Au CHU de Brest, les anesthésistes en grève refusent de « faire de l'abattage »

Par
Publié le 10/10/2016
GREVE

GREVE
Crédit photo : S. TOUBON

Le Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes-réanimateurs élargi (SNPHAR-E) est en grève depuis le 6 octobre (le préavis court jusqu'au 13) afin de dénoncer les conditions de travail des anesthésistes au CHU de Brest - Cavale blanche et réclamer surtout l’application stricte de la directive européenne sur le temps de travail. La totalité des praticiens hospitaliers du service d'anesthésie-réanimation du site sont en grève (hors cliniciens), ce qui représente une vingtaine de médecins.

Doté de quatre scanners et trois IRM, la Cavale blanche concentre le gros de l'activité chirurgicale du CHU. L'établissement s'est spécialisé dans la neuroradiologie interventionnelle depuis l'été 2015. Cette forte activité pèse sur les équipes, handicapées par la pénurie médicale. En anesthésie, dix postes sont vacants sur un effectif cible de 32 postes et des médecins intérimaires interviennent tous les jours faute de titulaires en nombre suffisant, souligne le SNPHAR-E. En juin 2016, le CHU avait déjà financé 300 jours d'intérim uniquement dans cette spécialité.

« Les jeunes ne restent pas »

« Notre environnement de travail s'est dégradé depuis déjà plusieurs années, témoigne un anesthésiste-réanimateur mobilisé. Un premier wagon de praticiens est parti à la retraite, les jeunes ne restent pas et notre charge de travail a augmenté de 30 %. C'est devenu très dur. Depuis le début de l'année, le bloc est ouvert de plus en plus tard. Jeudi dernier, on a fini à 23 heures. On ne fait plus du soin, on fait de l'abattage. »

Les anesthésistes du CHU réclament le respect absolu de la directive européenne qui borne le temps de travail à 48 heures hebdomadaires (maximum) pour les salariés européens (les médecins veulent inclure quatre heures de temps non clinique pour des activités d'enseignement ou de recherche). Mais après sept mois de discussions, la direction du CHU a proposé aux anesthésistes une politique de recrutement plus active, la rénovation de leur salle de réveil et le passage en temps continu au 1er janvier 2017 en 48 heures de travail clinique sans valence.

« Cette dernière proposition est inacceptable, commente le Dr Yves Rébufat, président du SNPHAR-E et anesthésiste au CHU de Nantes. La direction se fonde sur la borne la plus haute de la directive européenne et n'envisage pas de rémunérer le temps additionnel des praticiens. On les laisse dans l'enfer de la suractivité sans aucune aide. Je ne vois pas comment l'hôpital va réussir à attirer des jeunes avec une telle politique ! »

La direction ouverte à la discussion

L'organisation en décompte horaire est réclamée par les centrales syndicales dans le cadre du plan attractivité, car elle a l'avantage d'établir une frontière claire au-delà de laquelle les PH peuvent réclamer le paiement des heures supplémentaires.

Joint par « le Quotidien », la direction du CHU estime à l'inverse avoir fait un pas suffisant en direction des anesthésistes. « Nous avons accédé à leur requête de passage au décompte horaire alors qu'il s'agit d'un point délicat à gérer en terme financier, précise le directeur général adjoint Régis Condon. Nous ne pouvons pas leur accorder la semaine de 44 heures ! Mais tant que les anesthésistes nous réclament des mesures réalistes, nous restons ouverts à la discussion. »

Le CHU de Brest sort d'une longue période de déficit. En 2015, l'établissement a terminé l'année en positif, notamment grâce aux trois millions d'aides accordées au titre d'un contrat de retour à l’équilibre. 


Source : lequotidiendumedecin.fr