« Les résultats de l'étude PREVAIL II sur le ZMapp marquent un pas dans la prise en charge de la maladie à virus Ebola », se félicite le Pr Denis Malvy, chercheur INSERM et chef de service des maladies tropicales au CHU de Bordeaux, co-investigateur de cet essai mené en Afrique de l'Ouest et publié dans le « New England Journal of Medicine ».
Si l'essai réalisé en collaboration internationale avec l'INSERM, les National Institutes of Health, les ministères de la Santé de la Guinée, du Liberia et du Sierra Leone n'a pas atteint le niveau de puissance et le seuil de significativité de ses résultats en raison d'un recrutement insuffisant en phase d'épidémie contrôlée, l'étude PREVAIL II n'en est pas moins informative à plus d'un titre.
« Le ZMapp n'a pas démérité, explique le Pr Malvy. Les bénéfices sur le taux de survie de ce traitement expérimental en association au traitement de soin standard se sont avérés plus qu'encourageants par rapport au traitement standard seul. Et c'est tant mieux si l'épidémie s'est terminée avant que l'étude n'ait atteint la puissance nécessaire pour conclure de façon irréfutable et définitive à son efficacité. Il aurait fallu deux fois plus de patients pour y arriver. »
Une étape méthodologique importante
L'essai PREVAIL II a atteint un autre challenge en montrant qu'il est possible de conduire un essai randomisé en situation de crise sanitaire d'urgence. « L'essai Jiki sur le favipiravir avait ouvert la voie en montrant la faisabilité et l'acceptabilité d'un essai réalisé en urgence dans le contexte d'une grande épidémie d'Ebola, explique Denis Malvy, qui avait coordonné cette étude internationale en 2015. Les sites en Guinée étaient préparés grâce à une équipe et des investigateurs qui ont fait un travail formidable au cours de ces deux années et les populations qui nous connaissaient entretenaient au final une rumeur positive à notre égard. C'est une étape méthodologique importante qui est franchie avec la randomisation. Il faut avoir les épaules solides pour passer au tirage au sort ».
La décision de la randomisation n'a pas été facile à prendre, « une tâche peu enviable », écrivent les auteurs qui justifient ce choix « en seconde phase d'épidémie, nous pensions qu'un essai randomisé et contrôlé serait le moyen le plus rapide et incontestable pour faire la preuve de l'absence d'effets secondaires et déterminer si l'effet bénéfique préclinique du ZMapp se traduit en vies sauvées ».
Trois anticorps monoclonaux
Le ZMapp est une association de trois anticorps monoclonaux ciblant une protéine à la surface du virus Ebola. Les chercheurs supposent que ces anticorps administrés au plus tôt diminuent l'expansion de l'agent infectieux et permettent au système immunitaire de produire une réponse efficace dans un délai suffisant.
L'étude lancée en mars 2015 prévoyait initialement d'inclure 200 patients au total, elle n'en a inclus au final que 72 : 5 au Liberia, 12 en Guinée, 54 en Sierra Leone et le premier patient aux États-Unis. L'âge moyen des participants était de 24 ans, un peu plus de la moitié était des femmes. Un terme a été mis à l'étude fin janvier 2016 quand il est devenu évident que l'épidémie était endiguée.
Baisse de la mortalité de 40 %
« L'ensemble des patients ont reçu les supports de soins renforcés qui représentent le socle de la prise en charge au bénéfice des malades, poursuit le Pr Malvy. En Guinée, le support de soins comprenait également le favipiravir, dont nous avions montré précédemment le bénéfice potentiel. » Les patients du groupe ZMapp recevaient en plus trois perfusions consécutives de ZMapp au cours d'une semaine.
Un tiers des patients, soit 21 personnes, sont décédés à 28 jours au cours de l'étude. Dans le groupe standard, 8 patients sur 36 (22 %) sont décédés par rapport à 13 patients sur 35 (37 %) dans l'autre groupe. Ce qui correspond à une mortalité diminuée de 40 % dans le groupe ZMapp. Autrement dit, pour 100 patients traités, le ZMapp permettrait d'en sauver 15.
Outre le problème de recrutement, les auteurs soulignent deux facteurs limitants dans l'étude. Le premier est que, si les sujets inclus étaient symptomatiques depuis quelques jours seulement, l'infection remontait très probablement à au moins une semaine ou plus, un délai au-delà de la fenêtre des 5 jours ayant montré une efficacité de 90 % chez le primate. Le second est que 7 des 8 décès du groupe ZMapp sont surveneus avant le 4e jour, avant la seconde injection.
Le niveau de significativité n'a pas été atteint, la probabilité de supériorité étant de 91,2 % pour un objectif de 97,5 %. « C'était prévisible dès le début de l'étude et cela ne nous a pas découragés, souligne le Pr Malvy. La FDA ne s'y est pas trompée. Dès les résultats préliminaires, l'administration américaine a planifié l'autorisation de son utilisation dans le cadre réglementaire d'un protocole d'usage étendu (EAP, expanded access protocol) ».
Tout n'est pas résolu pour autant en un seul essai, comme l'indique Denis Malvy. « En cette période interépidémique, nos équipes continuent à travailler sur le ZMapp et le favipiravir, précise-t-il. Avec la perspective d'une qualification à venir du ZMapp comme première ligne, ces agents prometteurs figurent parmi les stratégies à construire et à évaluer dans la prise en charge spécifique de la maladie Ebola. »
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