire n'a pas formellement informé les autres participants de l'événement, ce qui ne leur a pas permis de confirmer « de manière éclairée » leur consentement à la poursuite de l'essai.

Expertise indépendante des 90 dossiers de volontaires

S'appuyant sur les conclusions de ce rapport et de 19 recommandations formulées par l'IGAS, Marisol Touraine présente un plan d'action en 4 axes. Revenant sur l'accident survenu à Rennes, elle exige premièrement que « Biotrial fournisse un plan d'action garantissant que les manquements majeurs observés ne pourront pas se reproduire ». Si le laboratoire ne transmet pas son plan d'action d'ici un mois, son autorisation de lieu de recherche pour essai de phase un sera suspendue a-t-elle insisté. La mise en œuvre de ce plan sera contrôlée conjointement par L'IGAS, l'ANSM et l'Agence régionale de santé (ARS).

La ministre de la santé a annoncé en second lieu que les 90 dossiers cliniques des volontaires ayant participé à l'essai de Rennes feront l'objet « d'une expertise sanitaire indépendante ». Celle-ci sera confiée au Comité scientifique spécialisé temporaire (CSST) de l'ANSM.

La création d'une structure dédiée au sein de l'ANSM

Le troisième axe de ce plan vise plus généralement à renforcer les conditions d'autorisation des essais et plus particulièrement « les conditions dans lesquelles l'ANSM évalue les essais précoces chez l'homme », a expliqué Marisol Touraine. Celles-ci seront rendues plus strictes. La ministre a annoncé, à cet effet, la création d'une « cellule dédiée aux essais précoces » garantissant la possibilité « d'un contact identifié et permanent » sein de l'ANSM.

La ministre de la Santé a indiqué, pour finir, sa décision de poursuivre son action auprès de la commission européenne pour faire progresser la réglementation en matière de recherche sur le volontaire sain.

« L'action européenne doit porter tant sur la gestion des crises que l'analyse des pratiques, elle doit répondre aux trois principes fondamentaux d'indépendance de transparence et d'harmonisation », a-t-elle avancé. Elle proposera notamment au comité européen des agences nationales du médicament (HMA) la mise en place de modalités harmonisées d'évaluation et de gestion d'un accident grave comme celui de Rennes au niveau européen.

Betty Mamane

Source : lequotidiendumedecin.fr